Des jeunes écorchés retrouvent l’espoir

Des jeunes écorchés retrouvent l’espoir
Cette salle de classe spéciale est en quelque sorte une passerelle entre l'école régulière et le Centre Sainte-Thérèse pour adultes ou encore vers l'apprentissage d'un métier

EDUCATION. Alors que les commissions scolaires se démènent pour empêcher des élèves de mettre fin à leurs études avant terme, prennent forme des alternatives comme celle de l’école LaRue’L, qui a accueilli quelque 150 ex-décrocheurs sur ses bancs depuis sa création, en 2008. Et si l’enseignement adapté était une réelle solution?

Cette salle de classe spéciale mise sur pied par le refuge La Piaule est en quelque sorte une passerelle entre l’école régulière et le Centre Sainte-Thérèse pour adultes ou encore vers l’apprentissage d’un métier, mieux connu sous le nom de DEP.

«Ici, c’est comme un tremplin, explique l’intervenante Céline Théoret, une ex-enseignante qui s’occupe du programme scolaire. On constate au fil des ans que plusieurs d’entre eux se remettent en action (après leur passage à l’école La Rue’L). Ils intègrent le marché du travail, ont un projet ou retournent à l’école. C’est ça l’idée, les remettre en action.»

À l’école LaRue’L, les raccrocheurs ont l’opportunité de socialiser lors d’activités artistiques, du repas offert gratuitement le midi, d’être soutenus par l’équipe d’intervenants et d’entendre des conférenciers sur divers sujets et même d’intégrer une chorale.

Après le dîner, les élèves se consacrent au français et aux mathématiques jusqu’à 15h puis disposent de la dernière heure pour faire une activité de leur choix.

Ceux qui fréquentent l’endroit réintègrent ainsi le milieu scolaire malgré leur vie cahoteuse, tout en se remettant à niveau avec un horaire allégé de 20 heures par semaine. C’est le cas de Mélissa, de Mickaël, d’Alexandre et de Shane qui apprécient cette formule mieux adaptée à leur réalité que l’école normale.

Trou de mémoire

Pour Alexandra, une jeune femme de 29 ans, l’école LaRue’L s’est révélée un important support d’épanouissement, elle qui avait quitté l’école à 16 ans, victime d’intimidation à répétition.

Un matin, il y a quelque temps, la jeune femme a été retrouvée chez Tim Hortons sans même savoir comme elle s’y rendue. Somnambulisme, peut-être. Un trou noir dans sa mémoire. Elle a perdu ses souvenirs des trois dernières années.

Anxieuse, en proie à des crises de panique, Alexandra a longtemps eu du mal à s’affirmer. Jusqu’à ce qu’elle aille à l’école LaRue’L. L’accompagnement académique et le soutien psychologique qu’elle y a trouvé lui ont permis de gagner en confiance.

Plus tôt cette semaine, elle a réussi un examen de mathématiques. Une fierté pour elle. «L’école m’a sorti de l’isolement et me montre que je peux faire des projets», assure celle qui envisage un DEP d’Assistance technique en pharmacie et même de devenir travailleuse sociale.

Une école réparatrice

En fin de vingtaine, Mélissa s’est décidée à retourner étudier un métier qui lui permettra enfin de vivre décemment avec son fils de huit ans. Depuis trois ans, du lundi au jeudi, elle refait ses matières à l’école LaRue’L.

Aux prises avec des problèmes personnels, victime d’intimidation au quotidien, Mélissa avait quitté l’école à 16 ans, elle aussi. De tempérament plutôt fougueux et marginal, Mélissa est devenue toxicomane, s’est démenée d’une jobine à l’autre puis, un jour, elle en a eu assez. «À 21 ans, j’ai eu un garçon et ça changé ma vie. Ça m’a permis de me ranger», confie celle qui envisage de devenir chauffeure de camion.

Fréquenter l’école LaRue’L la motive. Elle y a trouvé de l’aide et des amis. «L’école LaRue’L, c’est comme une famille. On y a beaucoup de support, on se tient entre élèves. On se parle beaucoup. C’est très réparateur.»

«Quand je suis arrivée ici, je vivais des moments difficiles et ils m’ont aidé à passer à travers. Ça m’a aidé à regarder en avant au lieu d’en arrière», raconte Mélissa, qui se dit désormais «très motivée» à atteindre son but.

Pour une vie meilleure

Mickaël, lui, réessaie L’école LaRue’L. Il était venu en 2010, mais sans grand sérieux. Maintenant âgé de 30 ans et père d’un fils de  huit ans, il dit en avoir fini avec la consommation de drogues et ses activités illicites.

Sa vie n’a rien d’un jardin de roses. À 14 ans, il a quitté l’école, juste après la mort de sa mère, qui l’a pour ainsi dire laissé seul avec un père irresponsable. Ce fut alors la tournée des centres jeunesses. À 16 ans, pour payer son logement, il s’est mis à vendre de la drogue. «C’était une solution facile; c’était de l’argent vite fait, bien fait», assure Mickaël.

Lorsque son fils Tristan est né, il a compris qu’il devait changer de vie. «En le voyant grandir, j’ai réalisé que je devais cesser de consommer et de vendre de la drogue.»

Il envisage de suivre une formation en soudure. «Autant pour mon enfant que pour moi, je veux une meilleure vie. Tout le monde dit que l’argent ne fait pas le bonheur, mais ça y contribue», juge-t-il.

Reprendre confiance en soi

Après plusieurs années dans l’enfer de la drogue, Shane a décidé de changer de mode de vie et d’aller chercher une formation comme charpentier-menuisier. S’étant vu refuser une aide financière pour s’inscrire à l’école aux adultes, l’école LaRue’L a été une solution pour lui.

Aux prises avec le syndrome de Gilles de la Tourette, un horaire d’études de 20 heures par semaine lui convient. «J’avais perdu l’estime de moi à cause de ma consommation de drogue. Avec les encouragements, ici, ça m’a beaucoup aidé à me reprendre», confie Shane, qui a 24 ans. 

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