Une dignité à deux vitesses : réponse à monsieur Pomerleau (TRIBUNE LIBRE)

Une dignité à deux vitesses : réponse à monsieur Pomerleau (TRIBUNE LIBRE)
Tribune libre

En date du 11 février 2019, monsieur Roger Pomerleau a écrit un très bon article dans ce journal et c’est un agent correctionnel retraité après 35 ans de services qui vous le dit.

Le seul petit bémol que je me permettrais est à l’effet qu’il est vrai que la communauté musulmane ne s’est pas indignée de la sentence dans le cas de la famille Shafia, mais à l’époque, la sentence qu’ils ont reçue était déjà la plus sévère de notre code criminel étant donné que l’article 745.51 du code n’a été adopté qu’en 2011. Et c’est cela que je reproche à la communauté musulmane de la ville de Québec qui aujourd’hui trouve la sentence imposée à Alexandre Bissonnette trop clémente alors qu’avant 2011 ils se seraient réjoui d’une sentence à vie avec une période d’éligibilité à 25 ans étant donné que cela aurait été la sentence la plus sévère possible.
Dans le cas présent, je donne raison au juge Huot qui a délibérément livré un jugement qu’il souhaite être contesté jusqu’en cour suprême pour clarifier la légitimité de l’article 745.51 une bonne fois pour toutes.
Ceux qui disent que ce juge n’avait aucun droit de changer les dispositions de l’article 745.51 font fausse route, parce qu’à toutes les étapes d’une cause, un juge, peu importe l’instance qu’il représente, a le droit de juger de la constitutionnalité d’un article de loi et ce sera aux tribunaux supérieurs de déterminer si ce juge a erré en droit ou non.
Cependant, je suggère fortement au gouvernement Trudeau, si cela n’a pas déjà été fait, de ne pas attendre que cette cause traverse toutes les étapes de contestations jusqu’à la cour suprême, mais qu’il demande lui-même un avis à la cour suprême concernant la constitutionnalité de l’article 745.51, une procédure rarement utilisée mais tout à fait légale.

Je peux déjà affirmer que, selon moi, et je n’ai pas la prétention d’être un juriste ou un constitutionnaliste, l’article 745.51 pourrait bien être inconstitutionnelle en vertu des articles 7 et article 12 de la charte canadienne des droits et libertés.

Une chose est cependant certaine, c’est que l’article 745.51 va très certainement à l’encontre de la loi sur le système correctionnel et la liberté sous condition dont la partie I selon son article 3 stipule ce qui suit :  «Le système correctionnel vise à contribuer au maintien d’une société juste, vivant en paix et en sécurité, d’une part, en assurant l’exécution des peines par des mesures de garde et de surveillance sécuritaires et humaines, et d’autre part, en aidant au moyen de programmes appropriés dans les pénitenciers ou dans la collectivité, à la réadaptation des délinquants et à leur réinsertion sociale à titre de citoyens respectueux des lois».

Comment voulez-vous assurer la réadaptation des délinquants au moyen de programmes appropriés en vue de leur réinsertion dans la société quand la sentence infligée qui peut souvent dépasser l’espérance de vie d’un être humain rends cette réinsertion éventuelle en société tout à fait impossible.

Gilles Bugeaud

St-Cyrille-de-Wendover

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