Quand le Marché public s’éveille en même temps que le soleil

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Par Jean-Pierre Boisvert
Quand le Marché public s’éveille en même temps que le soleil
Le Marché public de Drummondville. (Photo : Ghyslain Bergeron)

MAGAZINE. Il est 5 heures, un certain vendredi matin d’août. Alors que les premières lueurs chassent doucement la nuit et que l’activité autour du Marché public en fait tout autant avec la quiétude des lieux, déjà de vives couleurs et de délicieuses odeurs s’annoncent.

Quelques camions sont déjà arrivés, stationnés à reculons pour faciliter le déchargement des boites de fruits et légumes, et les tables sont montées une à une par les commerçants. Tout ça se fait dans la bonne humeur. Aucun doute, se lever en plein milieu de la nuit pour débuter une longue journée de travail n’affecte pas le caractère de ces fiers producteurs de produits maraichers.

Étienne Lavoie, co-propriétaire de la Ferme J.Y. Gamelin, de Pierreville, est l’un des premiers à s’affairer. «Là nous sommes trois pour débuter, mais une nouvelle personne s’ajoutera toutes les heures. Nous serons neuf dans les périodes de grande affluence. On s’est levé vers 3h30. Il faut prévoir 45 minutes de voyagement et un peu plus de deux heures pour tout installer», explique-t-il avec un sourire qui ne le quitte pas.

Parviendra-t-il à tout vendre? «Nous sommes venus avec deux camions pleins et d’autres arriveront au courant de la journée. Oui, généralement, on vend tout. Ce qui reste sera encore très bon demain et, s’il y a des produits invendus le samedi, il y a un monsieur qui vient de Windsor pour les ramasser à des fins de transformations comme des marinades».

Photo Ghyslain Bergeron

Du côté des Jardins de la paysanne, l’heure est aussi au montage des tables et à la disposition des fruits et légumes qui ne manqueront pas de colorer les comptoirs. Fanny Guillemette, son conjoint Steve Guilbert et leur équipe arrivent de Saint-Hyacinthe à bord de quelques véhicules dont un camion réfrigéré. «Notre commerce est présent ici depuis 63 ans», fait-elle remarquer. Le ton est joyeux alors que fourmillent autour d’elle une demi-douzaine d’assistants, dont chacun connaît son rôle. Ici comme partout ailleurs dans le Marché public, point besoin de tergiverser sur l’urgence des moyens à prendre pour sauver la planète. Ils vivent de la terre et savent ce qu’il lui faut pour respirer. Les sacs écoresponsables sont offerts à la clientèle. «Ils sont faits à la main et sont vendus 7 dollars chacun. Nous sommes à liquider les sacs de plastique. Les gens le savent et ils apportent de plus en plus souvent leurs contenants. On a un partenariat avec l’Archiferme de Saint-Majorique qui propose une agriculture naturelle. On lui laisse une place à notre comptoir», souligne Fanny Guillemette qui précise que son entreprise est spécialisée davantage dans la distribution de produits de fermes locales. En cela, les Jardins de la paysanne sont en accord avec l’objectif d’encourager une agriculture durable et de proximité, comme le rappelle chaque année la Semaine québécoise des marchés publics.

Installations permanentes

À l’intérieur, le café a évidemment une place de choix en ces premières heures du jour. Ça tombe bien, Christian Levasseur vient d’ouvrir son stand, bien ancré depuis 15 ans au centre de la place, où sont déjà alignées les quelque 40 variétés de café dont il vous parlera avec enthousiasme, sagesse et connaissance. Si vous n’êtes pas certain du genre du goût que vous aimeriez découvrir, vous vous verrez proposer un tableau qui décline les différentes saveurs, du brun vers le noir, ainsi que leur intensité. «Tout ce qu’il y a ici, ce sont des grains de qualité. L’important avec le café, proclame l’homme de la Brûlerie des Cantons, c’est de le faire comme tu l’aimes et non pas comme tu penses qu’il devrait être». À méditer…

Christian Levasseur, de la Brûlerie des cantons, offre une quarantaine de variétés de café. (Photo Ghyslain Bergeron)

Chez Maestro Pasta, la particularité est que la production des pâtes est faite sur place depuis 2016. Pierrette Lacourse et son conjoint François Dionne doivent venir au marché tous les jours de la semaine pour tout fabriquer et recevoir les produits livrés tels que la farine et les huiles de l’épicerie fine qui occupe un coin de leur stand. «On voit bien que les gens viennent au marché aussi pour le social. Faire des rencontres et prendre le temps de se parler. Il y en a même parmi ceux qui nous abordent qui se confient, qui racontent leurs bonnes nouvelles, un peu comme chez la coiffeuse. Au fond c’est peut-être leur seule rencontre de la semaine», d’avancer Pierrette Lacourse. «C’est beaucoup de travail durant toute une semaine pour finalement vendre seulement durant deux jours», d’enchainer François Dionne.

Photo Ghyslain Bergeron semaine pour finalement vendre seulement durant deux jours», d’enchainer François Dionne.

Un client avant les autres

Jean-Guy Shooner se présente vers 6 heures tous les vendredis. Il revendique le titre de premier client du jour. Bien que l’ouverture du Marché public soit officiellement annoncée à 7 heures, il se fait servir quand même. «Je suis un lève-tôt. J’aime venir ici à cette heure-là, je prends mon temps pour faire mes choix et pour jaser avec les commerçants, je n’attends pas pour me faire servir, je suis détendu, bref il n’y a pas de stress», de faire valoir le Drummondvillois de la première heure.

André Lebel est agent de courtoisie, c’est lui qui débarre les portes bien avant 5 heures. «On a vraiment un beau marché public. C’est aéré et ça incite à la rencontre, à la conversation. Les gens veulent des produits frais et découvrent une ambiance formidable».

André Lebel voit aussi à rendre service aux clients lorsque c’est nécessaire. Lors du passage de L’Express, une dame s’est approchée pour lui demander de changer un pneu de sa voiture à cause d’une crevaison. «Ça, madame, je ne suis pas qualifié pour ça…» Quelques minutes plus tard, la dame est passée devant lui accompagnée d’un bon samaritain :«Voyez, j’ai trouvé quelqu’un de plus charitable!»

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