Surplus retirés, projets coupés

DRUMMOND. Les surplus récupérés dans les coffres des CPE par le gouvernement atteignent près du million de dollars dans la MRC et auront un impact considérable sur l’état de certaines installations.

Au CPE Grand-mère Douceur de Drummondville, les surplus récupérés par le gouvernement ont de graves conséquences, explique la directrice générale, Louise Cardinal. «En venant piger dans nos coffres, le gouvernement a compromis le projet de mise à niveau d’une de nos installations, âgée de plus de 25 ans. Les locaux sont vétustes. Nous avions planifié nos finances pour en améliorer la qualité et la sécurité. En faisant une ponction de 155 000 $ dans nos coffres, le gouvernement prive les enfants d’un milieu de vie adapté à leur développement. C’est désolant», indique-t-elle.

Dans l’installation de la rue Dunkin, l’ergonomie des petits de la pouponnière doit être améliorée et le revêtement du plancher doit être changé, entre autres. Le projet était estimé à 162 000 $. L’argent qui a été laissé dans les coffres sera tout juste suffisant pour assurer le fonds de roulement nécessaire au bon fonctionnement de l’organisme.

La directrice générale du CPE À Tire d’aile, Viviane Coulombe, fait savoir que les 222 000 $ récupérés par le Ministère mettent en péril la rénovation de l’installation de la rue des Pins, qui est âgée. «On voulait investir dans le bâtiment et la rénovation de plusieurs pièces du CPE. Donc c’est certain qu’on n’est pas content.» Une nouvelle cour extérieure pour le bâtiment de la rue Gauthier était aussi prévue.

Au CPE La Maison de Bécassine, les 167 310 $ récupérés par le gouvernement étaient voués à l’agrandissement en cours de la petite installation, au rafraîchissement du bâtiment le plus âgé ainsi qu’à l’aménagement d’une cour extérieure pour ces deux centres situés à l’entrée de la Volière. La directrice, Annie Quesnel, explique qu’un réaménagement des locaux était aussi prévu. «Qu’est-ce qui va me rester comme mise de fonds à mettre dans le projet? Est-ce que je vais avoir les sous? On ne le sait plus. On a aucune idée», laisse tomber Mme Quesnel.

Au CPE Les Petits lutins, le gouvernement a récupéré 180 000 $, incluant des surplus accumulés par le bureau coordonnateur des services de garde en milieu familial. «On est le plus vieux CPE de Drummondville. Donc au niveau des infrastructures, il y a des réparations à faire; la toiture, l’aménagement des cours extérieures… Donc ça retarde ces projets-là», fait savoir la directrice, Odette Montcalm, qui explique que le personnel avait accepté de perdre certains avantages sociaux pour que de l’argent puisse être mis de côté pour éventuellement offrir un meilleur milieu pour les enfants.

«On ne va pas dépenser pour dépenser, ce n’est pas dans notre politique. Sauf que, peut-être qu’on ne va plus demander au personnel, par exemple, d’accepter que tout le monde perde une journée de maladie rémunérée pour avoir un petit surplus», dit-elle au sujet de sa nouvelle façon de voir les choses.

La direction du CPE Fardoche souhaitait aménager la cour extérieure des petits de l’installation de la rue du Moulin, qui a été construite il y a deux ans. Avec le retrait des 40 700 $ de leurs coffres, le projet est sur la glace.

Au CPE Plumeau Soleil, une partie des fonds accumulés devait servir à améliorer le stationnement et financer une partie des huit places supplémentaires.

Le CPE Le Papillon enchanté avait prévu injecter 175 000 $ dans son projet de développement de nouvelles places. De ce montant, le gouvernement a récupéré 121 000 $. La présidente du CPE, Marie-Line Beaulieu, explique que si le gouvernement payait 100 % des nouvelles constructions et des agrandissements, les CPE qui avaient accumulé des fonds pour ces projets avaient plus de chances de voir leur projet être accepté.

La directrice générale du CPE P’tites abeilles, Manon Couture, explique que le gouvernement n’a pas récupéré de surplus puisque le CPE n’en n’avait pas, mais que des coupures de l’ordre de 20 000 $ seront effectuées pour l’année en cours. Mme Couture mentionne que le poste aboli à la direction depuis son arrivée à la barre du CPE ainsi que d’autres gestes posés pour économiser font en sorte que la situation n’est pas dramatique.

Le CPE Mini campus n’avait pas, non plus, de surplus accumulés. Les réductions des subventions qui se succèdent amènent toutefois bien des défis à la directrice, Nathalie Lefebvre. Selon elle, le CPE ne peut plus couper nulle part et les fonds de tiroir sont épuisés. «On a coupé partout où on pouvait couper.» Même son de cloche du côté du CPE Sur une patte.

Plusieurs des directrices des CPE ont pesé leurs mots lors de l’appel de L’Express. L’une d’entre elles, qui n’a pas voulu être identifiée, a voulu dire tout haut ce que la majorité penserait tout bas. «Cette manière de fonctionner-là n’encourage pas la saine gestion (…) Ça donne comme message de s’organiser pour qu’à la fin de l’année, il ne reste pas d’argent. Parce qu’au bout du compte, on préfère réinvestir dans notre bâtiment et nos employés que de retourner de l’argent à la fin de l’année.» L’intervenante nuance toutefois ses propos en ajoutant que cela ne signifie pas que l’argent sera mal utilisé puisque les besoins sont grands. Toutes les directrices des CPE qui avaient des surplus ont mentionné les avoir accumulés grâce à de saines pratiques de gestion.

Dépenses réduites au minimum

Plusieurs des directrices interviewées dénoncent les diminutions des subventions, qui leur sont imposées alors que la masse salariale, qui représente la plus grande dépense, continue d’augmenter. Certaines ont également mentionné que le montant laissé dans leurs coffres représentait à peine un mois de fonds de roulement.

Aussi comptable professionnelle agréée, Marie-Line Beaulieu indique qu’il peut être difficile de gérer un organisme comme un CPE avec l’équivalent d’un mois de fonds de roulement. Elle explique que les revenus des CPE proviennent en grande partie du gouvernement et qu’il arrive souvent que les subventions soient versées dans des délais qui dépassent un mois. Les salaires, eux, doivent être payés chaque semaine. «On n’a plus de marge de manœuvre», confirme la directrice de la Maison de Bécassine.

La directrice du CPE Fardoche, Irène Benoit, souligne que le montant maximal qu’elle peut conserver dans son fonds de roulement met le CPE dans une situation délicate. «Je ne peux plus faire de projet. Le 180 000 $ (somme maximale permise), j’en ai besoin pour mes payes et pour acheter mon matériel seulement.» Pour elle, c’est impensable de gérer d’une façon aussi serrée.

Ponctions dans les coffres des CPE

Grand-mère Douceur 155 000 $

Le papillon enchanté 121 000 $

Plumeau soleil 24 081 $

Maison de Bécassine 167 310 $

Petits lutins 180 000 $ *

Mini campus 0 $

À tire d’aile 222 000 $

Fardoche 40 700 $

Sur une patte 30 000 $.

P’tites abeilles 0 $

Total 940 091 $

*Incluant des sommes du bureau coordonnateur des services de garde en milieu familial

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