SÉCURITÉ ROUTIÈRE. Le coroner Yvon Garneau a émis la recommandation d’abaisser le taux d’alcoolémie permis de 80 mg/100 mL (0,08) à 50 mg/100 mL (0,05) dans son rapport sur le décès de Stéphanie Houle survenu le 1er octobre 2021 à Drummondville.
«Il y a trois éléments qui m’ont motivé à faire cette recommandation, indique le coroner Garneau. D’abord, c’est une recommandation qui est répétée par différents coroners du Québec. Deuxièmement, elle a été proposée, il y a une dizaine d’années, par l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). En troisième lieu, je dirais que le public, de façon générale, réclame le 0,05 pour s’assurer d’une meilleure sécurité routière.»
Ailleurs au Canada, les provinces de l’Ontario, de la Colombie-Britannique et de l’Atlantique ont toutes adopté un taux de 50 mg/100 mL. «J’espère que ça fait assez longtemps qu’on en parle pour que ce rapport soit celui qui sonnera le glas du 0,08. À peu près tout le monde prêche pour le 0,05. En Europe et aux États-Unis, ils l’ont adopté et ils sont parfois plus sévères. Pourquoi le Québec ferait-il cavalier seul?», se questionne Yvon Garneau qui souhaite que les législateurs se penchent sérieusement sur la question.
Rappelons que le 1er octobre 2021, un homme a perdu le contrôle de son automobile sur le chemin Hemming et a effectué une sortie de route, près du centre Normand-Léveillé, avant de percuter un arbre. Passagère du véhicule, Mme Houle a succombé à ses blessures. Le conducteur, Benoit Janvier, s’en est tiré, mais a plaidé coupable à des accusations pour avoir conduit en état d’ébriété et avoir eu une conduite dangereuse. Il purge une peine de 54 mois de prison.
Précisons que le coroner Garneau appuie également sa recommandation sur un mémoire de l’INSPQ datant de 2017. Dans celui-ci, il est indiqué que le risque d’être impliqué dans une collision mortelle est multiplié de 1,7 lorsque le taux d’alcoolémie se situe entre 20 et 50 mg/100 mL. Ce risque augmente de 4,5 fois lorsque le taux se trouve entre 51 et 80 mg/100 mL. Finalement, le risque devient 23,9 fois plus élevé lorsque le taux varie entre 81 et 150 mg/100 mL.
«Avec ces données, on constate que le jugement de l’esprit humain est déjà affecté lorsque le taux d’alcoolémie atteint le 0,05. J’espère qu’un taux plus sévère sera une méthode de dissuasion collective», a ajouté le coroner.
Par ailleurs, Yvon Garneau a soumis une seconde recommandation : il demande au ministère de la Sécurité publique du Québec, à la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) et à Éduc’alcool de «coordonner leurs efforts afin de mettre en place des activités de sensibilisation visant à rappeler au public l’importance de signaler aux policiers les conducteurs ayant ou semblant avoir les facultés affaiblies par l’alcool ou une drogue».
Dans son rapport, le coroner a indiqué qu’au moins deux personnes avaient été mises au courant de l’état dans lequel se trouvait M. Janvier avant qu’il ne prenne le volant. «Je me suis demandé pourquoi ces personnes n’ont pas pris des moyens dissuasifs pour l’empêcher de conduire ou encore appelé le 911 afin qu’un policier l’intercepte; tout ça dans le but de sauver une vie. Un collègue coroner a fait cette recommandation en décembre 2022 et je l’ai renouvelée», a précisé Yvon Garneau.
Ce dernier estime que les tenanciers de bar sont déjà sensibles à cette situation alors qu’ils signalent plus souvent les conducteurs aux facultés affaiblies qui quittent leur établissement. Selon lui, le public pourrait être plus conscientisé à cette façon de faire.
«Je crois qu’en 2023, on est capable de dénoncer quelqu’un qui s’apprête à commettre l’irréparable. Il n’y a pas de honte à ça. Il faut se demander ce qui est le plus important. Est-ce l’odieux d’avoir dénoncé quelqu’un ou le deuil d’un proche? Les gens peuvent le faire de façon anonyme et en toute sécurité à l’aide du 911», a terminé le coroner Yvon Garneau.
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