Rue Fradet : front commun pour retirer les sens uniques

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Par Cynthia Martel
Rue Fradet : front commun pour retirer les sens uniques
Les citoyens estiment que ce projet pilote ne fait que déplacer la circulation sur les rues voisines aggravant ainsi la situation et compromettant la sécurité des résidents. (Photo : Ghyslain Bergeron)

CIRCULATION. Des citoyens estiment que la Ville de Drummondville a fait fausse route avec le projet pilote visant à réduire le débit de circulation sur la rue Fradet. N’observant que des problèmes de sécurité depuis dix mois, ils craignent que les mesures mises en place deviennent permanentes, c’est pourquoi ils font front commun pour réclamer une autre solution.

D’entrée de jeu, rappelons que depuis septembre 2022, des sens uniques ont été appliqués sur les rues Fradet et Daniel, entre les 110e et 112e avenues de même qu’entre les 111e et 112e avenues. Pour être plus précis, impossible d’aller en direction du boulevard Allard uniquement que par la rue Fradet. Des blocs de béton y ont été installés. Cette option a été retenue parmi cinq propositions émises à la suite d’une demande d’une soixantaine de citoyens irrités par le débit de circulation.

«J’empruntais régulièrement la rue Fradet et je n’ai jamais observé de grandes affluences. Oui, il y a un peu plus d’automobilistes le matin et le soir, mais c’est normal. Ce n’est pas exagéré. Et ce n’est pas une rue où il est facile de rouler à grande vitesse contrairement à ce que certains ont rapporté. Comme partout ailleurs, c’est possible qu’il y ait un délinquant une fois de temps en temps», estime Marie Dugal, rencontrée à son domicile vendredi dernier avec quatre autres citoyens du secteur.

Ces nouvelles entraves constituent un réel casse-tête pour les automobilistes.

«Quand les gens viennent nous rendre visite, ils tournent en rond, même avec le GPS. C’est particulièrement mal fait, les indications ne sont pas claires», indique-t-elle.

Ces citoyens ont dès le départ été en désaccord avec ce projet pilote qui, à leurs yeux, n’a fait que déplacer la circulation sur les rues voisines aggravant la situation et compromettant la sécurité des résidents.

«En mettant ces sens uniques sur une petite portion, on a déplacé le problème sur le boulevard Mercure où il y a deux écoles, des corridors scolaires et aucun trottoir», déplore Mme Dugal.

«Combien de matins j’ai dû avertir des enfants de se tasser plus près du bord du boulevard Mercure? Un brigadier m’a affirmé que c’était infernal le trafic que ça a généré. Aux heures de pointe, les voitures se suivent bumper à bumper du boulevard des chutes jusqu’au centre-ville. Est-ce qu’on doit mettre en péril la sécurité des enfants au nom de quelques résidents de la rue Fradet? Est-ce qu’ils sont plus importants que le reste du secteur? Je trouve ça particulier», se désole Geneviève Gravel, résidente du Boisé-Messier.

Les citoyens s’inquiètent également de l’accès aux services d’urgence.

«S’il arrive une situation d’urgence du mauvais côté de la rue Fradet, comment fait-on pour les faire passer? Ils vont devoir faire le détour? On augmente le temps de réponse», fait valoir Mme Gravel.

Ces résidents du secteur affirment même être témoins plusieurs fois par semaine d’automobilistes faisant fi des sens uniques.

«Je dirais que 50 % des gens passent tout droit. Ça arrive tous les jours. J’ai même vu un camion de la Ville aller à contresens», indique Éric Vigneault.

«À mon avis, c’est beaucoup plus dangereux que ce l’était», ajoute Mme Gravel.

Qui plus est, sortir en voiture de sa cour lors des heures de pointe est devenu mission impossible pour les résidents des boulevards des Chutes et Mercure.

M. Vigneault soulève aussi l’enjeu écologique de ce projet pilote.

«Combien de résidents comme moi demeurent à 10-15 minutes du travail, mais que depuis dix mois, ça leur prend le double du temps à se rendre en raison du trafic et des détours? On repassera pour le côté écologique!»

Ils veulent être entendus

Les citoyens ne digèrent pas encore le fait qu’ils n’aient jamais été consultés avant le déploiement de ce projet pilote.

«Seulement quelques citoyens demeurant dans un quadrilatère bien précis ont été consultés. Pourtant, le Boisé-Messier, c’est le prolongement de la rue Fradet. On a appris l’existence du projet quand les blocs de béton ont été installés», ont-ils laissé tomber.

«Le projet pilote a été mis en place pour favoriser une petite poignée de citoyens au détriment de tous les autres qui paient eux aussi des taxes; le coût de ces travaux. C’est du favoritisme et on se sent pris en otage», juge Mme Dugal.

«Moi j’irais encore plus loin en disant que c’est une atteinte à la démocratie! renchérit Mme Gravel. Là, c’est un problème qui est isolé au secteur ici, mais ça peut se reproduire n’importe où ailleurs en ville. Si on accepte de se faire passer ce projet à travers la gorge, ça peut se faire ailleurs. Il n’y a aucune explication logique pour laquelle ç’a passé de cette façon-là. C’est clair que si tous les gens avaient pu voter, jamais ça n’aurait passé. Du moins, les mesures auraient été différentes.»

Ils dénoncent aussi le manque d’écoute. Selon eux, chaque fois qu’ils ont tenté d’obtenir des réponses ou d’entrer en contact avec les élus, ils ont été invités à écrire leurs commentaires sur la plateforme Forum.

«J’ai écrit à la conseillère Sarah Saint-Cyr Lanoie puis à la mairesse et elles m’ont référé vers Forum puisque, apparemment, on n’est pas concerné par le projet. C’est la seule voie», fait savoir Mélissa Laguë.

Lundi soir, quelques-uns d’entre eux se sont présentés au conseil municipal. Ils ont fait part aux élus de leurs déceptions et craintes en plus de demander la date à laquelle la Ville se positionnera sur la suite des choses.

«On a des enjeux à travers toute la ville au niveau de la circulation, des débits. Les solutions qu’on met de l’avant ne fonctionnent pas toujours, donc on essaie parfois d’en trouver d’autres et un projet pilote sert justement à voir si ça atténuera les désagréments», a expliqué la mairesse Stéphanie Lacoste, en rappelant aux citoyens que «tous sont entendus» et qu’ils sont invités à émettre leurs commentaires via Forum, mais aussi par courriel ou en composant le 311.

De son côté, le directeur général, Francis Adam, a dit que les élus devraient rendre une décision au mois d’août, à savoir si les sens uniques demeureront ou si une alternative sera proposée.

«Nous avons des solutions, on aimerait qu’on nous écoute. On ne lâchera pas le morceau», ont conclu avec détermination les citoyens lors de la rencontre avec L’Express.

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