Un chien guide pour David

Un chien guide pour David
Depuis quatre ans

Jacinthe Beaulieu en appelle au bon cœur de ses compatriotes. David, le garçon presqu’aveugle qu’elle héberge depuis plusieurs années a besoin d’aide. Sans le sou, sans famille et lourdement éprouvé par le destin, l’arrivée d’un chien guide dans sa vie lui serait d’un immense secours.

Le parcours de David tient presque de la tragédie grecque. Alors que certains individus naissent dans le confort et entourés d’amour, le jeune Drummondvillois de 24 ans, lui, a mené une rude bataille pour survivre.

Touchés par le courage exceptionnel de leur pensionnaire, le couple Jacinthe Beaulieu  et  Dany Bouchard cherchent par tous les moyens à l’aider. Ils n’hésitent pas à réclamer justice en son nom.

«Dès le départ, David n’est pas né sous une bonne étoile, comme si un petit nuage noir s’acharnait à le suivre sur son chemin de vie», déplore Mme Beaulieu, qui l’a accueilli dans son foyer alors qu’il n’avait que 15 ans.

Le jeune homme aurait pourtant toutes les raisons du monde de lâcher la serviette. Sa vie a si mal commencée…

Orphelin de père très tôt, David avait à peine trois ans lorsque sa mère l’a remis à la Direction de protection de la jeunesse (DPJ), ce qui entraina la ronde des familles d’accueil.

C’est que David a besoin d’attentions, de soins. Il souffre de cystinose, une maladie dégénérative très rare se caractérisant par l’accumulation anormale d’un acide aminé qui se répand dans plusieurs organes dont les reins, les muscles, le pancréas, le cerveau et les yeux. Son rein droit ne fonctionne plus, de sorte qu’il doit se soumettre à quatre traitements de dialyse (de quatre heures)  par semaine.

Pas aveugle, pas de chien Mira

Au fil des ans, David a perdu 90 % de sa vision. Avoir un compagnon canin l’aiderait à se déplacer. Puisqu’il n’est pas totalement aveugle, Mira refuse de lui accorder un chien guide.

Qu’importe, David est parvenu à se procurer un chiot l’an dernier, qu’il a nommé Bella. Un berger allemand. Bella brisait la solitude de David en plus de l’aider à se déplacer.

David n’a pas beaucoup d’amis. L’instabilité affective que lui a imposée la vie le rend méfiant. Il ne s’ouvre pas facilement, se lie donc difficilement. C’est dire l’importance qu’avait Bella pour lui.

Puisque le logement supervisé lui était refusé pour manque d’autonomie, David a dû louer une chambre chez une dame qu’il connaissait et qui s’est ensuite chargée de l’aider quotidiennement à titre de proche aidante.

Un jour, il a réalisé que celle-ci lui avait volé tous ses avoirs, soit les maigres prestations qu’il reçoit de l’aide sociale. Même Bella a un jour disparu sans qu’on en retrouve la trace.

Une enquête a démontré hors de tout doute que la dame qui hébergeait David s’est bel et bien servie dans son compte en banque. Un procès s’en est donc suivi. La sentence sera d’ailleurs prononcée le 20 décembre prochain.

«Le plus désolant dans cette histoire, c’est que David connaissait cette dame depuis dix ans», confie Jacinthe Beaulieu, qui l’a alors ramené chez elle.

Seul au monde

C’est que David n’a ni frère, ni sœur, ni cousins, ni oncle ou tante. Personne. Et à chaque fois qu’il revoit sa mère (même sporadiquement), il se sent rejeté de sa part. Lors de la période de vacances du couple Jacinthe-Dany, l’été dernier, celle-ci a même refusé de le recevoir, prétextant plus d’une bonne raison.  «Je n’ai plus de mère», a-t-il dit à Jacinthe après son ultime tentative de rapprochement mère-fils.

Le couple Beaulieu-Bouchard, qui a hébergé plus d’une vingtaine d’adolescents de la DPJ de 2005 à 2011, constate que plusieurs jeunes développent un grave problème de l’attachement avec le temps. Comme David.  

 «Ces jeunes de la DPJ ont des histoires très lourdes. Beaucoup trop de bagages à un âge où ils devraient vivre dans l’insouciance. Ils ressentent intensément cette brisure dans leurs liens d’attachements.

L’attachement est la base d’équilibre de tout individu. Il se forme donc une brèche, un vide en eux et ceux-ci ont du mal à se forger une identité. David n’est pas différent. Sa route a été longue et elle est loin d’être terminée», observe Jacinthe.

 Le couple s’est attaché à leur pensionnaire.  «Depuis que je connais David, je ne l’ai vu pleurer qu’une seule fois et Dieu sait combien nombreuses ont été les circonstances où il aurait pu le faire. Il en aura fallu des années pour qu’il se confie à nous, en toute confiance», souligne celle qui a abandonné son boulot en psychiatrie pour se consacrer aux jeunes confiés par la DPJ, même s’ils arrivent mal en point.

L’espoir d’une greffe

Dernièrement, le Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke a  inscrit David à sa liste de receveurs pour un nouveau rein. David attend impatiemment que son paget sonne pour l’alarme pour son éventuelle greffe. Après quatre ans de dialyse, David commence à s’essouffler et sa vision se détériore graduellement.

«Dans les derniers mois, David nous a partagé l’ambivalence qui l’habite. «Est-ce que je rends les armes où je continue cette bataille ?» Souvent, l’écoute est la chose que nous pouvons lui offrir. N’ayant jamais vécu une telle détresse, nos mots pour lui exprimer notre compassion sont bien limités», confie Mme Beaulieu.

Bien que David tienne une place spéciale dans leur vie, Jacinthe et Dany envisagent toutefois d’emménager à Québec  pour se rapprocher de leurs enfants et petits-enfants. Ils cherchent de l’aide pour David, une source d’affection aussi.

David approche du fil d’arrivée. Son nouveau rein le rendra plus autonome. La présence d’un chien changerait sa vie. 

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