Imagerie médicale : «Des fois, on est devant un casse-tête»

Photo de Lise Tremblay
Par Lise Tremblay
Imagerie médicale : «Des fois, on est devant un casse-tête»
La salle adjacente au scan. (Photo : Ghyslain Bergeron)
(Note de la rédaction) L’hôpital Sainte-Croix de Drummondville étouffe. De l’intérieur comme de l’extérieur. Dans une démarche inédite, L’Express a visité le 31 mai dernier plusieurs unités de service et rencontré les gens qui travaillent dans cette cour à miracles. Personne n’avait reçu la consigne de faire le ménage avant la visite du journal. Votre hôpital, construit en 1948, est présenté tel que vu. Pour les besoins de la cause, un secteur bien précis sera présenté chaque semaine, jusqu’au 1er juillet.

SANTÉ. Située au 3e étage du bloc 2, l’aile dédiée à la radiologie est une véritable fourmilière. Chaque jour, environ 250 personnes subissent des tests dans des salles pour la plupart mal adaptées.

Tout en écrivant dans le dossier d’un patient, un médecin-interniste pousse un soupir à notre passage. Au-delà des salles exiguës, les logiciels servant à certains examens datent d’une autre époque.

«Je pourrais en parler longtemps, communique le professionnel en levant les yeux. Dans bien des centres aujourd’hui, les techniciens et les préposés placent les patients. Vu qu’il manque de place partout, je suis obligé de sortir et de rentrer mes affaires. Je perds dix minutes à chaque fois. Si on met ça bout à bout, ça fait cinq à dix patients de moins que je peux rencontrer chaque jour juste à cause de la manipulation. Il y a les logiciels aussi. Le CIUSSS-MCQ fonctionne par appel d’offres pour les nouvelles machines, mais il oublie d’inclure la réalité du terrain. On n’a pas les logiciels pour les faire fonctionner. Il n’y pas d’argent pour ceux-ci. On travaille donc avec l’ancienne technologie.» Le médecin n’a pas voulu révéler son identité.

Lors du passage de L’Express dans ce secteur névralgique où les soupçons se transforment en images, il y avait peu d’activités, hormis le va-et-vient du personnel infirmier. Comme on dit dans le jargon, le rush était passé.

«Ici, on fait plus de 250 enregistrements par jour pour des mammographies, des échographies cardiaques ou fœtales, de la résonnance magnétique et des infiltrations. Une personne peut passer plus d’un test quand il vient ici», met en contexte Anne-Marie Caya, chef de service de l’imagerie médicale, en poste depuis 16 ans.

Anne-Marie Caya, chef de service de l’imagerie médicale. (Photo Ghyslain Bergeron)

Au fil du temps, son département a subi quelques modifications. On a réaménagé certains espaces, mais jamais on n’en a gagné. Les aires d’entreposage ont été transformées en zones d’examen.

«Il y a cinq ans environ, l’accueil a été refait pour faciliter la circulation et éviter les obstructions dans le corridor. C’est mieux, mais ce n’est pas plus grand qu’avant, informe Mme Caya. Dès qu’on entre dans le département, on fait face à un enjeu d’espace. Le vestiaire où on met les jaquettes bleues est trop petit. Les patients sont parfois obligés de traîner leurs choses dans les salles d’examen. Ce n’est pas très pratique.»

Avant d’aller plus loin, soulignons que la Fondation Sainte-Croix/Heriot a chouchouté ce département ces dernières années. En 2022, l’organisme a pris en charge le rehaussement de la mammographie en investissant dans un appareil de pointe. En 2019, un appareil d’imagerie médicale (IRM) s’est ajouté puis, en 2018, la Fondation a acquis un appareil de radiofluoroscopie.

«On a été chanceux. On a eu plusieurs dons. On en avait besoin», laisse tomber la chef de service.

Échographie

Le secteur de l’échographie est celui qui manque le plus d’amour sur cet étage. Les salles sont trop petites et la confidentialité est reléguée aux oubliettes.

Un tout petit espace utilisé par un technologue en radiologie. Il n’a pas d’espace pour un ordinateur. (Photo : Ghyslain Bergeron)

«On a quatre salles d’échographie, mais on entre par une porte commune. Les patients sont séparés par des rideaux, ce qui pose problème. On entend tout. Ça prendrait des salles individuelles et fermées. On a aussi besoin d’espace de travail. Les radiologistes prennent leurs notes directement à côté des civières. C’est difficile pour eux», présente Anne-Marie Caya.

Cette dernière poursuit en soutenant que les demandes excèdent l’offre. «On a beaucoup de demandes d’examens, mais on n’a pas assez d’appareils et de salles pour les faire. J’essaie d’optimiser nos ressources. J’ai ajouté un quart de travail de soir. Ça aide un peu pour le roulement», dit-elle.

Comme c’est le cas pour les autres étages de l’hôpital, là aussi, le manque d’uniformité des salles dérange. Certaines sont suffisamment grandes; d’autres ne peuvent tout simplement pas accueillir un patient sur civière.

«Des fois, on est devant un casse-tête. Il faut sortir la civière de la salle pour pouvoir entrer le patient qui est déjà couché. C’est beaucoup de manipulation», soupire la gestionnaire, en ajoutant que la situation est la même à la salle dédiée aux échographies cardiaques.

Scan

Dans la salle de scan, là aussi le personnel se bat avec les corridors et les cadres de portes trop étroits. Lorsqu’un patient est amené sur civière, il y a plusieurs angles à contourner pour arriver à bon port.

Puis dans la salle hermétique dédiée aux technologues et aux radiologues, l’espace est compté. «Les dossiers s’en viennent de plus en plus numériques. On n’a pas assez de comptoirs pour consulter nos requêtes. Ça fait longtemps que ç’a été bâti ici. Seulement trois personnes peuvent y travailler en même temps. Disons que parfois, il fait chaud», lance Mme Caya, qui espère un réaménagement à court terme.

Mammographie

L’appareil de mammographie. (Photo Ghyslain Bergeron)

Les locaux de la mammographie font partie des plus achalandés de cet étage, et ce, en raison du Programme québécois de dépistage du cancer du sein. Chaque jour, plus de 50 femmes y sont accueillies. Le personnel dispose d’un seul appareil pour mener les tests de prévention.

«Nous avons beaucoup d’attente. On aurait besoin d’un deuxième appareil, mais on n’a pas de place suffisante, informe notre hôte. En fait, on aurait besoin d’un mammographe avec lequel on pourrait aussi faire des biopsies. Récemment, on a eu cinq jours d’arrêt parce que l’appareil a brisé. On a dû annuler les rendez-vous.»

Sur une note positive : l’hôpital Sainte-Croix dispose de la nouvelle technologie d’imagerie du sein appelée tomosynthèse mammaire numérique. «Le logiciel nous permet de faire du 3D. On l’a depuis le mois de juillet 2022.»

Résonnance magnétique

L’appareil de résonance magnétique. (Photo Ghyslain Bergeron)
L’appareil de résonance magnétique. (Photo Ghyslain Bergeron)

Autre point positif du département : l’aire réservée à la résonnance magnétique, un examen servant notamment à passer au peigne fin les articulations. La salle d’attente est adéquate et la technologie est à jour, l’appareil datant de deux ans à peine.

«C’est un examen qui prend une heure. Ça se fait par séquences bien définies. C’est la raison pour laquelle l’attente est très longue, mais maintenant, on a une personne qui travaille de soir», termine Mme Caya.

En 2022, ce département de l’hôpital Sainte-Croix a accueilli 101 363 patients pour un total de 129 065 examens.

(Avec la collaboration de Cynthia Giguère-Martel)

 

À lire aussi: Le bloc opératoire était déjà trop petit en 1999

À lire aussi : Accès libre dans un hôpital qui craque de partout

À lire aussi: Le 7e étage, le reflet de l’hôpital

À lire aussi: L’urgence, la porte d’entrée de tous les maux

Partager cet article