Tribunal spécialisé en violence conjugale : la confiance se rebâtit

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Par Louis-Philippe Samson
Tribunal spécialisé en violence conjugale : la confiance se rebâtit
Jessica Thibault, intervenante sociojudiciaire de liaison (ISL), Marilie Cormier-Gaudet, directrice générale, Shanny St-Onge, ISL, Jade Cloutier, intervenante responsable du chien d’assistance judiciaire, au CAVAC Centre-du-Québec et Falkor le chien d’assistance. (Photo : Ghyslain Bergeron)

TRIBUNAL. Deux ans après l’annonce du projet pilote de tribunal spécialisé en violence sexuelle et en violence conjugale, l’objectif de rebâtir la confiance des victimes envers le système judiciaire n’a jamais paru aussi réaliste, selon le Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) du Centre-du-Québec.

Dans le district judiciaire de Drummondville, le CAVAC compte deux intervenantes sociojudiciaires de liaison (ISL) et une intervenante responsable du chien d’assistance judiciaire dans son équipe attitrée au projet pilote. À l’heure actuelle, seuls les cas de violence conjugale sont suivis par l’organisme dans le cadre du tribunal spécialisé. La trajectoire d’accompagnement des victimes de violence sexuelle est encore en construction.

Le rôle des intervenantes du CAVAC est d’agir notamment comme point de référence pour les victimes. Elles s’assurent qu’il y a un filet de sécurité autour des victimes et sont un lien entre les différents acteurs et organismes partenaires. Une victime sera toujours accompagnée par la même ISL pour favoriser la création d’un lien de confiance fort. Auparavant, l’appel aux services du CAVAC se faisait sur une base volontaire.

«Le projet pilote apporte une plus grande prise en charge, a avancé Jessica Thibault, ISL au CAVAC Centre-du-Québec. Avant, la victime portait plainte et avait quelques contacts ici et là. Il n’y avait pas nécessairement de services jusqu’au moment du procès. Ça pouvait leur occasionner du stress. Maintenant, il y a une rencontre, en personne, qui est faite dès le début du processus avec nous et le procureur. Je pense que ça rassure les victimes de pouvoir mettre un visage sur les gens qui s’occupent de leur dossier.»

Les partenaires du CAVAC, qui évoluent dans le milieu de la violence conjugale, sont dorénavant plus sensibles et ont une meilleure compréhension de la dynamique. «La formation est l’un des quatre piliers des tribunaux spécialisés, a indiqué Marilie Cormier-Gaudet, directrice générale du CAVAC. Nous avons eu une formation sur les violences sexuelles à laquelle les enquêteurs, les divers organismes, les services de probation et les procureurs notamment ont participé. Tous les acteurs du territoire étaient réunis pour utiliser un vocabulaire commun, ce qui est aussi important.»

Les intervenantes soulignent que la mise en place du projet pilote s’est bien déroulée à Drummondville. «Au fil du temps, les outils ont évolué. On a développé des protocoles et des procédures de collaboration avec les acteurs avec qui on travaille. Je pense que c’est important de pouvoir s’ajuster devant des situations différentes. On est capable de développer un arrimage pour que ce soit plus fonctionnel et plus adapté aux besoins des victimes», a élaboré Shanny St-Onge, ISL au CAVAC.

Si une victime a besoin d’un soutien psychosocial, elle sera référée à un organisme spécialisé en la matière qui prendra soin d’elle pour la suite des procédures. Bien que la majorité des cas impliquent une victime féminine, le CAVAC signale qu’il existe aussi une proportion appréciable d’hommes victimes.

Travail constant

La mise du pied du projet pilote, en juillet 2022 à Drummondville, représente une charge de travail importante pour le CAVAC. Les intervenantes jonglent continuellement avec environ 80 dossiers chacune tandis que l’organisme reçoit entre 30 et 60 nouveaux dossiers chaque mois.

«Assurément, on n’aura pas assez de ressources humaines lorsque les cas de violence sexuelle s’ajouteront ces prochains mois. C’est énormément de travail, mais on a de belles réussites. On parvient à obtenir la collaboration de victimes qui pouvaient être plus réfractaires ou qui souhaitaient reprendre contact avec l’accusé. On réussit à mettre des filets de sécurité en place autour de celles-ci», a dit Mme Thibault.

D’ailleurs, les intervenantes drummondvilloises ont commencé, de leur propre initiative, à réaliser des suivis de procédures judiciaires de cas de violence sexuelle. «On le fait pour que la trajectoire en violence sexuelle entre graduellement, qu’on ait les outils en main et que le terrain soit préparé pour accueillir ces cas qui vont demander beaucoup de ressources», a ajouté Mme St-Onge.

Malgré cette charge de travail, la directrice générale du CAVAC est convaincue que le projet des tribunaux spécialisés permet de combler plusieurs trous de services. Elle croit le projet pilote atteint ses objectifs à Drummondville.

«Je crois profondément que les gens qui passent par les tribunaux spécialisés et les ISL ont une reprise de confiance envers le système de justice; ce qui était le but du rapport Rebâtir la confiance. Je suis convaincu que les gens qui passent par les bureaux de nos intervenantes ont confiance d’être écoutés, entendus et crus», a souligné Marilie Cormier-Gaudet.

Avec l’arrivée prochaine de la trajectoire des violences sexuelles, l’équipe du CAVAC espère que le tout se déroulera bien. Elle souligne également la chance qu’elle a de compter sur des partenaires aussi investis. En plus de ces points positifs, le CAVAC pense que le public doit encore être sensibilisé à l’existence du projet pilote et de la présence de ses services.

 

Bracelets antirapprochements

Le CAVAC Centre-du-Québec souligne l’apport des bracelets antirapprochements (BAR) implantés au printemps 2023. Ceux-ci offrent deux niveaux d’alerte aux services de probation. Le premier avertit l’agresseur s’il s’approche de sa victime et il doit rebrousser chemin. À la seconde alerte, si le prévenu poursuit son chemin, les services policiers seront déployés vers la victime qui aura reçu une alerte sur son téléphone cellulaire qui assure la géolocalisation. L’usage du BAR se fait de façon volontaire à la demande de la victime.

«L’esprit du BAR est de protéger la victime. Les policiers la mettront en sécurité et, ensuite, ils interviendront auprès du contrevenant. Pour nous, ce dispositif est une bonne nouvelle. Ça nous permet de dire aux victimes que leur sécurité est réellement importante à nos yeux», a commenté Marilie Cormier-Gaudet, directrice générale du CAVAC.

 

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