Le bœuf wagyu, une viande à découvrir

Photo de Louis-Philippe Samson
Par Louis-Philippe Samson
Le bœuf wagyu, une viande à découvrir
Jeannot Luckenuik est éleveur de bœufs depuis une trentaine d’années et a réorienté sa production vers le wagyu en 2010. (photo Ghyslain Bergeron)

MAGAZINE. Depuis 12 ans, une part du Japon vit à Lefebvre. Jeannot Luckenuik est éleveur de bœufs wagyu; une variété originaire du pays du soleil levant reconnue mondialement.

Agriculteur bovin depuis une trentaine d’années, M. Luckenuick produisait des bœufs angus lorsqu’il a commencé l’élevage, à temps partiel, alors qu’il travaillait également sur les chemins de fer du CN. Mais dès qu’il a découvert le wagyu, aussi connu sous l’appellation kobe, il est devenu impossible pour lui de produire autre chose.

«C’est un restaurateur qui m’a dit qu’il avait mangé une meilleure viande que la mienne. J’ai fait une recherche sur Internet et j’ai trouvé un éleveur à Formosa, en Ontario à qui j’ai acheté un quart de bœuf pour l’essayer. Quand je l’ai goûté, c’était effectivement meilleur», raconte M. Luckenuik. Si l’on doit s’y fier : «l’essayer, c’est l’adopter».

Les bœufs vivent ensemble dans leur immense enclos. (photo Ghyslain Bergeron)

Une fois cette décision prise, il a fallu qu’il commence à constituer son élevage. Le Lefebvrois a fait l’achat de bœufs pur-sang d’un producteur de la région de Washington D.C. aux États-Unis et il est devenu le premier éleveur de la race au Québec il y a une douzaine d’années. Jeannot Luckenuik a pris la décision de former son élevage d’un mélange à 50 % de wagyu et 50 % d’angus, c’est-à-dire que les animaux sont un croisement des deux races.

«Si je produisais que du wagyu pur-sang, personne ne serait capable d’acheter ma viande, croit l’éleveur. On qualifie ce croisement, que j’ai fait à partir de mon élevage d’angus, de F1. Ainsi, on a pu diminuer le prix de moitié et la qualité de la viande se compare très bien. Je veux que ce soit un produit accessible pour tout le monde.»

L’élevage

Depuis environ deux ans, M. Luckenuik porte une plus grande attention à la génétique de ses bœufs. Il a fait l’acquisition d’une cinquantaine de bêtes pur-sang afin de se rapprocher le plus possible des qualités qui font la réputation du wagyu.

«Je n’étais pas capable d’avoir des taureaux qui me satisfaisaient en termes de persillage. La bonne génétique ne se transmet pas automatiquement d’une bête à sa progéniture. Je travaille beaucoup avec des gens en Australie parce que le pays a un gros cheptel de wagyu. Ils ont aussi beaucoup de données qui permettent de savoir quels sont les meilleurs animaux reproducteurs», explique-t-il.

De cette façon, le producteur agricole élève ses bêtes sans hormones ni stéroïdes ajoutés. Les bœufs sont nourris d’un mélange de drêche, c’est-à-dire de résidus du brassage de la bière, de foin, d’herbe et de minéraux sous forme de blocs que le cheptel prend un malin plaisir à lécher.

Les animaux se nourrissent notamment de foin, de drêche et de minéraux. (photo Ghyslain Bergeron)

Les quelque 200 animaux sont répartis sur deux grandes terres qui totalisent 380 acres. L’agriculteur tente par ailleurs de maximiser les ressources qu’ils offrent. À titre d’exemple, Jeannot Luckenuik propose un savon fait à 70 % de gras puis recherche parallèlement un artisan qui pourra fabriquer des chandelles à base du gras des bœufs. Estimant que chaque partie du bœuf peut être cuisinée pour en faire de délicieux repas, il refuse de vendre la viande de ses animaux en coupes spécifiques.

Il laisse aussi les animaux vieillir plus longtemps avant de rendre leur viande disponible à la consommation. Un bœuf sera habituellement prêt à environ 18 mois tandis que les wagyus de la ferme Levaluc le seront après 26, 27 ou 28 mois. «On attend plus longtemps pour que le persillage soit plus intense et que la viande soit meilleure au goût», explique l’éleveur.

Dans l’assiette

La viande des bœufs est vieillie à sec durant 30 jours afin de parfaire son goût. Lorsqu’elle est prête, l’agriculteur recommande de la faire cuire avec le moins d’épices possible afin d’en conserver les saveurs particulières. «Je ne révèlerai pas le secret de mon mélange d’épices, mais je peux vous dire qu’elles sont noires et blanches!», lance M. Luckenuik, en riant.

Ces saveurs se retrouvent particulièrement dans le gras, cela se ressent particulièrement avec la viande hachée. «Dans le cas d’une boulette pour un hamburger, il ne faut pas écraser la viande. Ça fait sortir toutes les saveurs. C’est le gras qui est le vecteur de goût», avise le passionné.

D’ailleurs, le gras du bœuf wagyu possède des propriétés particulières et spécifiques. Celui-ci fond à deux degrés Celsius moins élevés que celui d’autres races. Avec un persillage plus présent dans la viande, celui-ci fond et transmet ses arômes à la viande. Ce gras contient d’ailleurs des acides oléique et linoléique conjugué ainsi qu’un taux élevé de gras monosaturés. Ces propriétés le rendent semblable à l’huile d’olive en plus d’être une source d’oméga-3.

On recommande d’ailleurs d’utiliser la cuisson indirecte sur barbecue ou encore une plaque de cuisson en pierre volcanique. «L’avantage d’une pierre volcanique est que le gras ne tombera pas dans le fond du grill. Et si on fait cuire des légumes à côtés, ils pourront prendre le goût du gras du bœuf», souligne M. Luckenuik.

Chose certaine, avec une viande de cette qualité, il est préférable de garder les choses simples dans la cuisine, selon Jeannot Luckenuik.

Le persillage est essentiel au goût du bœuf wagyu lors de sa cuisson. (photo : Deposit)

 

Le persillage, c’est quoi?

Ce sont les filets de gras qui traversent les muscles d’une viande. Vous savez que vous regardez une bonne pièce de viande si elle est uniformément persillée.

Partager cet article