Un couple se libère des factures et s’offre la liberté

Photo de Lise Tremblay
Par Lise Tremblay
Un couple se libère des factures et s’offre la liberté
Nancy Noël et Patrick Desmarais aspirent à une vie comprenant le moins de contraintes matérielles possibles. (Photo : Gracieuseté)

SIMPLICITÉ. Exaspérés d’avoir l’impression de survivre au lieu de vivre, Nancy Noël et Patrick Desmarais ont vendu leur maison de Drummondville pour s’acheter un petit autobus avec lequel ils savourent, un kilomètre à la fois, leur liberté retrouvée.

Changer de vie. C’est exactement ce que le couple Desmarais-Noël a choisi de s’offrir en 2019. Lui était estimateur chez Outillage précision Drummond; elle, chocolatière chez Choco Daisy.

«On travaillait tous les deux quarante heures par semaine. Je me rendais compte qu’on travaillait juste pour payer la maison. Il y avait toujours quelque chose à réparer ou à changer, on n’avait plus de fun. Personnellement, j’ai toujours été quelqu’un qui se stressait pour l’argent. J’avais constamment peur d’en manquer. Un moment donné, j’en ai eu assez. Mon chum attendait ce moment depuis longtemps, car il a été élevé par des gens plutôt nomades. On a donc décidé de vendre la maison. On a choisi de vivre au lieu de survivre. D’être pris avec de grosses factures, ce temps-là, est fini pour nous», exprime Mme Noël.

Durant son entretien avec L’Express Magazine, le couple qui aspire à un mode de vie minimaliste se trouvait dans un petit village, Williams Lake, en Colombie-Britannique. Il venait de vivre quelques mésaventures, mais rien pour leur faire regretter son nouveau mode de vie.

Le couple a particulièrement été renversé par la beauté du lac Abraham, qu’il a aperçu sur sa route. (Photo Gracieuseté)

«On ne reviendra jamais en arrière, même si on ne l’a pas eu nécessairement facile. Quand on a vendu notre maison, peu de temps après, la pandémie a commencé. On était censé partir au chaud aux États-Unis. Disons qu’on a été pris de court un peu», raconte la Drummondvilloise de 43 ans.

Le couple a profité de cette pause forcée pour améliorer le petit autobus qu’il avait acquis deux ans auparavant. Il y a ajouté des commodités et s’est assuré de ne rien manquer une fois sur la route. Douche portative, réfrigérateur alimenté à l’énergie solaire, lit douillet; tout a été réfléchi. Durant ces quelques mois, les Desmarais-Noël ont vécu à Bonsecours, dans la maison de leur fille, puis ont exploré l’Ontario, tout en travaillant quelques heures par semaine à distance.

Cap sur le Yukon

Au printemps 2021, le goût de prendre le large les a tenaillés. Ainsi, le 16 juin, ils ont mis le cap sur le Yukon tout en ne sachant pas s’ils allaient parvenir à se rendre, considérant les restrictions de certaines provinces à l’égard des touristes. Faisant confiance à la vie, ils ont pris la route le cœur léger, leurs trois carlins à bord. En tête, aucune date de retour.

«On a clanché l’Ontario, vu qu’on y était déjà allé, et on a traversé les provinces des prairies. On a visité plusieurs beaux endroits en chemin», raconte Mme Noël.

Sur leur route, une première embûche est survenue, comme pour tester leur capacité d’adaptation : la pompe à essence de leur véhicule a cédé. Ils se trouvaient à Strathmore, en Alberta. Une journée a été nécessaire pour trouver la pièce et faire la réparation.

«Dans l’ensemble, ç’a quand même bien été. On a pu se débrouiller et reprendre la route rapidement», lance celle qui n’était pourtant pas rendue au bout de ses peines. On y reviendra.

Le véhicule a été baptisé le «pug bus» puisque le couple voyage avec ses trois chiens de race carlin. (Photo Gracieuseté)

Le lendemain, le couple a visité Drumheller, une «ville de fossiles de dinosaure», puis mené par le vent, a mis le cap vers les montagnes de Banff. Les nuits, pas question d’aller dormir dans des campings bondés. Les Desmarais-Noël préfèrent consulter des applications comme Boondockers Welcome qui regroupent des gens prêts à accueillir des voyageurs sur leur terrain l’instant d’une nuit ou de quelques-unes.

«Après Banff, on s’est rendu à Abraham Lake (Alberta). C’était incroyable. Je n’en reviens pas de savoir que c’est si peu connu alors que c’est tellement beau. L’eau est bleue à perte de vue», exprime celle qui, malgré sa jeune quarantaine, est déjà grand-maman. «J’ai eu mes enfants très jeune et c’était voulu. Ça fait déjà 25 ans que Patrick et moi sommes ensemble.»

Tout en gardant en tête l’objectif d’aller explorer le Yukon et ses aurores boréales, ils sont allés à Jasper puis ont visité de petites villes à leur passage.

Puis une deuxième embûche est survenue. Celle-là a éprouvé davantage la capacité d’adaptation – et la patience – du couple. Alors que la province vivait une intense canicule qui a entraîné des dizaines de feux de forêt, il a frappé un chevreuil sur la highway 97 en direction de Kamloops, un accident qui a considérablement endommagé leur pug bus.

Étant donné la particularité de leur véhicule, la recherche des pièces ne s’est pas avérée de tout repos, tout comme la réparation. Les Desmarais-Noël se sont ainsi retrouvés sans moyen de transport durant une dizaine de jours.

«On a été obligé d’aller à l’hôtel avec les chiens. Ça n’a pas vraiment été drôle, d’autant plus qu’il faisait chaud comme ça ne se peut pas. J’étais vraiment à bout d’être enfermée. J’ai donc pris sur moi et j’ai écrit sur des pages Facebook en espérant trouver de l’aide. Ça n’a pas été très long : un couple nous a offert de loger dans leur motorisé. Nous avons vraiment apprécié sa bonté. Je m’aperçois que j’ai besoin d’espace dans ma vie», raconte l’aventurière, qui confie avoir trouvé éprouvantes ces journées. «Mon mari est resté zen tout le temps.»

La route à perte de vue. (Photo Gracieuseté)

Le couple a finalement pu reprendre la route après quelques jours de hauts et de bas. Les feux de forêt ayant cependant progressé, il a décidé de reporter son projet d’atteindre le Yukon, de rebrousser chemin pour revenir au Québec. «Les feux, c’est vraiment préoccupant et l’accident a vraiment abîmé le véhicule. Il y a encore des réparations à faire. On va s’organiser à la maison, question de sauver de l’argent aussi», explique Nancy Noël.

Et après?

«C’est sûr qu’on n’arrêtera pas. On va probablement se promener au Québec et en Ontario puisque dans les provinces de l’est, c’est encore compliqué. J’aime la liberté qu’on s’est donnée. Mon seul regret est de ne pas avoir eu cette mentalité avant. Dès mon plus jeune âge, on m’a inculqué le stress de la peur de l’instabilité. C’est sûr qu’on a eu nos enfants très jeunes et il fallait subvenir à leurs besoins. Mais maintenant, c’est différent. On veut autre chose», termine-t-elle.

Il est possible de suivre les Desmarais-Noël en recherchant Dee_Pug_Bus sur Facebook.

Partager cet article