Le Tribunal rappelle à l’ordre Cascades Inopak

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Par Lise Tremblay
Le Tribunal rappelle à l’ordre Cascades Inopak
L’entreprise Cascades Inopak est située sur la rue Lauzon à Drummondville. (Photo : Ghyslain Bergeron)

SYNDICAT. L’entreprise Cascades Inopak de Drummondville devra cesser toute ingérence dans la campagne de syndicalisation de ses employés, a tranché le juge Dominic Fiset du Tribunal administratif du travail, le 19 juillet dernier.

Selon le jugement, l’entreprise spécialisée dans la fabrication de produits d’emballage de plastique recyclé a contrevenu à l’article 12 du Code du travail et à l’article 3 de la Charte des droits et libertés de la personne en «entravant la campagne de syndicalisation entreprise par le Syndicat des travailleuses et travailleurs de Cascades Inopak – CSN».

Trois événements distincts ont mené le syndicat à se tourner vers le système de justice.

Le 3 mai dernier, l’employeur a transmis par courrier recommandé une lettre de trois pages au domicile des 130 salariés intitulée «Gestion en partenariat avec les employés». Bien que Cascades affirme que chacun était libre de prendre ou non connaissance de la lettre, une telle prétention est déraisonnable, juge le Tribunal, puisque «c’est l’évidence qu’un salarié qui reçoit une correspondance par courrier recommandé à son domicile doit en prendre connaissance».

À la fin de la lettre, l’employeur a invité les salariés à consulter le site InfoTravail, dont la neutralité a été mise en doute, étant administré par diverses associations patronales.

«La lettre a causé un stress chez nombre de salariés. Chacun a peur que l’employeur puisse éventuellement être informé qu’il a signé une formule d’adhésion au syndicat et de perdre son emploi», précise-t-on dans le jugement.

Autre événement : un superviseur a fait une intervention dans le stationnement de l’entreprise le 8 mai dernier où des employés s’étaient regroupés pour signer des formules d’adhésion. Téléphone cellulaire en main, il a pris un document d’adhésion en photo, en se positionnant par-dessus l’épaule d’un salarié.

Puis, le 17 mai dernier, une deuxième lettre a été envoyée au domicile des employés, cette fois, par le courrier régulier. Dans la missive, entre autres, l’employeur leur a suggéré à nouveau de consulter le site InfoTravail.

À la lumière des faits, le Tribunal administratif du travail a tranché et a ordonné à l’entreprise de cesser d’entraver la campagne de syndicalisation en cours. Cascades devra ainsi verser la somme de 2500 $ à la CSN à titre de dommages punitifs puis transmettre la décision à tous les salariés par la poste.

Une décision qui vient «calmer le jeu»

Pour Serge Olivier, conseiller syndical à la CSN, cette décision viendra assurément «calmer le jeu» au sein de l’usine située de la rue Lauzon.

«La syndicalisation, même s’il y a des lois, ça doit encore se faire en cachette, car plusieurs employeurs s’ingèrent, intimident, menacent de fermeture et font peur au monde pour empêcher cela dans leur entreprise.  Ça fait 25 ans que je travaille dans l’organisation des syndicats et je n’ai pas vu ça souvent une telle décision. Je suis enchanté. Ça prouve qu’il y a encore une certaine justice qui existe et qui défend les travailleurs. Le Tribunal a reconnu le droit à l’association. L’employeur s’est ingéré dans le processus. Imaginez maintenant les gens qui devaient aller témoigner. C’était difficile pour eux. Au moins, ils auront la protection du Tribunal», a-t-il réagi.

Invité à commenter le jugement, Hugo D’Amours, vice-président des communications et des affaires publiques chez Cascades, a répondu par courriel.

«Cascades complète actuellement l’analyse des moyens légaux à sa disposition pour répondre à ce jugement, incluant notamment la possibilité de le porter en révision judiciaire. Nous allons donc réserver nos commentaires pour l’instant», a-t-il fait savoir.

Soulignons que la requête en accréditation salariale a été déposée au Tribunal le 8 mai dernier. Elle sera entendue par la Cour le 14 septembre prochain.

La volonté d’améliorer les conditions de travail, à commencer par le salaire, constitue le principal motif de la démarche entreprise par des employés.

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