Travail-étude : les employeurs se montrent conciliants

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Par Michael Deetjens
Travail-étude : les employeurs se montrent conciliants
Amélie Durepos du restaurant Chez Louis. (Photo : Ghyslain Bergeron)

MARCHÉ DU TRAVAIL. Les étudiants représentent plus de la moitié du personnel de plusieurs commerces de la région. Face à l’actuelle pénurie de main-d’œuvre, de nombreux employeurs doivent se montrer conciliants s’ils ne veulent pas perdre ces précieux employés.

La scène se déroule en fin de soirée. Des clients affamés se dirigent vers un restaurant du centre-ville. À leur grande surprise, les lumières sont éteintes et la porte est verrouillée. «Fermé par manque de personnel», indique un mémo laissé dans la fenêtre.

Les restaurants Tim Hortons de Drummondville sont familiers avec ce genre de situations. Plusieurs ont dû écourter leurs heures d’ouverture. «On a commencé à sentir les effets de la pénurie il y a un an et demi environ. Si trop d’employés ne se présentent pas, on doit fermer l’intérieur et ouvrir seulement le service à l’auto», précise Maryse Yergeau, adjointe aux ressources humaines chez Tim Hortons. Cette dernière évalue que la moitié de son personnel est aux études. «On s’adapte à leurs disponibilités. On ne leur impose pas un nombre d’heures précis», ajoute-t-elle.

Selon Amélie Durepos, directrice des opérations au restaurant Chez Louis situé sur le boulevard Lemire, près de 60% du personnel est aux études. Il est donc essentiel de lui offrir des horaires flexibles. «On n’a pas le choix si on veut garder les jeunes», lance-t-elle, consciente de l’importance qu’ils représentent pour sa succursale.

L’année dernière, le restaurant Chez Louis situé au centre-ville a fermé plus tôt que prévu à plusieurs reprises. «Des employés ne se présentaient tout simplement pas! Les autres employés mettaient la clef dans les portes sans avertir», explique Marie-Pier Durepos, directrice des opérations. Elle affirme que depuis son arrivée en poste en juillet, ce type de situations ne se sont pas reproduites. «En offrant une belle flexibilité et des opportunités pour intégrer le travail, la famille et les études, les employés sont plus portés à rester», explique Mme Durepos.

Amélie Durepos précise qu’ils sont à l’affût des exigences des normes du travail. Pour les employés au secondaire, ils ne dépassent pas des horaires de 10h à 12h par semaine. Pour les étudiants du cégep, ils tâchent de ne pas dépasser les 15h par semaine. «Il arrive qu’un jeune demande à faire plus d’heures pour payer son loyer ou sa voiture. Dans ces cas-là, on peut accepter de leur en donner plus», ajoute la directrice de la succursale du boulevard Lemire.

Selon Richard Gagné, directeur général des restaurants McDonald’s de Drummondville, environ 60% de leurs employés sont des étudiants. La célèbre bannière en restauration rapide n’échappe pas à la pénurie. La succursale située à Saint-Charles ferme maintenant la nuit. M. Gagné est d’avis qu’il est important d’offrir des horaires flexibles et de mettre en place de meilleures conditions afin d’attirer et de retenir les employés.

«J’y vais un jour à la fois!»

Costa Papacostas est propriétaire de la Rôtisserie Scores depuis 20 ans.  Les étudiants composent entre 30 et 40% de ses employés.

Depuis environ deux ans, la gestion du personnel est devenue un véritable cauchemar. «Si je remonte 10 ans en arrière, la situation était vraiment différente. C’était rare que les employés ne se présentaient pas ou callaient malades», affirme M. Papacostas.

Le propriétaire ne mâche pas ses mots au sujet des employés aux études. «Les étudiants sont rendus lâches. Pourquoi courir toute la journée dans un restaurant quand qu’ils peuvent rester assis à un petit kiosque du centre d’achat?», compare-t-il.

«Un jeune employé ne s’est pas présenté à deux reprises. Il arrive finalement un samedi matin. Je lui souligne qu’il est enfin venu travailler. Il me répond que ça lui tentait cette fois-ci!», raconte M. Papacostas, offusqué.

«Je fais des annonces sur les sites d’emplois. Plusieurs manifestent un intérêt, je leur dis de venir sur place et ils ne se présentent même pas», raconte le propriétaire. Il ne semble pas voir la lumière au bout du tunnel. «J’y vais au jour le jour», lance-t-il, découragé.

Face à la pénurie, Tim Hortons a choisi de se tourner vers l‘immigration. Maryse Yergeau indique toutefois que les démarches sont longues. «Nous en avons encore pour au moins un an à fonctionner à effectif réduit», précise-t-elle.

Cette avenue aurait pu intéresser M. Papacostas si les délais et les coûts n’étaient pas si contraignants. «Une compagnie qui propose de faire venir de la main-d’œuvre de l’étranger est venue me voir. Ils m’ont dit que ça peut prendre entre 6 à 8 mois avant que l’employé arrive ici. De plus, je dois payer au total l’équivalent de 10 000$ à 12 000$ par employé». Pour le propriétaire, cette solution est tout simplement impossible.

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