La longue saga du bureau d’enregistrement

Gabriel Cormier
La longue saga du bureau d’enregistrement
MM. Adolphe Bernard, Robert A. Robins et Charles Howard Millar au bureau d’enregistrement, Drummondville, 1901. (Société d’histoire de Drummond, Collection régionale; IC-2.1e14)
Gabriel Cormier (Photo gracieuseté)

SOCIÉTÉ D’HISTOIRE DE DRUMMOND. Alors que le petit hameau de Drummondville n’en est qu’à ses tous débuts et qu’il se remet à peine du grand brasier de 1826, le gouvernement du Bas-Canada décide d’y ouvrir un bureau d’enregistrement afin de permettre aux notaires d’y officialiser des actes notariés, notamment les transactions conclues entre les acheteurs et les vendeurs de propriétés immobilières.

L’institution, créée dans les régions où la tenure seigneuriale n’existe pas, dessert alors les comtés de Drummond, d’Arthabaska, de Bagot, mais également une partie de ceux de Wolfe et de Richmond. William George Robins, ancien capitaine du régiment suisse de Meuron et vétéran de la guerre de 1812, est alors nommé registraire et enregistre le 9 août 1830 le premier document notarié de la bourgade qui est ensuite recopié fidèlement, à la main, dans un registre.

Édifice abritant le bureau d’enregistrement construit en 1861, Drummondville, 1958. (Société d’histoire de Drummond, Fonds La Parole; P89-580801-002)

Le premier édifice accueillant officiellement le bureau d’enregistrement est construit en 1861, par Alexis Belisle, à l’angle des rues Heriot et Robinson (aujourd’hui la rue Marchand). Dès lors, le bâtiment abrite diverses instances, dont le conseil municipal de Drummondville, le conseil de comté de Drummond et différentes cours de justice. La Cour de circuit, par exemple, qui tient des audiences relatives aux litiges civils de moindre envergure à Drummondville depuis 1858, occupe, de temps à autre, une petite salle de l’étage à partir de 1861. Ce local sert également, à partir de 1921, à la Cour supérieure du district judiciaire d’Arthabaska, dont fait partie Drummondville, qui se consacre, une fois par mois, aux causes civiles de toute nature et aux contestations de règlements municipaux et d’élections. Longtemps sans hôtel de ville, les échevins drummondvillois y siègent aussi, jusqu’à ce qu’un nouvel immeuble, inauguré en 1939 sur la rue Lindsay, soit officiellement dédié à l’administration municipale.

À partir des années 1920, le bâtiment vieillissant du bureau d’enregistrement fait souvent l’objet de plaintes de la part des hommes de loi qui pointent du doigt son mauvais état général, ainsi que son chauffage déficient durant la saison hivernale. En 1928, la Cour supérieure menace même de quitter la ville si un système de chauffage central avec chaudière n’est pas rapidement installé. Devant l’inaction des autorités, les juges adressent leurs remontrances directement au gouvernement et plusieurs hommes importants de la municipalité, dont le maire Walter-Alexandre Moisan, se rendent à Québec le 9 mars 1930 pour discuter du problème avec le premier ministre Louis-Alexandre Taschereau. La délégation souhaite la construction, évaluée à 125 000$, d’un palais de justice digne de ce nom et sollicite l’aide financière du gouvernement provincial pour la somme de 60 000$. Des plans sont alors préparés, mais ne seront pas réalisés, probablement victimes de la crise économique qui sévit depuis octobre 1929.

Le dossier revient sur la table en 1938 alors que le juge en chef de la province de Québec, Albert Sivigny, se rend à Drummondville pour constater par lui-même la désuétude du bureau d’enregistrement, sans toutefois que cela ne mène à quoi que ce soit. Le conseil du comté de Drummond envoie une nouvelle missive aux autorités provinciales en 1947, en vain. Puis, en 1950, les autorités font plusieurs constats : la voûte conservant les archives n’est pas à l’épreuve du feu et elle devrait être cinq fois plus grande, la pluie s’infiltre dans les murs et ceux-ci se détériorent sans cesse.

Bureau de poste, Drummondville, 1947. (Société d’histoire de Drummond, Collection Studio Lumière; P29-2.1e1)

Après plusieurs années d’attente, le conseil de comté se porte finalement acquéreur au début de l’année 1958 de l’ancien bureau de poste, rue Girouard, au coût de 25 000$. D’importantes rénovations y sont ensuite réalisées afin d’y aménager le bureau d’enregistrement. La vieille bicoque qui accueillait jusque-là l’institution judiciaire est quant à elle démolie en novembre de la même année, mettant fin à son long calvaire. Le déménagement n’est toutefois que temporaire puisque le gouvernement provincial annonce, au mois d’août 1958, l’érection d’un nouvel édifice devant accueillir tous les services provinciaux, dont ceux du bureau d’enregistrement et du palais de justice, au coin de la rue Marchand et du boulevard Saint-Joseph. Le nouvel édifice provincial ouvre finalement ses portes en 1962. Une page d’histoire se tourne à compter du 1er janvier 1994, alors que le bureau d’enregistrement de Drummondville, comme tous ceux du Québec, change de vocable et devient le bureau de la publicité des droits.

Édifice provincial, Drummondville, 1962. (Source Société d’histoire de Drummond, Fonds La Parole; P184-019063)

 

 

 

 

 

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