Sintra blâmée pour le décès de l’arpenteur Francis Précourt

Sintra blâmée pour le décès de l’arpenteur Francis Précourt
Mario Gosselin

ACCIDENT DE TRAVAIL. Un manque de communication et une organisation déficiente sont deux causes identifiées par la CSST dans les circonstances entourant le décès de l’arpenteur Francis Précourt sur le chantier opéré par Sintra, le 23 juillet 2015, sur la route 255, à Drummondville.

C’est ce que révèle le rapport d’enquête que la CSST a rendu public aujourd’hui au cours d’une rare conférence de presse, dans une salle de l’hôtel Le Dauphin, où ses inspecteurs ont expliqué en détail les différents facteurs ayant mené à la tragédie survenue à 8 heures le matin.

Selon le rapport, lorsque débutent les travaux d’excavation d’une nouvelle phase sur la chaussée du chantier de réfection, l’arpenteur se présente afin d’y effectuer des relevés de niveaux finaux de la zone excavée. Au moment où il s’apprête à effectuer un relevé au centre de la voie de gauche, le bouteur (bulldozer), situé à environ 20 mètres en amont, effectue une manœuvre de recul. L’opérateur ne regarde pas à l’arrière durant cette manœuvre, mais bien de chaque côté de la lame à l’avant du véhicule. L’arpenteur, se trouvant dans la trajectoire de recul du bouteur, se fait heurter par celui-ci. Il perd alors l’équilibre, glisse sous la chenille droite du bouteur et se fait écraser. Il est transporté à l’hôpital et succombe à ses blessures.

Après avoir effectué une analyse de la scène, les inspecteurs Denis Marchand et Steve Laperle ont constaté qu’il y a eu un manque de communication entre le conducteur du bouteur et l’arpenteur d’une part, et que l’organisation du travail sur le chantier a été déficiente, d’autre part.

La CSST considère que l’entrepreneur et maître d’œuvre du chantier, Sintra, a agi de façon à compromettre la sécurité des travailleurs. En conséquence, un constat d’infraction lui a été délivré. Pour ce type d’infraction, l’amende peut varier de 16 124 $ à 64 495 $ pour une première offense, et de 32 248 $ à 161 240 $ en cas de récidive.

Fait à noter, c’était la première fois au Centre-du-Québec, selon Denis Marchand, que le MTQ (ministère des Transports du Québec) faisait appel à une entreprise privée (la Firme Martin Paradis, employeur de Francis Précourt) pour assurer la fonction d’arpenteur. Auparavant, c’est le MTQ qui assignait un de ses arpenteurs.

«Notre travail n’est pas de trouver un responsable mais d’identifier des causes pour que la situation ne se reproduise plus», a affirmé Denis Marchand. Curieusement, le retour des inspecteurs sur le même chantier le 5 septembre a permis de constater que persistait la même situation à risque.

Si la CSST a organisé une conférence de presse au lieu de l’envoi comme d’habitude d’un communiqué de presse, c’est que, selon Amélia Larin, du Service des Communications, l’organisme voulait obtenir la collaboration de plusieurs médias pour sensibiliser à la fois la population et les entreprises liées à ce type de travaux. D’ailleurs, le rapport sera transmis à l’Association de la construction du Québec, l’Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, l’Association québécoise des entrepreneurs en infrastructure, l’Association patronale des entreprises en construction du Québec, l’Association des entrepreneurs en construction du Québec ainsi que l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec.

Par ailleurs, un homme d’affaires de Drummondville, Carl Binette (Aéroénergie), présent à la conférence de presse, a confié à L’Express que l’installation d’une caméra de recul devrait être obligatoire sur toute machinerie lourde. «J’en fais une cause personnelle. La plus vieille des quatre enfants de Francis est ma filleule et je vais faire tout ce que je peux pour que le gouvernement du Québec adopte une règlementation rendant obligatoire la présence d’une caméra de recul sur tous ces véhicules. Ça ferait augmenter d’à peine 300 $ le coût d’une machine qui en vaut 40 000 $, ça ne fait pas une grosse différence de prix pour une bien meilleure sécurité», a-t-il fait observer.

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