MAGAZINE. 11, c’est le premier projet littéraire de Marika Marchand. L’autrice s’ouvre en toute vulnérabilité sur une épreuve qu’elle a traversée à l’adolescence, un avortement. Rencontre avec une femme forte qui a décidé de briser le silence.
Ce jour-là, l’autrice de ces lignes a rencontré Marika Marchand chez Rose Drummond. La jeune femme avait pris place dans la serre, un breuvage à la main. Une énergie douce et lumineuse se dégageait d’elle.
Un roman reposait sur la table. Pas n’importe lequel. Son premier projet littéraire, 11. Celle qui est âgée de 27 ans s’est investie corps et âme dans toutes les étapes de la réalisation de ce livre. Elle en est fière.
Il faut dire que la Drummondvilloise a un parcours atypique. Au cégep, elle a quitté les bancs d’école pour suivre son goût de l’aventure. «Je suis partie en voyage à travers le monde. J’ai fait plusieurs destinations différentes comme le Maroc, l’Espagne, le Nicaragua et l’Ouest canadien. Je partais. Je revenais. Je travaillais. J’amassais de l’argent. Je repartais», raconte-t-elle.
Habitée par l’amour de l’écriture, elle a commencé à rédiger des articles pour Les voyageuses du Québec, un magazine web collectif. «À travers mes textes, je donnais mes opinions. Je parlais de mes voyages. Il y avait un côté personnel et émotif à travers mes textes. On dirait que ça m’a donné le goût d’explorer ça en profondeur et commencer à écrire, de m’afficher au grand jour.»
De retour au pays, Marika Marchand a entamé un premier projet littéraire… qu’elle a éventuellement mis sur pause.
Du jour au lendemain, 11 s’est manifesté. Elle a fait un cauchemar. Un événement du passé a ressurgi. La jeune femme s’est réveillée en sursaut. Elle a été projetée plusieurs années en arrière, au moment où elle a vécu un avortement.
«Il était temps de faire du ménage dans ce tiroir que j’avais fermé il y a une dizaine d’années. Ça faisait longtemps que cet événement s’était produit dans ma vie. Je n’en ai pas reparlé. C’est resté là. Comme si ça n’avait pas existé. C’est revenu avec force. C’est là que j’ai décidé de m’attaquer à ça. Je me suis mise à écrire. Ça a suivi son chemin par la suite.»
L’autrice s’est entièrement consacrée à ce nouveau projet. Elle a replongé dans des souvenirs parfois éprouvants. «L’écriture a été un processus lent. J’y allais à mon rythme. Chaque fois que je m’asseyais pour écrire, c’était douloureux. Ça nécessitait beaucoup d’énergie. J’écrivais pendant quelques jours assez intensément. Ensuite, j’arrêtais pendant quelques semaines. Au fur et à mesure que j’abordais le sujet, je me libérais. C’était comme une thérapie», soutient-elle.
C’est à l’âge de 17 ans que Marika Marchand a appris qu’elle était enceinte. La nouvelle est tombée sur elle comme une tonne de briques. L’adolescente était en état de choc. «Au début, l’émotion ne montait pas. Je n’assimilais pas ce qu’il se passait», souffle-t-elle.
À l’époque, elle ne se sentait pas prête à accueillir un enfant dans sa vie. Marika Marchand était en couple avec un garçon qu’elle ne voyait pas dans le rôle paternel. Elle a fait le choix d’interrompre sa grossesse.
Dans le livre, le lecteur découvre toutes les étapes par lesquelles l’adolescente a passé. L’annonce, les remises en question, le poids du regard des autres, la décision, l’intervention : l’autrice s’exprime en toute transparence.
Au cœur de ce raz-de-marée, Marika Marchand s’est isolée. Les répercussions du silence ont été dévastatrices chez elle. «J’ai vécu un grand sentiment de honte. Je me suis beaucoup recroquevillée sur moi-même. Je n’ai pas eu la chance de connaître des organismes qui pouvaient me venir en aide», indique-t-elle.
Heureusement, elle a pu compter sur l’appui de sa mère à travers cette épreuve.
Un droit fondamental
Au cours de l’écriture, l’autrice a été secouée d’apprendre que la Cour suprême américaine a révoqué l’arrêt Roe v. Wade, rendant les états libres d’interdire l’avortement. «C’est arrivé le 24 juin 2022. C’est à partir de cette date que j’ai compris à quel point c’est important d’écrire à ce sujet-là. À ce moment-là, j’écrivais le livre pas juste pour moi, mais pour la cause et les femmes en général.» À ses yeux, le droit à l’avortement est fondamental.
La jeune femme croit en la pertinence de son discours. «L’avortement n’est pas un sujet dont on parle assez. Pour certaines personnes, l’intervention peut être banalisée et pour d’autres, ça peut être démonisé.»
En racontant son histoire, Marika Marchand souhaite lancer un message d’espoir. Elle a réussi à s’en sortir. Maintenant, elle tient entre ses mains le volant de sa vie. «Il faut vraiment avoir confiance en soi. Il faut s’assumer dans ses choix. Il faut aller chercher l’aide dont on a besoin», soutient-elle.
La Drummondvilloise a fait le choix de s’associer à trois organismes, tels que La Rose des vents, le CALACS La Passerelle et le Centre de santé des femmes de la Mauricie. Un montant leur est versé pour chaque exemplaire vendu, au choix du lecteur.
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