TRANSPORT. Les transporteurs scolaires craignent des bris de service en raison du projet de règlement qui interdira la vente d’autobus à combustion dès le mois d’août 2021. Ils se disent confrontés à d’importants enjeux.
Interpellée par l’article «Exclus, les deux leaders drummondvillois critiquent le gouvernement», Élizabeth Messier, propriétaire de Transport Marjolaine, a communiqué avec L’Express parce qu’elle tenait à exposer ses craintes et les problèmes auxquels son entreprise pourrait faire face éventuellement.
D’abord, elle anticipe des bris de service. Les cours des concessionnaires se vident de plus en plus, les inventaires n’ont jamais été aussi bas. Il s’agit d’une conséquence directe du projet de règlement.
«Les autobus à combustion se font rares. Quand le gouvernement a fait son annonce, les cours se sont vidées, naturellement. J’ai acheté un minibus cette semaine et il n’en restait que très peu. Mais les gros autobus, on ne peut plus en avoir de nos deux concessionnaires (Girardin et Autobus Thomas). Même qu’on ne trouve plus d’autobus usagés. Ça, ça veut dire que si un de nos autobus a un accident ou passe au feu, je n’en ai plus et je ne suis pas capable de m’approvisionner nulle part, même pas chez Lion, à Saint-Jérôme. De plus, on a entendu dire que les transporteurs qui ont déjà passé leur commande, ils ne savent même pas s’ils pourront s’en servir à cause du règlement», explique-t-elle, mentionnant que d’autres transporteurs drummondvillois se disent affectés par la situation.
Tout comme les dirigeants de Girardin Blue Bird et de Autobus Thomas, elle voit un non-sens et une iniquité dans le nouveau programme gouvernemental d’électrification du transport scolaire. Par ce programme, le gouvernement exige maintenant l’assemblage au Canada des véhicules scolaires électriques pour l’attribution d’une subvention lors de l’achat. Cette exigence vient inévitablement exclure, rappelons-le, les deux concessionnaires drummondvillois.
«Pourquoi j’irais acheter des autobus à Saint-Jérôme alors qu’il y en a deux ici qui sont capables de livrer d’excellents véhicules?» se questionne Mme Messier, se désolant de l’ampleur des pertes financières et d’emplois envisagées.
Elle poursuit en affirmant que le programme de subvention ne «tient pas la route» : «C’est sur trois ans. La première année, le gouvernement propose 150 000 $ pour chaque autobus électrique acheté, ensuite ce sera 125 000 $, puis 100 000 $ la troisième année. Le gouvernement dit qu’après cette période, les prix vont baisser, donc on n’aurait plus besoin de ces subventions. Ça ne tient pas la route, parce que déjà le véhicule est trois fois le prix d’un autobus normal et en plus, le gouvernement ne veut pas de concurrence, alors le prix ne baissera pas. Depuis quand les matériaux et la main-d’œuvre baissent? Ça s’en va toujours en augmentant. C’est un casse-tête de comprendre cette logique. On ne sera pas capable d’honorer nos contrats si rien ne change», laisse-t-elle tomber.
Transport Marjolaine gère 13 autobus desservant environ 500 élèves. Pour le moment, aucun véhicule n’est électrique, mais son plan d’affaires prévoit évidemment ce virage à moyen terme.
«On n’est pas fermé. J’ai 42 ans, j’ai deux jeunes enfants et je veux ça pour eux, c’est un virage inévitable, mais il faut prendre le temps. J’en ai essayé des autobus électriques, c’est merveilleux, mais la fiabilité n’est pas encore à point, c’est la raison pour laquelle on n’a pas encore adhéré. Personnellement, c’est le point qui me fait le plus peur, soit de ne pas être capable de partir le matin ou rester pris avec des enfants. C’est mon stress numéro un», soutient-elle en terminant.