Les températures extrêmes affectent les agriculteurs

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Par Emmanuelle LeBlond
Les températures extrêmes affectent les agriculteurs
Sébastien Flibotte, propriétaire des Cultures cyrilloises, a connu quelques mésaventures avec son maïs sucré.. (Photo : Ghyslain Bergeron)

AGRICULTURE. Cette année, les agriculteurs vivent une saison estivale hors de l’ordinaire. D’un côté, les rendements ne sont pas au rendez-vous à cause des conditions météorologiques, et de l’autre, un fort engouement pour l’achat local s’est développé auprès des consommateurs, ce qui occasionne un stress palpable aux cultivateurs.

«On n’a jamais vu ça, s’exclame la propriétaire de la Ferme David Gauthier, Lyssa Gauthier. Que ce soit dans les légumes ou dans les champs, la production est vraiment lente. La sécheresse nous affecte. On a plusieurs cultures qui ont dû être ressemées plusieurs fois pour réussir à voir la lumière au bout du tunnel.»

Lyssa et David Gauthier, propriétaires de la Ferme David Gauthier,   dans l’entrepôt de foin. (Photo: Ghyslain Bergeron)

Les agriculteurs doivent redoubler d’efforts pour arriver au même résultat. «On se rajoute de la charge. On recommence. J’avoue qu’il y a des petits moments d’exaspération. On passe plusieurs heures à mettre amour et passion dans ce qu’on sème et on se rend compte que ça a brûlé au soleil, quelques semaines plus tard», confie-t-elle. Elle est toutefois consciente que les aléas de Dame nature sont hors de son contrôle.

La production de foin s’avère tout un défi. «Cette année, on est au tiers de ce qu’on produisait normalement, précise-t-elle. Aussi, il faut se réajuster concernant le temps de séchage. Normalement, on va laisser trois jours au foin à sécher après la coupe. Il faut être prudent parce que ça sèche tellement vite que ça devient en poussière.»

Une partie du foin récolté montre les zones affectées par le temps chaud. (Photo: Ghyslain Bergeron)

L’imagination et la finesse sont de mises afin de contrer les problématiques. «Pour tout ce qui est du côté maraîcher, on a vraiment paillé nos sols. On a fait des cueilleurs d’eau, c’est-à-dire des bassins pour récupérer le peu de pluie qu’on a pour l’envoyer dans le jardin. Pour les animaux, on a fait des parcs avec des ombrelles pour essayer de leur donner le plus d’ombre possible», soutient la propriétaire, qui détient des vaches et des cochons.

Les conditions de travail sont difficiles en temps de canicule, soutient Lyssa Gauthier. «En étant de petits cultivateurs, on n’a pas la joie d’avoir de gros tracteurs climatisés. Je vous avouerais que passer la journée à faire les foins à 40 degrés Celsius, c’est quelque chose autant pour nous que pour les gens qui viennent nous donner un coup de main. Il faut se méfier des coups de chaleur. C’est très dur.»

Une tonne d’obstacles

Sébastien Flibotte, propriétaire des Cultures Cyrilloises, est du même avis. Depuis le début de la saison, plusieurs obstacles se sont dressés sur sa route. «On a eu un printemps qui n’a pas été facile. On est entré tôt aux champs pour faire les semis de culture en avril. Ça a été froid longtemps, donc les cultures n’ont pas tout bien levé. Après ça, on a eu deux sécheresses et un gel en début juin, ce qui a tué certains plants. C’est une saison pas facile à date», explique-t-il.

La sécheresse a été fatale pour certains plants. «Dans les champs de maïs sucré, il y a une partie qui est très affectée, peut-être un 20% sur le premier semis. On n’aura probablement pas de récolte. Je n’ai pas de système d’irrigation pour irriguer le maïs sucré. C’est trop grand. C’est la première année que ça nous arrive de manquer d’eau, en 15 ans.»

À gauche, les plants de maïs sucré sont desséchés par le manque d’eau. À droite, les plants sont en pleine santé. Ils font partie du même champ, de la même variété et de la même date de semis. (Photo: gracieuseté)

Sébastien Flibotte ne se laisse pas décourager pour autant. «On sème du maïs tous les dix jours. Les autres semis sont très gros. Si on a des précipitations dans les prochaines semaines, on devrait avoir de très belles récoltes.»

Malgré les pertes, les cultivateurs préfèrent concentrer leurs énergies sur les petites victoires, indique Lyssa Gauthier. «Mes brocolis et mes choux commencent à prendre vie. J’ai récupéré ma première salade. On commence à voir des produits qui font surface. C’est encourageant», témoigne-t-elle.

L’engouement des produits locaux

À la Ferme Mario Lecavalier, le téléphone ne dérougit pas depuis le 6 juin. Les clients frétillent d’impatience à l’idée d’aller cueillir des fraises dans les champs. «J’ai environ de 100 à 150 appels par jour», témoigne le propriétaire Mario Lecavalier, croulant sous la demande.

Ce dernier fait preuve de bonne volonté, mais il doit se rendre à l’évidence, la saison des fraises est retardée. «Ça fait deux ans qu’on commence le 4 juillet. Le téléphone sonne et on n’a pas de fraises. On perd de l’argent», avoue-t-il.

Les variétés de fraises hâtives ont un rendement très faible. «Sur une grappe de 10 fraises, il reste deux fraises», amène Mario Lecavalier, qui avoue être épuisé par les mésaventures du métier.

Le propriétaire appréhende l’autocueillette. «Ce n’est pas agréable. C’est stressant. La météo n’est pas de notre côté et il y a la COVID, c’est un problème de plus à gérer», souligne celui qui fait référence aux mesures sanitaires à respecter dans les champs.

«Ça va être ma dernière année. J’ai la ferme depuis 1992, mais mon père l’a depuis 1975. La relève pour les fraises n’est pas vraiment là», conclut-il.

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