La Rose des Vents s’inquiète des conséquences du déconfinement 

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Par Emmanuelle LeBlond
La Rose des Vents s’inquiète des conséquences du déconfinement 
La Rose des vents est une maison d'accueil et d'hébergement pour femmes et enfants victimes de violence conjugale. (Photo : Pixabay)

VIOLENCE. Alors que la Rose des Vents vient de traverser une période houleuse en matière de violence conjugale, l’organisme se prépare à affronter les prochains mois qui sont synonymes de déconfinement. La sécurité des femmes est à surveiller, dans un contexte où les hommes violents peuvent perdre le contrôle.

La Rose des Vents a été témoin des contrecoups de la pandémie. «On offre un service d’hébergement pour les femmes et les enfants victimes de violence conjugale. Dans les périodes de confinement fermé, on connaissait un certain calme. Dès qu’il y avait une petite ouverture, les femmes sortaient davantage et on connaissait une hausse d’achalandage», explique Stéphanie Gauthier, directrice adjointe de l’organisme drummondvillois.

L’utilisation des services externes a monté en flèche. «Nos services externes ont doublé. On a eu deux fois plus de consultations cette année. On a adapté nos services pour répondre rapidement à la demande. On est conscient que ce ne sont pas toutes les femmes qui ont besoin d’hébergement ou qui sont rendues à cette étape», soutient Édith Doucet, occupant le même poste que sa collègue.

La crise sanitaire a eu pour effet d’exacerber la détresse vécue par les femmes qui sont victimes de violence conjugale. «Le confinement, c’est quelque chose de rassurant pour un conjoint violent. Il a l’emprise nécessaire sans effort. Il peut justifier ses comportements violents par les mesures de confinement», explique Mme Gauthier, en précisant que la perte d’un emploi ou des difficultés financières pouvaient justifier les crises vécues.

À cause du contexte, ces dernières se sont davantage isolées. «Ça vient priver les femmes du support de leur réseau social qui est nécessaire en situation de violence conjugale. Elles comptent sur leur famille et leurs amis pour se sentir moins seules. Si elles avaient besoin de se changer les idées, tout était fermé. Elles étaient enfermées avec leurs problèmes et leurs angoisses.»

Règle générale, les formes de violence se sont aggravées. «Actuellement, on voit des cas de violence beaucoup plus intenses par rapport à avant. Les cas sont plus lourds», souligne Mme Doucet.

Déconfinement

Avec le déconfinement, la Rose des Vents se réjouit de constater que les femmes retrouvent une certaine liberté. En quelque sorte, l’accès aux ressources devient plus facile. Toutefois, l’organisme anticipe une escalade de violence. «Le conjoint va avoir un sentiment de perte de contrôle. En sortant de la maison, la femme s’expose à des contacts extérieurs. C’est là où ça peut devenir problématique», indique Mme Doucet.

Les victimes pourraient profiter de l’occasion pour annoncer une rupture à leur partenaire. «Quand la femme décide de laisser son conjoint, ce sont des moments plus à risque. Ce sont des moments critiques où les risques de violence plus sévères vont augmenter», complète-t-elle.

Certaines femmes peuvent même y laisser leur vie. «La majorité des féminicides ont eu lieu dans un contexte de séparation. C’est vraiment un moment clé et un signe que ça peut dégénérer. Il peut avoir d’autres facteurs, mais c’est un majeur.»

Rappelons que dans les six dernières semaines, un total de sept femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint à l’échelle du Québec.

La Rose des Vents confirme que Drummondville n’est pas à l’abri. «Chaque ville qui n’a pas été touchée est chanceuse. Chaque ville est à risque. Clairement, on ne dort pas tranquille», prononce Mme Gauthier.

Manque d’espace

L’organisme dépasse régulièrement sa capacité d’accueil, témoignant de la gravité de la situation. La Rose des Vents crée des petits miracles tous les jours. Chaque femme est prise en main, de quelconque façon que ce soit.

Mme Doucet certifie que la maison d’hébergement manque d’espace. Elle aurait besoin d’une superficie équivalente pour bien répondre aux besoins. «Ça nous permettrait de prendre du temps avec les femmes. Parfois, on doit précipiter les départs. On doit prioriser les situations à plus haute dangerosité. Certaines ont l’impression d’être lancées en bas du nid rapidement», renchérit Mme Gauthier, en précisant que l’organisme offre tout de même des suivis.

Contrer la violence

Dans tous les cas, l’organisme demande à la population d’être attentive aux comportements violents. «Quand on est témoin de choses et quand on doute, ça ne fait pas de mal à personne de nous appeler. Si tu doutes de ton voisin ou de ton collègue, tu peux nous poser des questions. C’est important d’en parler», amène Mme Doucet.

Mentionnons qu’une cellule de crise contre la violence conjugale verra le jour dans la région. Plusieurs intervenants se réuniront (incluant policiers, gens de la DPJ, maisons d’hébergement et groupes de soutien pour les hommes violents) pour intervenir dans des dossiers jugés à haut risque de danger ou d’homicide. Entre autres, les interventions visent à créer un filet de sécurité pour la victime et ses proches.

La Rose des Vents travaille présentement à la création de cette cellule, avec d’autres partenaires.

En cas de besoin, contactez l’organisme au numéro suivant : 819-472-5444.

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