Les centrales syndicales ont-elles peur de parler de la loi 101? (Tribune libre)

Les centrales syndicales ont-elles peur de parler de la loi 101? (Tribune libre)
Lettre d'opinion (Photo : Illustration, L'Express)

TRIBUNE LIBRE. Les 16 et 17 mars derniers, se tenait, à la Grande Bibliothèque, la première édition du FranColloque organisé par la Centrale des syndicats du Québec (CSQ). Cet événement décrit pompeusement comme le «premier rendez-vous sur l’état du français en enseignement supérieur au Québec» tombait à point.

Effectivement, bien des faits doivent susciter notre inquiétude quant à l’avenir de notre langue commune. Les données de Statistique Canada (recensement de 2021) montrent que le français décline presque partout au Canada et au Québec.

À cela s’ajoute entre autres que, sur l’île de Montréal, près de 50 % des élèves inscrits au préuniversitaire poursuivent leur cégep en anglais, que les cégeps anglophones constituent des lieux d’anglicisation et que l’UQAM est maintenant déclassée par Concordia.

À la lumière de ces constats, les enseignants et les enseignantes du collégial, réunis au sein des deux grandes fédérations syndicales, la FNEEQ-CSN et la FEC-CSQ, ont récemment pris position en faveur de l’application des clauses scolaires de la loi 101 au collégial. Or, pas un propos de tous les éminents invités ne porta directement sur cette position adoptée démocratiquement. Nous aurions pu nous attendre à ce qu’une telle mesure fasse l’objet de réflexions.

À quelques reprises, le troisième vice-président de la CSQ a affirmé que ce sujet, historiquement, n’intéressait pas grand monde à la CSQ. Mais pourquoi donc minimiser ainsi le fait que les enseignantes et les enseignants des cégeps sont en faveur de l’application de la loi 101 au collégial?

L’objectif véritable était-il d’étouffer, sur ce point, toute discussion? À tout le moins, effectuons les observations suivantes quant au FranColloque.

Premièrement, alors qu’il soulignait l’importance de ce colloque et l’enthousiasme de sa centrale pour celui-ci, le président de la CSQ s’est presque immédiatement esquivé, à l’anglaise, après son mot d’ouverture. Drôle de manière de montrer que la CSQ se préoccupe de la place du français en enseignement supérieur.

Deuxièmement, certains chercheurs ont tenté de nous expliquer que tout n’était pas sombre concernant le français, comme si nous nous inquiétions trop. Cependant, «seulement 21 % des articles scientifiques produits par des Québécois [et des Québécoises] dans des établissements francophones sont en français». Tout n’est pas sombre donc!

Troisièmement, l’idée que l’usage de l’anglais dans la recherche est une fatalité a souvent été exposée, comme si les chercheurs étaient incapables de s’organiser pour publier en français, avec le soutien de solides politiques gouvernementales.

Quatrièmement, soulignons la visite surprise de la ministre Pascale Déry… La même qui défendait l’unilinguisme condescendant du Montréalais Michael Rousseau, le patron d’Air Canada…

Nous pensions avoir tout vu lorsque le troisième vice-président de la CSQ a souligné l’importance de développer des alliances à l’international pour renforcer le français au Québec. Est-il vraiment besoin d’aller à l’étranger pour ce faire?

Nous pourrions commencer, simplement, par promouvoir l’application de la loi 101 au collégial, ce qui contribuerait à assurer la pérennité du français comme langue normale des études supérieures et arrêter de nous divertir avec des colloques qui, c’est déplorable, ratent lamentablement leur cible.

Jean-François Bergeron et Francesca Francoeur, enseignant et enseignante en philosophie au cégep de Drummondville et membres de la CSQ

 

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