L’audace de Qiong He

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Par Emmanuelle LeBlond
L’audace de Qiong He
Qiong He habite depuis dix ans à Drummondville. (Photo : Ghyslain Bergeron)

DOSSIER. Qiong He est une femme qui n’a pas peur de relever des défis. Celle qui est née en Chine a fait le choix de vivre à Drummondville, il y a neuf ans. Depuis, elle carbure aux projets dans le but de faire une différence dans sa communauté, en fondant entre autres un organisme qui offre des services pour faciliter les échanges entre la Chine et le Québec.

Qiong He a toujours été habitée par une soif d’aventure, et ce, depuis son jeune âge. À l’âge de 18 ans, elle a quitté sa région natale du Xinjiang pour étudier dans une université à Pékin en administration. Étant une sportive aguerrie, l’étudiante a été admise grâce à ses talents à la course à pied.

Lorsque l’opportunité d’étudier en France s’est présentée, Qiong He a décidé de foncer. «À l’époque, on était obligé de passer un examen de français si on voulait étudier en France. Quand j’ai fait ma demande, c’était pendant la période du SRAS, un virus comme la COVID, mais moins fort. Au lieu de faire des examens dans une salle, on avait fait l’examen sur un ordinateur. Avec le contexte, on n’avait pas pu terminer les cours. Malgré tout, j’ai été acceptée. Lorsque je suis arrivée en France, je connaissais à peine trois mots en français», se remémore-t-elle, en rigolant.

L’étudiante a débuté son parcours à Toulouse dans une faculté d’économie, pour finalement se diriger vers l’Université de Strasbourg, en management du sport.

Quelques années après son arrivée en Europe, Qiong He a eu un déclic. Alors que ses amis lui parlent du Canada, une étincelle s’allume en elle. La culture québécoise l’interpelle. «J’avais besoin d’un gros changement pour pouvoir me retrouver. C’est le même principe quand j’ai quitté Pékin et la France», exprime celle qui s’est envolée pour Montréal.

Qiong He a organisé des ateliers d’origami pour le projet Tout+inclus. (Photo: Ghyslain Bergeron)

Trois mois plus tard, son mari est venu la rejoindre et ils ont pris la direction de Drummondville. «On ne voulait pas rester à Montréal. On voulait aller plus loin. Dans les mois précédents, j’avais assisté à toutes les séances d’information pour me renseigner sur les opportunités en région. Mon mari a postulé un peu partout et il a été appelé par une entreprise à Drummondville. L’endroit ne correspondait pas à sa scolarité, mais il a accepté parce qu’on avait presque plus d’argent. Il a été appelé un vendredi et il entrait en poste le lundi suivant», se remémore-t-elle.

Intégrer la communauté

Dès son arrivée, Qiong He s’est tournée vers l’action bénévole pour se constituer un réseau dans la région. De fil en aiguille, des offres d’emplois se sont présentées à elle. «Pendant trois ans, j’ai travaillé sur différents projets en lien avec l’immigration. Ce n’était pas vraiment mon domaine. J’ai étudié en sport et en administration. J’ai aussi un diplôme en langue», exprime-t-elle. Après son congé de maternité, Qiong He a fait le choix de s’orienter dans ce qui la passionnait : la récréologie, selon l’équivalence québécoise.

En résidant à Drummondville, Qiong He a tissé un lien amitié auprès de sa communauté d’origine. «J’ai commencé à connaître la communauté chinoise à Drummondville, même si elle n’est pas très grande. Souvent, des amis me posaient des questions. Puisque je connaissais bien le réseau québécois, j’étais capable de répondre. J’étais une intermédiaire. Mes amis québécois pensaient aussi à moi quand ils avaient des interrogations», soutient-elle.

La femme de tête a eu l’idée de créer un organisme pour contribuer à la visibilité de sa communauté d’origine. L’organisme Pivot-Sino Québec a été fondé en 2018 et un premier projet a été financé en 2020. «La mission est d’offrir des services pivots en favorisant les échanges entre la Chine et les régions, par le biais de l’économie, la culture et l’éducation. En ce moment, nos activités se déroulent dans la région du Centre-du-Québec.»

Un tableau réalisé dans le cadre des ateliers, dirigé par l’artiste YaMeng Liu.(Photo: Ghyslain Bergeron)

Du même coup, Qiong He souhaite faire découvrir la culture chinoise auprès des Québécois, tout en encourageant l’ouverture et l’acceptation des différences pour contribuer à la diversité culturelle en région.

Tout+inclus

Avec le soutien de la Ville de Drummondville dans le cadre de l’Entente de développement culturel avec le ministère de la Culture et des Communications, Qiong He a mis sur pied un projet de médiation culturelle du nom de Tout+inclus. L’année dernière, près de 374 Drummondvillois de tout âge ont participé à des ateliers artistiques pour contribuer à la création de deux œuvres d’art collectives.

Les ateliers avaient pour thème l’origami, la calligraphie chinoise et le langage du dessin. «L’objectif du projet est de favoriser l’appartenance collective par le biais de l’art et la culture. Les ateliers étaient basés sur la culture asiatique. Par exemple, l’activité langage du dessin était sur les caractères chinois. L’origine de la langue chinoise est le dessin. Cette activité visait les jeunes de cinq à douze ans. On a réalisé beaucoup d’activités dans les camps d’été», explique-t-elle.

À cause de la pandémie, la présentation des œuvres en exposition a été suspendue. Qiong He garde espoir pour le futur.

Voir plus grand

La fondatrice de l’organisme compte bien mettre de l’avant d’autres initiatives pour soutenir le développement de la communauté chinoise. Qiong He rêve grand alors qu’elle veut pallier le manque de main d’œuvre en s’associant avec Centre de formation professionnelle Paul-Rousseau et les étudiants issus de la communauté chinoise. Elle souhaite aussi mettre en branle une initiative de logement communautaire avec un volet intergénérationnel.

En somme, Qiong He est un vent de fraîcheur pour son milieu. Tous ses efforts sont projetés vers un but précis : l’épanouissement des générations futures. «Ce sont nous et nos enfants qui allons construire notre société. Si on regarde toujours en arrière, ce sont tous nos enfants qui vont en subir les conséquences. Il faut regarder vers l’avant. En ayant une grande ouverture d’esprit, nos enfants vont avoir un meilleur futur pour bâtir une meilleure société», termine-t-elle.

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