L’iniquité entre les écoles privées et publiques en matière de santé scolaire

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Par Cynthia Martel
L’iniquité entre les écoles privées et publiques en matière de santé scolaire
Le Collège Saint-Bernard est situé sur l'avenue des Frères à Drummondville. (Photo : gracieuseté)

ÉDUCATION. Le directeur général du Collège Saint-Bernard trouve aberrant qu’en 2024, son établissement privé ne puisse toujours pas avoir accès aux services d’une infirmière scolaire. Pourtant, Dominic Guévin et ses pairs soulèvent cette problématique depuis plusieurs années, mais leur revendication peine à trouver un écho favorable auprès des instances décisionnelles.

L’accès équitable aux services de santé pour tous les élèves est l’un des principaux chevaux de bataille de Dominic Guévin, en sa qualité de président du Regroupement des établissements d’enseignement privés Mauricie et Centre-du-Québec.

«On fait valoir depuis bien des années à la santé publique qu’un enfant, qu’il soit dans n’importe quel réseau scolaire, a droit à ce service. Un enfant dans un collège privé n’est pas un citoyen de seconde zone. Il faut s’entendre, la très grande majorité des écoles privées sont des OBNL. Puis, il ne faut pas faire l’amalgame qu’un élève qui fréquente un collège privé vient nécessairement d’une famille aisée. Plusieurs de nos élèves bénéficient de bourses pour pouvoir étudier ici», indique-t-il.

M. Guévin souligne que de nombreux jeunes éprouvent des difficultés à accéder aux services du CLSC, que ce soit par méconnaissance, par manque de maturité ou de motivation ou tout simplement parce qu’ils n’ont pas de moyen pour se déplacer.

«Ils ne sont tout simplement pas outillés pour ce genre de situation. Plusieurs d’entre eux ne veulent pas alerter leurs parents, car on se rappelle que dès 14 ans, les adolescents ont le droit à la confidentialité de leur dossier médical et peuvent consentir seul à certains soins. Il est de la responsabilité du CLSC de rejoindre le maximum d’adolescents et d’adolescentes et l’une des façons est d’offrir les services partout dans les écoles, qu’elles soient publiques ou privées», soutient-il.

Pour appuyer ses propos, M. Guévin met en lumière le rôle crucial des infirmières en milieu scolaire, non seulement pour fournir des soins, mais aussi pour éduquer les élèves sur des questions de santé cruciales, telles que la santé sexuelle et les problèmes émotionnels. Il estime que ces professionnels peuvent s’avérer une figure de confiance pour les jeunes.

«En plus d’avoir un bureau au sein de l’école, la professionnelle est désignée à venir enseigner aux élèves différents sujets touchant la santé des jeunes, mais aussi les outiller, notamment pour prévenir les ITSS. Combien y a-t-il d’enfants chez qui l’éducation sexuelle à la maison est nulle? D’où la nécessité d’avoir une telle professionnelle en nos murs. Et pour l’adolescent qui est confronté à une situation délicate, une jeune fille qui aurait besoin d’une pilule du lendemain, avoir une infirmière sur place, c’est rassurant. Ça les incite plus à se confier. Plus nos jeunes vont avoir accès à un service de proximité, mieux ils vont être servis et vont se porter», fait valoir Dominic Guévin.

Le directeur du Collège Saint-Bernard souligne que faute de ce service, il n’est pas rare que les éducateurs spécialisés doivent accompagner les jeunes aux CLSC.

«Pendant ce temps-là, l’éducateur spécialisé s’éloigne de sa mission et n’est pas présent pendant plusieurs heures pour les autres élèves. Il se retrouve face à une situation qui n’est pas nécessairement habileté à gérer et souvent devant un jeune stressé, voire apeuré, et plein de questionnements.»

Dominic Guévin est le directeur du Collège Saint-Bernard. (Photo : Ghyslain Bergeron)
L’urgence d’agir

Dominic Guévin s’explique mal, même après autant d’années, cette iniquité, d’autant plus que certains établissements privés ailleurs en province peuvent bénéficier de la présence d’une infirmière scolaire.

«Dans d’autres régions, des CLSC ont pris l’initiative de s’investir dans les écoles privées. La question est : pourquoi? Pourquoi ailleurs ça se fait et pas ici? Pourquoi le réseau privé serait-il moins desservi que le public? Et même, je vais aller encore plus loin, pourquoi certaines écoles publiques n’ont plus accès à ces services? C’est très questionnable. À mon avis, une école secondaire devrait bénéficier des services d’une infirmière scolaire, qu’elle soit publique ou privée», juge-t-il.

Le dirigeant se désole de constater que l’accès aux services d’une infirmière scolaire dans les établissements privés en Mauricie et au Centre-du-Québec ne constitue pas une priorité pour la santé publique.

«C’est déplorable et préoccupant. Je comprends les contraintes que vit présentement le réseau de la santé. Par contre, je me permets de me questionner sur la priorisation ou la non-priorisation qui a été faite au niveau des infirmières en milieu scolaire. Je pense que l’infirmière en santé scolaire n’est même pas une question à laquelle on doit réfléchir présentement. C’est davantage une question à laquelle on doit répondre et assez rapidement», insiste-t-il.

Devant la situation qui perdure, M. Guévin et les autres membres du regroupement prévoient d’adresser prochainement leurs revendications au conseil d’administration du CIUSSS MCQ.

«On n’arrivera pas avec le couteau entre les dents, ce n’est pas l’objectif. On veut simplement ouvrir le dialogue, faire les démarches correctement pour mettre fin à cette iniquité», laisse tomber Dominic Guévin.

De son côté, le CIUSSS MCQ confirme que les infirmières scolaires sont uniquement déployées dans les milieux d’enseignement publics. «Les milieux privés, s’ils souhaitent avoir la présence d’une ressource infirmière sur place, sont responsables d’assumer ce service», indique l’agente d’information, Kellie Forand.

Toutefois, celle-ci fait savoir que le CIUSSS rend tout de même à la disposition des écoles privées des conseillers-répondants en promotion-prévention et intervenants sociaux. Du soutien lors d’éclosion de maladies infectieuses et des cliniques de vaccination font également partie des services offerts.

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