Plus de 20 % des enseignants partagent leur tâche d’enseignement

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Par Cynthia Martel
Plus de 20 % des enseignants partagent leur tâche d’enseignement
Daniel Dumaine est le directeur des ressources humaines à la Commission scolaire des Chênes. (Photo : Gracieuseté)

ÉDUCATION. Bon an mal an, entre 20 % et 25 % des enseignants de la Commission scolaire des Chênes (CSDC) choisissent volontairement de réduire leur temps de travail. Ce type d’arrangement est une réalité bien ancrée dans l’organisation depuis une dizaine d’années, occasionnant peu d’effets négatifs.

«On se tient dans ces eaux-là depuis cinq ans pour les enseignants du secteur jeune», fait savoir Daniel Dumaine, directeur des ressources humaines à la Commission scolaire des Chênes.

D’après les données de l’année scolaire 2016-2017, cela représente157 enseignants sur un total de 719, tandis qu’en 2015-2016, ce nombre se situait à 153 sur 705 professeurs.

Une tâche réduite peut se traduire soit en congé sans solde à temps partiel ou bien en retraite progressive.

«Souvent, de façon majoritaire, je dirais que les gens prennent une tâche à 80 %», indique-t-il.

Les absences fonctionnent par jour cycle au primaire, c’est-à-dire qu’un professeur pourrait choisir de ne pas travailler les jours 3 et 7, par exemple.

«De cette façon, les élèves savent exactement quelles journées le contractuel sera présent en classe.»

Au secondaire, la réduction de tâches passe par le nombre de groupes dont l’enseignant a à sa charge.

«Au lieu d’en avoir quatre, par exemple, on ne lui en attribue que deux. Dans ce contexte, aucun étudiant ne s’en rend compte et il n’y a donc aucune répercussion», note M. Dumaine.

Un partage «logique»

Seuls les enseignants permanents peuvent se prévaloir de ce programme. Contrairement à ce que plusieurs peuvent penser, le fait d’avoir deux professeurs au sein d’une même classe a peu de répercussions sur la réussite des élèves, souligne M. Dumaine.

«Nous recevons les demandes au printemps, alors nous sommes en mesure d’identifier les contractuels et de planifier les horaires assez tôt. De plus, lorsqu’il y a une bonne collaboration entre les deux enseignants, tout se passe bien. C’est vraiment important pour nous de s’assurer de ça. Évidemment, le partage des tâches est fait de façon logique afin que les élèves reçoivent le meilleur enseignement. C’est notre critère premier.»

Qui plus est, la CSDC s’assure que les contractuels aient une charge plus complète et conséquente.

«Un remplaçant peut se voir confier les tâches de différents professeurs, mais qui ont du sens ensemble. En fait, il peut se retrouver à combler quatre réductions de temps dans une même école ou au même cycle», précise-t-il.

Celui-ci estime que cette pratique est avantageuse autant pour les permanents que pour les contractuels. Pour les uns, cela favorise la conciliation travail-famille tout en évitant l’essoufflement. Pour les autres, il s’agit d’une belle occasion d’avoir un horaire plus stable et donc, un salaire plus constant.

«Le principal motif évoqué lors d’une demande est celui de la conciliation travail-famille. C’est un choix individuel avec lequel on est à l’aise (…) Pour les enseignants qui n’ont pas de permanence, c’est plus encourageant pour eux. Plus ils font des heures, plus vite ils vont tomber prioritaires pour un poste permanent.»

Ce programme entraîne-t-il moins d’absentéisme? À cette question, le directeur des ressources humaines n’a pas été en mesure de faire de corrélation.

Pénurie de main-d’œuvre

Si la CSDC était capable d’offrir ce programme depuis une dizaine d’années sans rencontrer de problèmes, elle doit maintenant composer avec un enjeu peu banal : la pénurie de main-d’œuvre.

«C’est une pression que nous n’avions pas les autres années, confie M. Dumaine. Mais ce n’est pas le seul facteur, il y a aussi l’absentéisme et la mesure du gouvernement qu’on appelle la libération d’enseignant.»

Présentement, le remplacement est plus difficile en cours d’année, comme l’explique M. Dumaine : «Là où ça devient difficile, c’est en cours d’année lorsque des absences s’ajoutent pour l’ensemble du personnel. Peu importe le motif de l’absence, on a toujours le même bassin de remplaçants qui n’est pas si grand. Heureusement, avec l’université, qui offre un programme d’enseignement préscolaire et primaire, cela nous donne accès à un bassin de proximité intéressant.»

Malgré cela, le directeur des ressources humaines maintient que ce programme est profitable à tous et que la commission scolaire continuera à l’offrir «tant et aussi longtemps qu’il n’y aura pas de répercussions sur les élèves».

«À notre avis, c’est quelque chose qui fait partie d’une réalité d’aujourd’hui partout, autant au privé qu’au public. On est juste un acteur de plus dans le mouvement», laisse-t-il entendre.

Le point de vue du syndicat

Joint par téléphone, le président du Syndicat de l’enseignement de la région de Drummondville, Guy Veillette, croit que cette mesure n’apporte que du positif, tant pour les enseignants que pour les élèves et souhaite que la commission scolaire la maintienne.

«Si on coupe ça, tout le monde va écoper. Moi, je suis bien content que les professeurs aient droit à ça, car ça leur permet de passer à travers l’année», se dit-il d’avis.

À ses dires, la lourdeur de la tâche explique souvent le choix de ses membres.

«Au secondaire, les enseignants vont demander de réduire leur temps à 80 % afin d’avoir une journée pour faire de la correction, du dépannage ou bien siéger à un comité. Au final, ils travaillent pareil à 100 % du temps, mais ça les aide quand même», explique-t-il, indiquant que le droit aux tâches réduites est négocié dans la convention collective.

«Les professeurs ont tellement de pression. Je fais juste penser à la gestion des résultats. Ils sont scrutés à la loupe pour ça. Aussitôt que leur groupe ont une moyenne en-dessous de ce qui est prévu par le ministère, des mesures leur sont tout de suite imposées», laisse-t-il tomber.

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