IMMOBILIER. Le marché de la vente de maisons tend à reprendre lentement, mais l’inventaire est très faible, un déséquilibre qui embrouille la tâche des courtiers immobiliers.
Les courtiers immobiliers, avec lesquels le journal s’est entretenu, font observer d’emblée que la situation actuelle est fortement marquée par le manque de maisons à vendre par rapport à la demande des acheteurs. L’un de ceux-là, Pierre Sansoucy, propriétaire et directeur de l’agence Remax à Drummondville, expose deux observations.
L’une d’elles est que «bien des gens âgés qui envisageaient de vendre pour aller en résidence ont hésité pour finalement décider de rester dans leur maison et on peut facilement comprendre pourquoi. Ils ont simplement remis leur projet. Et aussi, il y a eu ce problème qu’ont connu les propriétaires qui avaient vendu leur maison avant la pandémie et qui se sont trouvés dans l’obligation de chercher une nouvelle demeure dans des conditions loin de leur être favorables».
Le contexte de la COVID-19 a, selon lui, eu pour effet de changer l’image de l’immobilier, obligeant les agents à travailler différemment, en marge des consignes sanitaires dictées par la Santé publique.
«À un certain moment, au plus fort de la crise, les visites étant interdites, il a fallu se montrer créatifs. Nous avons organisé des visites virtuelles et, pour accélérer le travail, on a demandé aux acheteurs de se préqualifier auprès de leur banque, document à l’appui. Pour encore faciliter notre tâche, nous avons mis au point des logiciels, notamment pour traiter et améliorer des photos prises par les vendeurs avec leur cellulaire. Les courtiers les plus vieux ont eu à apprendre à travailler avec les nouvelles technologies. Même à l’intérieur de notre équipe, nos réunions se font par Zoom. Je suis convaincu que plusieurs de ces nouvelles méthodes vont continuer dans le futur et pas seulement dans notre domaine. En même temps, on sait que les plus jeunes, qui n’ont aucun mal à travailler avec les nouvelles technologies, seront de plus en plus nombreux. Une étude récente nous a montré qu’en 2022 les jeunes de 35 ans et moins formeront 50 % de notre clientèle».
Selon Pierre Sansoucy, l’année 2020 avait cependant démarré sur des chapeaux de roues. «On a connu deux mois record au début de 2020. À tel point que, malgré la pandémie qui nous a fait perdre deux mois d’efficacité, nous sommes revenus à nos chiffres de l’an dernier», a-t-il révélé tout en faisant valoir que le taux de prêt hypothécaire, qui peut actuellement se dénicher à 2,35 % (fermé cinq ans), est un élément très avantageux et prometteur pour la reprise.
Vendre facilement, acheter difficilement
Même son de cloche du côté de Marc-Antoine Benoit, courtier pour Via Capitale platine, qui met en perspective la facilité de vendre versus la difficulté d’acheter.
«Le fait que l’inventaire des maisons à vendre est bas a pour conséquence que le vendeur n’aura pas de mal à trouver preneur pour sa propriété, peut-être même à un prix plus élevé que prévu, mais ce n’est pas aussi facile de dénicher la nouvelle maison qui cadrera dans son budget, surtout si plusieurs acheteurs font une offre sur la propriété qu’il convoite», fait remarquer celui qui est membre du CA de la Chambre immobilière de l’Estrie et du Centre-du-Québec.
Dans le contexte actuel, selon lui, il faut une raison sérieuse pour se lancer dans le processus de vente. «Les gens qui avaient simplement le goût de changer de maison, soit par exemple parce qu’un bébé s’en vient et qu’il faut une chambre de plus, ont probablement reporté leur décision en raison de l’incertitude créée par la pandémie de COVID-19. Par contre, ceux qui sont plus motivés, soit à cause d’une séparation, d’un transfert d’emploi ou d’un problème financier important, n’hésiteront pas à aller de l’avant».
Il a aussi observé que certains acheteurs, pressés de se trouver un toit parce que leur propriété s’est vendue avant la pandémie, ont soumis une offre plus élevée pour être certains de pouvoir conclure une transaction.
«À vue d’œil, je dirais que de 10 à 15 % des acheteurs se sont trouvés en mauvaise position à un certain moment. J’ai vu des prix plus élevés de 2000 $ à 4000 $ et même une fois à 6000 $ et plus. C’est nettement un marché de vendeurs à ce moment-ci. D’après moi, ça tend à se stabiliser et ça va sans doute redescendre, mais personne ne sait quand», ajoute M. Benoit.
Sept acheteurs pour un vendeur
À la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), les statistiques donnent raison aux courtiers drummondvillois, selon ce qu’a pu analyser, à notre demande, Audrey-Anne Coulombe, agente principale, Relations avec les médias à la SCHL.
«Nous avons analysé rapidement les données Centris et voici ce qu’on peut en déduire : au 1er trimestre de 2020, les conditions de marché avantageaient les vendeurs dans la région de Drummondville. Il y avait 6,9 acheteurs pour un vendeur. Au cours des quatre derniers trimestres (2019T2 à 2020T1) il y a eu 586 ventes une hausse de 15 % par rapport aux quatre trimestres précédents. Les inscriptions en vigueur ont baissé de 10 % sur la même période».
Par ailleurs, dans le numéro spécial des Perspectives du marché de l’habitation (PMH) publié la semaine dernière par la SCHL, il est avancé que le marché canadien de l’habitation connaîtra des baisses en 2020 et devrait commencer à s’améliorer d’ici un an. Les mises en chantier, les ventes et les prix demeureront probablement inférieurs à leurs niveaux d’avant la pandémie jusqu’en 2022.
Et comme c’est souvent le cas pour ceux qui veulent se projeter dans l’avenir, la SCHL sert un avertissement : «Le moment précis et la rapidité de la reprise sont très incertains, car nous ne connaissons pas encore l’évolution future du virus».
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