Le sexe, le choix d’une Drummondvilloise

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Par Frederic Marcoux
Le sexe, le choix d’une Drummondvilloise
Cynthia Marcoux (Photo : Photo gracieuseté - Cynthia Marcoux)

DOSSIER. Oui, choisir l’industrie du sexe est possible. Selon la danseuse nue drummondvilloise, Cynthia Marcoux, Drummondville gagnerait à s’ouvrir davantage à la sexualité, tout comme elle l’a fait depuis bientôt 20 ans.

Escorte à l’âge de 15 ans, actrice porno pendant quelques années et maintenant danseuse nue à Saint-Jean-sur-Richelieu, Cynthia Marcoux n’a jamais regretté sa décision de gagner sa vie de cette façon. Elle a toutefois le sentiment que la région devrait s’ouvrir à l’industrie du sexe.

«Il manque quelque chose à Drummondville, argue celle qui est âgée de 32 ans. C’est tellement mort. Il manque d’action, d’amour et de sexualité dans la région.  Le dernier bar de danseuses à Drummondville avait fermé en partie à cause de moi. Je faisais partie des trois filles qui avaient été arrêtées avec de la drogue sur elles. Je l’ai mis sur ma faute pour protéger les autres.»

La danseuse nue assure ne jamais consommer pour s’exercer dans l’industrie du sexe, contrairement à plusieurs de ses collègues danseuses.

Dès son jeune âge, la Drummondvilloise a choisi le sexe pour travailler dans la région. Approchée par un homme d’une quarantaine d’années sur Internet, via la plateforme mIRC populaire dans les années 1990, Cynthia Marcoux, alors âgée de 15 ans, a décidé de se lancer dans l’industrie du sexe, sans en informer sa mère.

«Je me suis sentie à l’aise dès le départ. En vieillissant, je me suis demandée pourquoi je ne continuerais pas. Je suis mon propre boss, je fais ce que je veux et je me sens libre. J’ai eu mon premier client à 15 ans en tant qu’escorte et, à 20 ans, j’ai voulu aller plus loin en commençant à être actrice dans des films pornographiques», raconte la principale intéressée.

«Pourquoi changer mon mode de vie?»

Peu après l’âge de 20 ans, Cynthia Marcoux a décidé d’informer sa mère de ses activités sexuelles. Quelque peu secouée, cette dernière a tout de même respecté la décision de sa fille. Ayant perdu son père quand elle avait trois ans, Cynthia Marcoux a décidé de révéler son mode de vie à sa famille paternelle. Ces derniers l’ont renié.

«Je me suis fait tasser et renier du côté de mon père, avoue-t-elle. Ils ne sont pas très ouverts d’esprit; c’est différent du côté de ma mère. Ils veulent juste que je sois heureuse et en sécurité. Ma mère ne me juge pas et elle accepte ce que je fais. Pourquoi changer mon mode de vie pour plaire aux gens ? Il faut se sentir bien dans ce que tu fais.»

La Drummondvilloise a néanmoins tenté sa chance dans un autre domaine : le télémarketing. Elle a toutefois décidé de retourner dans l’industrie du sexe. La liberté, l’argent et l’occasion de faire ce qu’elle aime sont tous des facteurs qui ont influencé sa décision. Depuis quelques mois, elle a cependant cessé d’être escorte. Elle a craint pour sa vie à quelques occasions, notamment lorsqu’un client a pointé une arme en sa direction.

Un coup de cœur pour la porno

Cynthia Marcoux retournerait sans hésiter dans l’univers des films pornographiques. Une scène pouvait lui rapporter 600$. Le film porno Ève Angélique et Diabolique tourné pendant une fin de semaine lui a permis d’amasser plus de 3000$ en argent comptant.

«Ça fait six ou sept ans que j’ai arrêté de faire de la porno, mais si on me demandait d’en refaire, je dirais oui. Cela a été une expérience incroyable et je me suis sentie respectée. Je me suis sentie à l’aise. C’était comme une deuxième famille. Je n’ai jamais été forcée de faire quelque chose que je ne voulais pas faire. (…). C’est sécuritaire, on est testé tous les mois pour les infections transmissibles sexuellement (ITS). Au moindre doute, tu ne peux pas tourner et on se protège toujours.»

Cynthia Marcoux

Cynthia Marcoux n’est pas prête à mettre un terme à sa carrière dans l’industrie. Elle souligne que danser nue peut lui permettre d’amasser plus de 1000 $ par fin de semaine. Célibataire depuis deux ans, elle admet toutefois qu’elle ne serait pas en mesure de continuer à s’exercer si elle trouvait l’amour.

«Quand tu fais ce métier-là, tu ne peux pas être en couple. Tu n’iras pas donner ton corps à quelqu’un d’autre pour de l’argent si tu aimes ton partenaire. Je ne suis pas capable d’avoir un copain dans ma vie, j’ai presque toujours vécu de ça. Si un homme te laisse aller dans ce milieu-là, c’est parce qu’il ne ressent pas vraiment d’amour pour toi», croit-elle.

À moins d’un revirement majeur dans sa vie, la Drummondvilloise a l’intention de poursuivre sa carrière de danseuse nue pendant plusieurs années. Elle a le sentiment de s’épanouir en faisant ce qu’elle aime.

Le côté sombre

Cynthia Marcoux a confié à l’auteur de ces lignes s’être fait violer lors de son enfance. En vieillissant, elle a constaté que plusieurs femmes de l’industrie du sexe ont vécu le même genre de traumatisme à un jeune âge comme elle.

La Drummondvilloise de 32 ans a mentionné, lors de l’entretien téléphonique avoir eu l’impression de sauver des fillettes d’un viol, en pratiquant le métier d’escorte pendant plusieurs années. Certains clients, des hommes de tous les milieux comme des avocats, des médecins et des travailleurs de la construction, lui demandaient parfois de prétendre qu’elle était âgée de 14 ou 15 ans pour assouvir leurs fantasmes.

«Physiquement, j’ai l’air d’une fille de 15 ou de 16 ans. Je me dis qu’en faisant ce métier-là, que ce soit comme danseuse ou escorte, combien de filles par jour ai-je sauvées d’une agression sexuelle», admettant au passage qu’il lui arrivait fréquemment de ressentir de la rage envers ses clients aux tendances pédophiles.

Constatant, au fil des années, qu’elle avait trop de caractère pour travailler comme escorte, Cynthia Marcoux a cessé de s’exercer dans le secteur, il y a quelques mois.

(NOTE DE LA RÉDACTION) L’Express présente aujourd’hui un dossier sur l’industrie du sexe, un univers bien présent à Drummondville, mais qui nous apparaît fort discret voire invisible. Des gens de la région qui travaillent ou – qui ont travaillé – dans ce secteur méconnu de la communauté ont accepté de briser le silence.

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