«La flamme et la passion ne sont pas encore éteintes» – Yves Beaurivage

Photo de Ghyslain Bergeron
Par Ghyslain Bergeron
«La flamme et la passion ne sont pas encore éteintes» – Yves Beaurivage
Yves Beaurivage est retraité depuis le 30 novembre 2023. (Photo : Ghyslain Bergeron)

RETRAITE. Trois mois après avoir accroché son casque de pompier, l’ancien directeur du Service de sécurité incendie et sécurité civile de Drummondville (SSISCD), Yves Beaurivage, brosse un portrait positif de ses 27 dernières années au sein de divers services de la région.

Le 30 novembre 2023, la cloche a sonné une dernière fois pour le directeur Beaurivage.

«Vous avez débuté votre carrière le 8 août 1996 à Victoriaville. Vous avez ensuite rejoint, en 2002, le service incendie de Drummondville au moment de sa création. Nous vous sommes reconnaissants et nous nous souviendrons tous de vous comme étant un leader passionné, humain et accessible», a exprimé la répartition de la centrale CAUCA (Centrale des appels d’urgence Chaudière-Appalaches).

Yves Beaurivage à ses début à Victoriaville. (Photo : gracieuseté)

Les applaudissements de la trentaine de pompiers réunis pour un dernier au revoir ont retenti dans la caserne de la rue Cockburn.

Sa conjointe et ses deux filles, accompagnées de leurs enfants, étaient aussi du moment mémorable.

Un appel pour une alarme incendie a même été sonné pendant la cérémonie, comme si la vie lui envoyait un dernier au revoir! Il a accepté de livrer son état d’esprit à L’Express.

«J’ai eu une belle carrière, ça va me manquer, mais la flamme et la passion ne sont pas encore éteintes. J’ai accompli de belles choses avec mes collègues et le service de Drummondville est en santé. Quand je suis parti, j’ai vraiment apprécié la présence des pompiers. Ils n’étaient pas obligés d’y être, mais ils sont venus. Le service, c’est une grande famille», a expliqué Yves Beaurivage.

Depuis 1994, l’ex-pompier a roulé sa bosse à Victoriaville avant d’être muté au nouveau SSISCD.

«Ma passion vient mon oncle qui était pompier-policier. Il me laissait monter dans les camions et j’étais émerveillé. Mais j’ai eu l’appel du métier à mes 18 ans lors d’un voyage en Floride. Un ami venait de terminer sa formation et c’est à ce moment que je me suis dit que c’était ce que je voulais faire.»

À son arrivée à Drummondville en 2002, Yves Beaurivage a occupé le poste de lieutenant-cadre sous les ordres de Pierre Beauséjour. Au fil du temps, il a gradué vers les postes de capitaine, chef de division des opérations, directeur par intérim et finalement directeur du SSISCD en 2019.

L’évolution du service incendie

«En trois décennies, les choses ont beaucoup changé. Les équipements et la technologie se sont vraiment améliorés. Le volet scientifique est maintenant omniprésent, car il y a plus de matériaux combustibles, ce qui augmente le danger. De plus, les protections envers les pompiers ont beaucoup changé. Dans le temps, nous avions un genre d’imperméable long, alors la fumée et les débris pouvaient nous atteindre», a expliqué le Victoriavillois d’origine.

Les cancers reconnus ont doublé dans le domaine des incendies et, à ce jour, c’est environ 17 formes qui sont recensées. Les recherches qui ont été faites ont apporté des résultats et de nouvelles méthodes de travail.

Yves Beaurivage en compagnie du nouveau directeur, Andrew Barr. (Photo : Ghyslain Bergeron)

«Maintenant, les pompiers peuvent se rincer directement sur place quand ils sont contaminés. Il y a des zones à la caserne où les équipements souillés sont isolés avant d’être envoyés au nettoyage. C’était nécessaire, car les études démontrent que l’espérance de vie des pompiers est moindre par rapport au reste de la population. L’Europe est en avance sur nous sur la sécurité.»

Outre les incendies, les pompiers sont formés pour intervenir en espace clos et en sauvetage nautique. «Avec Mario Girard (chef de division), j’ai monté le dossier pour créer la division «matières dangereuses» (HAZMAT) en 2008. On a reçu une subvention et on a créé le service. Ils sont performants, formés et professionnels. Ça demande beaucoup de technique. Ça aussi ç’a changé.»

Des souvenirs

Les interventions marquantes sont nombreuses, mais quelques incendies sont revenus dans les souvenirs l’homme de 58 ans.

«Le feu à l’usine Oncle Fred a nécessité une centaine de pompiers. Ça fait beaucoup de gestion. Pneus Bélisle et le Géant du pneu ont aussi été des sinistres avec des défis. Ils étaient difficiles à gérer en raison de l’intensité des flammes. Ce sont de longues interventions et ça demande beaucoup d’énergie de la part des pompiers.»

Sur le plan personnel, l’incendie du restaurant Le Cactus de la rue Lindsay a particulièrement marqué Yves Beaurivage. «Mon équipe est entrée dans le bâtiment pour aller fermer une valve de gaz naturel. La porte s’est refermée et nous étions pris à l’intérieur, car il n’y avait pas de poignée. Un de mes collègues commençait à manquer d’air dans sa bonbonne. On a lancé un «mayday». Ma collègue a frappé dans la porte et elle s’est ouverte, a lancé celui qui fêtera ses 59 ans dans quelques semaines. On passe beaucoup de temps ensemble, c’est comme une famille. On se soutient dans les bons comme les mauvais moments. Tout ça va me manquer.»

Même si un incendie est un événement triste et désolant, il arrive parfois que les sapeurs en retirent quelque chose de satisfaisant.

Lors d’un feu majeur sur la rue Brock, une femme a été sauvée des flammes par les pompiers. Récemment, sur le boulevard Jean-De Brébeuf, ils ont effectué quatre sauvetages, dont deux in extremis.

«C’est un métier d’émotions. C’est leur travail, mais ils sont fiers quand le dénouement est heureux. Quand ça tourne mal, on se serre les coudes. On rentre à la maison et on serre nos proches dans nos bras, mais ils ne comprennent pas toujours pourquoi.»

La retraite

Yves Beaurivage a remercier sur les ondes radio le personnel. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Éligible à la retraite depuis 2017, Yves Beaurivage tenait à rester pour améliorer le service incendie de Drummondville.

«Est-ce que des choses auraient pu être faites différemment? Oui. L’important c’est de s’organiser et de faire une analyse complète de la situation. De prendre la réalité du terrain.»

Après une pause de quelques semaines, l’ancien directeur ne ferme pas la porte à collaborer avec les services incendie sous forme de consultant. À forfait.

«Je passe du temps en famille. Je vois mes petits-enfants. C’est plaisant, car je sais que «ça ne sonnera pas»», a-t-il commenté, en conclusion.

Partager cet article