Des lapins urbains

Michael Deetjens
Des lapins urbains
Le lapin à queue blanche est très présent en milieu urbain. (Photo : Deposit)

ANIMAUX. La nuit tombée, de plus en plus de résidents observent sur leurs terrains et dans les parcs de la ville, de petites silhouettes furtives aux longues oreilles. Lapins sauvages, lièvres ou lapins domestiques évadés, un mystère plane sur l’identité de ces petites boules de poil. Que sait-on réellement au sujet de ces discrets visiteurs?

Le Conseil régional de l’environnement du Centre-du-Québec (CRECQ) s’est penché sur la question et est en mesure de dévoiler l’identité des animaux qui gambadent dans nos quartiers. Verdict? Il s’agit de lapins à queue blanche. Membre de la famille des léporidés, qui regroupe les lapins et les lièvres, il se retrouve à l’état sauvage de l’est de l’Amérique du Nord jusqu’au nord de l’Amérique du Sud. Au Québec, on le rencontre dans la région du Grand Montréal, de Lanaudière, des Laurentides, de l’Outaouais et du Centre-du-Québec. Il tire son nom de sa queue qui lui vaut d’ailleurs en anglais le nom de Eastern cottontail, en référence à sa queue blanche qui s’apparente à une petite boule de coton.

Sa ressemblance avec le lièvre d’Amérique est indéniable, mais certaines caractéristiques permettent de les différencier. Tout d’abord, le lapin à queue blanche conserve son pelage brun à l’année, contrairement au lièvre dont la fourrure devient blanche en hiver. Les oreilles de ce lapin peuvent atteindre 6,6 cm de longueur, légèrement plus petites que celles du lièvre qui elles peuvent atteindre 6,8 cm. Ses pattes postérieures sont plus courtes, entre 3 cm et 8 cm, alors que celles du lièvre peuvent mesurer 15 cm. Autre fait intéressant, le lapin à queue blanche utilise un terrier pour mettre bas alors que le lièvre confectionne un nid d’herbe dans un abri à la surface du sol.

Actif principalement à l’aube et au crépuscule, il passe la majeure partie de sa journée à l’abri dans un trou ou dissimulé dans un fourré, sous une souche ou un arbuste. Pendant la saison froide, il peut occuper des terriers de marmottes et de moufettes. Il lui arrive parfois de creuser des tunnels dans la neige.

Herbivore endurci, il déguste volontiers une multitude de plantes : pissenlits, trèfles, plantains, verges d’or, etc. En hiver, il se rabat plutôt sur les ramilles et bourgeons d’arbustes et d’arbrisseaux.

En augmentation?

Même si le petit mammifère semble plus nombreux qu’auparavant, il est encore difficile de le confirmer avec certitude. Le ministère de la Forêt de la faune et des parcs (MFFP) affirme que «l’absence de suivi ne permet pas de déterminer si l’espèce a étendu son aire de répartition récemment ni si elle est en augmentation». Il reconnaît toutefois qu’il n’est pas impossible que l’espèce soit plus abondante, car elle profite des modifications apportées aux écosystèmes par l’agriculture et l’urbanisation. Contrairement au lièvre qui préfère de loin les milieux forestiers, le lapin à queue blanche apprécie la nourriture et les abris que lui procurent nos quartiers résidentiels. Un autre élément pouvant expliquer son abondance est son taux de reproduction élevé. «La femelle peut avoir jusqu’à 4 portées par année, entre 2 et 8 petits», nous informe le CRECQ. De plus, de l’avis du MFFP, les hivers plus doux et un faible couvert de neige au sol pourraient favoriser l’animal, qui est moins adapté aux conditions hivernales que le lièvre d’Amérique.

Rôle écologique

Malgré son air sympathique, il arrive que le lapin à queue blanche vienne se régaler dans nos potagers. Un grillage planté à une dizaine de centimètres de profondeur et qui s’élève à plus d’un mètre de hauteur suffit souvent à mettre fin à ses projets gastronomiques. Ceci dit, son importance dans l’écosystème urbain n’est pas négligeable. En effet, il représente pour de nombreux prédateurs une source alimentaire disponible pendant toute l’année. C’est le cas des oiseaux de proie et des mammifères carnivores comme les ratons laveurs, les renards et les coyotes. Le CRECQ nous informe également que même nos chiens et chats domestiques peuvent attaquer le petit visiteur. Pour éviter les prédateurs, il prendra la fuite en zigzaguant à toute vitesse ou demeurera immobile dans l’espoir de ne pas être repéré. En dépit de ses méthodes de fuite et de camouflage, la prédation constante fait en sorte qu’il vit rarement plus de 3 ans. Enfin, ses habitudes alimentaires contribuent à contrôler la croissance de plusieurs végétaux dont certains sont souvent considérés à tort comme de «mauvaises herbes» . Ce contrôle favorise la biodiversité en permettant à d’autres espèces végétales de croître à leur tour.

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