Secrets migratoires

Michael Deetjens
Secrets migratoires
Au Canada, il y aurait près de 400 espèces d'oiseaux migrateurs, chacune ayant sa propre stratégie et itinéraire. (Photo : Archives Ghyslain Bergeron)

MAGAZINE. Chaque automne, des milliers d’oiseaux quittent le pays pour passer l’hiver au chaud jusqu’au retour de la belle saison. Pour ces voyageurs ailés, ce périple de plusieurs milliers de kilomètres leur demande une excellente condition physique, mais aussi la capacité de retrouver leur chemin sans carte, ni GPS. Une mystérieuse faculté qui intrigue les chercheurs depuis bien longtemps…

Contrairement à la croyance populaire, ce n’est pas pour fuir le froid que certains oiseaux nous quittent pendant la saison froide. Ce serait plutôt pour ne pas mourir de faim! En effet, pendant l’hiver, leurs sources de nourriture disparaissent ou deviennent inaccessibles. C’est le cas pour les insectivores qui peineraient à trouver des insectes dans la neige, ou bien des espèces comme le grand héron ou le martin-pêcheur dont les proies seraient protégées par un couvert de glace. Plusieurs quittent donc vers les États-Unis, le Mexique, les Caraïbes ou l’Amérique du Sud, où ils pourront manger à leur faim.

Au Canada, il y aurait près de 400 espèces d’oiseaux migrateurs, chacune ayant sa propre stratégie et itinéraire. Certaines font le voyage en groupe, comme la bernache du Canada et l’oie blanche, alors que d’autres partent en solitaire, comme le colibri à gorge rubis qui malgré sa petite taille, peut voler jusqu’en Amérique centrale. De son côté, le geai bleu a la migration flexible. Il lui arrive de rester ici pendant l’hiver, mais il peut choisir de migrer de quelques centaines de kilomètres au sud si nécessaire.

Un mystérieux pouvoir

Les scientifiques ont repéré trois principaux sens qui permettraient aux oiseaux de s’orienter pendant leurs migrations : la vue, l’odorat et la détection des champs électromagnétiques. L’outil le plus intriguant est sans contredit ce qui entoure le magnétisme. Les scientifiques ont longtemps soupçonné que les oiseaux possédaient une sorte de « boussole interne”. En 2004, une étude dirigée par le biologiste allemand Dominik Heyers, est venue appuyer cette hypothèse. Selon l’étude, les oiseaux posséderaient des molécules magnétiques dans leurs yeux. Ses molécules seraient reliées à une zone du cerveau associée à la vision. Les oiseaux pourraient donc “voir” le champ magnétique terrestre et s’orienter en conséquence. Depuis, plusieurs autres études en sont venues à la même conclusion. Les oiseaux auraient donc littéralement le compas dans l’œil!

La capacité de voir le champ magnétique ne serait toutefois pas suffisante pour expliquer toutes les migrations. En réalité, toutes les espèces n’utiliseraient pas les mêmes outils, ni de la même façon ni dans les mêmes proportions. Certaines s’orienteraient visuellement à l’aide des astres, les étoiles et la Lune pour celles qui migrent la nuit et le Soleil pour celles qui migrent le jour. Les repères visuels comme les chaînes de montagnes et les rivages côtiers seraient également bien utiles pour plusieurs. D’autres mettraient à profit leur odorat pour s’orienter au-dessus des océans. Le secret résiderait donc dans leur capacité à utiliser leurs différents sens de façon complémentaire en plus d’utiliser leurs souvenirs emmagasinés pour leurs migrations futures.

L’humain s’en mêle

Profitant de la lumière de la Lune et des étoiles, plusieurs oiseaux choisissent de voler la nuit pour profiter de températures plus fraîches, mais aussi d’une plus faible prédation et de moins d’intempéries. La vue étant un sens important pour leur orientation, les lumières brillantes de nos villes peuvent les désorienter et les attirer, augmentant par le fait même le nombre de collisions avec les façades vitrées des immeubles. Plusieurs millions d’oiseaux périssent ainsi annuellement en Amérique du Nord. Pour Conservation de la nature Canada, la solution serait de réduire significativement l’éclairage nocturne en éteignant les lumières des grands immeubles et en orientant les faisceaux lumineux vers le bas pendant la période de migration. De plus en plus de villes mettent en place des initiatives pour limiter l’éclairage pendant cette période sensible pour donner un coup de pouce à nos amis ailés.

 

Insectes migrateurs

Les oiseaux ne sont pas les seuls à migrer, certains insectes le font également et c’est le cas du papillon monarque (Danaus plexippus plexippus). Ce papillon aux grandes ailes orange nervurées de noir, que l’on peut apercevoir dans la région, s’envole à l’automne vers les montagnes du Mexique. Un périple de 5000 km! Un véritable exploit pour un si frêle aventurier. Selon de récentes études, les chercheurs auraient découvert que le papillon monarque posséderait une sorte de “compas solaire” qui lui permettrait de se diriger à bon port.

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