Clairement, des représentantes du Conseil central Cœur du Québec (CSN) ont signifié leur colère envers la compagnie Bombardier Produits récréatifs, ce midi. C’est qu’elle aurait exercé de la pression sur son sous-traitant, Créations Morin, pour qu’il transfère sa production de housses, de toiles et de sacs en tissu en Chine. Résultat : 45 des 85 employés, surtout des femmes, se retrouveront au chômage vendredi, car 50 % des commandes de l’usine seront prochainement préparées en Asie.
«Encore une fois, c’est un dur coup pour le secteur manufacturier québécois. Et ce sont des femmes qui sont les premières victimes de cette décision prise non pas par une compagnie étrangère, mais bien par une entreprise-phare du Québec qu’est Bombardier. Selon moi, il y a des questions à poser : comment une entreprise d’ici peut-elle exercer de la pression sur un sous-traitant pour qu’elle transfère de la production en Chine?», a indiqué Ann Potvin, secrétaire générale de la Fédération du commerce de la CSN.
Selon cette dernière, les salaires de Créations Morin, déjà relativement bas, ne sont pas la cause de cette triste nouvelle. «Le salaire moyen ici est de 10,50 $ de l’heure, ce qui est à la limite du seuil de la pauvreté selon plusieurs économistes, a ajouté Mme Potvin. Les travailleuses ici sont quand même spécialisées. Elles ont développé une expertise avec les années, car elles étaient les seules à fabriquer ce genre de produits au Québec. C’est difficile à croire que Bombardier et Créations Morin transfèrent des contrats dans un pays où les femmes sont en grande majorité exploitées, où les conditions des travailleuses sont bafouées».
En plus de demander à Créations Morin de ne pas céder à la pression de Bombardier Produits récréatifs, la CSN interpelle aussi aux élus, et particulièrement à la mairesse de Drummondville, d’user de leur influence pour permettre à ces femmes de conserver leur emploi. «Nous demandons à Francine Ruest Jutras, qui vient d’ailleurs de recevoir le titre de "femme d’influence" pour avoir contribuer à l’avancement des femmes de sa région, d’aider toutes celles qui perdront leur emploi vendredi», a exprimé Renée Levasseur, 2e vice-présidente du Conseil central Cœur du Québec.
Qui plus est, la plupart des dames qui se retrouveront au chômage vendredi sont âgées entre 40 et 55 ans. Elles comptaient toutes cinq ans et moins d’ancienneté. «Parmi elles, il y a beaucoup de femmes seules et de monoparentales. Elles devront toutes repartir à neuf et ce ne sera pas facile pour elles. Chose certaine, elles acceptent mal la décision de la compagnie. La plupart ont toujours travaillé dans le secteur du textile», a partagé Linda Pruneau, vice-présidente du Syndicat des employés, qui a parallèlement annoncé qu’un comité d’aide au reclassement sera mis sur pied pour les aider.
L’Express a rencontré ce midi quelques employées de l’entreprise et, évidemment, toutes ont communiqué leurs inquiétudes. «Ce n’est pas grave, car lundi, je déménage en Chine. Toutes nos "jobs" s’en vont là-bas, aussi bien y aller nous autres aussi! Du riz, je peux en manger en masse», a exprimé ironiquement Sylvie Courtois, qui aussi fait allusion à la récente annonce d’OSRAM Sylvania qui coupera 40 postes en raison d’un transfert de production en Asie.
Pascale Quirion, une employée «épargnée», a également partagé son état d’âme. «Je suis très inquiète pour l’avenir, a-t-elle partagé. Les filles qui perdront leur emploi savent ce qui les attend tandis que moi, qui reste, je ne sais pas combien de temps l’entreprise va me garder. Ce n’est pas facile pour celles qui ont des enfants».
Enfin, précisons que l’entreprise Créations Morin est située dans un bâtiment situé dans l’ex-Celanese, à Drummondville. Elle a été fondée en 1984 et développé une expertise dans la confection de housses et de sacs de motoneige, moto et VTT. En plus de Bombardier, ses clients sont Honda et Yamaha