«C’est une shop à vieux !»

«C’est une shop à vieux !»
Une quarantaine de personnes se sont réunies devant le CHSLD Frederick-George-Heriot

SANTÉ. La situation est critique au Centre d’hébergement et de soins longue durée (CHSLD) Frederick-George-Heriot, qui fait face à une pénurie de préposés aux bénéficiaires depuis plusieurs mois, si bien qu’une quarantaine d’entre eux se sont réunis devant l’établissement pour exprimer leur ras-le-bol.

Le président de la Fédération de santé et des services sociaux de la Confédération des syndicats nationaux (FSSS-CSN) de Drummondville, Réal Lauzière, déplore que les solutions apportées par le syndicat aient été rejetées par le CIUSSS-MCQ.

«Ce qui nous a été proposé ne règle pas la problématique, a-t-il exprimé. On les invite [CIUSSS-MCQ] simplement à actualiser les mesures qui sont déjà en place. Nous sommes disponibles pour discuter jour, soir et nuit s’il le faut, mais c’est assez.»

La solution-miracle, pour le président ? La création d’une vingtaine de  postes à temps plein. «Environ 70 % des préposés travaillent à temps partiel. Prenons ces postes, créons-en à temps plein et comblons ce qui manque avec la liste de rappel. Cela ne coûterait pratiquement rien, et réglerait la grande majorité du problème.»

Le syndicat dénonce aussi une mesure de l’employeur, valide dès le mois de mai, qui vise à fusionner des structures de soin. «En plus de la pénurie de personnel et de la charge de travail qui s’alourdit, cela reviendrait à demander une plus grande mobilité aux préposés. Cela viendrait amplifier le problème plutôt que le régler», croit-il. Dix postes seraient tout de même créés par cette mesure.

Les tâches changent et s’alourdissent

Hélène Trépanier est préposée aux bénéficiaires depuis 25 ans, et elle en a vu de toutes les couleurs. Cependant, la réalité du CHSLD Frederick-George-Heriot aujourd’hui est très différente de celle de ses débuts. «Les patients qui entrent en CHSLD aujourd’hui, ce n’est plus comme avant. Ce sont des cas qui ne sont plus capables d’être seuls, qui sont en perte d’autonomie, qui ont des problèmes cognitifs… La tâche s’alourdit, mais nous n’avons pas les ressources pour y répondre», expose-t-elle d’un ton navré.

Et il y a un manque criant de relève au sein de l’établissement. «Le personnel est vieillissant et près de la retraite, mais la tâche est lourde pour un jeune qui arrive sur le marché du travail. La vie de famille, tu l’oublies quand tu viens travailler ici», regrette la vétérane du métier sous l’œil approbateur de sa cadette, sa collègue Anne-Marie Théroux.

Si cette dernière ne compte que trois ans d’expérience comme préposée, elle n’a pas assez de ses dix doigts pour dénombrer les fois où elle a fait du temps supplémentaire. «On est appelés pendant nos fins de semaine de congé, et des matins que je suis appelée quatre fois à 6h alors que j’ai travaillé de soir la veille,  ça arrive.»

Ils n’ont pas le choix de prioriser des soins, et les deux préposés trouvent cela navrant. «J’adore ma job, c’est le plus beau métier du monde mais je travaille à l’encontre de mes valeurs. Je n’ai pas le choix !», s’exclame Anne-Marie Théroux.

Jean-Guy Moreau passe à tous les jours voir son père de 95 ans, hébergé au centre Frederick-George-Heriot. Il est triste de voir à quel point les professionnels de la santé doivent courir d’un bord et de l’autre, sans arrêt. «Hier, j’amenais mon père chez le dentiste,  et il avait plein de saletés et de rougeurs dans la bouche. Ils n’ont pas le temps de l’aider à se brosser les dents le matin. Je viens tous les jours, et il manque toujours quelque chose. Je ne leur reproche rien, j’adore les gens qui prennent soin de mon père, mais c’est incroyable ce que ça prend.»

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