Le département des petits et des grands miracles

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Par Lise Tremblay
Le département des petits et des grands miracles
Une employée du Centre de réadaptation physique InterVal donne des conseils à un usager. (Photo : Lise Tremblay)

SANTÉ. Chaque jour, l’équipe des services externes de réadaptation en déficience physique vit de grandes émotions et jongle avec les extrêmes. De l’homme qui tente de retrouver ses réflexes après avoir été terrassé par un ACV à la femme qui a subi de multiples fractures lors d’une chute à vélo, l’équipe multidisciplinaire a une mission capitale : les accueillir au plus bas de leur condition et les remettre sur pied, autant que faire se peut.

Ils travaillent partout. Dans les bureaux de la rue Saint-Jean à Drummondville, mais aussi à domicile et sur les lieux de travail de leurs patients. Les 170 employés du Centre de réadaptation physique InterVal soutiennent 1 900 adultes et 1 200 enfants chaque année, en incluant la clientèle atteinte d’une déficience intellectuelle ou d’un trouble du spectre de l’autisme.

Chaque semaine, ils sont confrontés à l’humain avec un grand H.

«On vit parfois de belles réussites, exprime Paul-Antoine Beaudoin, chef de l’Unité de réadaptation fonctionnelle intensive. J’ai plein d’histoires en tête, mais je pense en ce moment à un homme âgé dans la trentaine qui avait une ferme dans le coin de Saint-Bonaventure. En soirée, il a décidé d’aller faire un tour de moto. Sa roue avant est restée prise dans un nid-de-poule. Il a passé par-dessus ses poignées et sa moelle épinière a été sectionnée. Le chemin de la réadaptation a été long. Un jour, on l’a amené voir les équipes de basketball en fauteuil roulant et il a adoré ça. Il s’est mis à jouer. Ça lui a sauvé la vie.»

Une salle d’exercice. (Photo Lise Tremblay)

Ergothérapeutes, physiothérapeutes, physiatres, psychologues, travailleurs sociaux. Ils travaillent tous en équipe pour supporter la clientèle, mais aussi les proches qui sont tout autant secoués. «Avant, on avait une approche davantage physique. Maintenant, on tient compte de tout l’aspect émotionnel. C’est tout aussi important pour la réadaptation», souligne-t-il.

Au passage de L’Express le 2 août dernier dans ces locaux où se produisent une multitude de petits miracles, une ergothérapeute, Geneviève Rodrigue, avait le cœur à la fête. Elle est sortie de son bureau presque en dansant. Elle venait de fermer le dossier d’une dame victime d’un traumatisme crânien. Après s’être rétablie physiquement, cette dernière venait de confronter son ultime peur, celle de rejouer au dek hockey, sa grande passion.

«Je dis toujours à mes patients qu’il est essentiel de reconnecter avec ce qui les fait vibrer. Dans son cas, c’était le sport. Il fallait qu’elle le fasse. Il ne faut pas vivre dans la peur. En ergothérapie, on parle d’occupation signifiante, c’est-à-dire de renouer avec son projet de vie», nous a-t-elle indiqué.

Un long chemin

Le chemin de ces patients n’est pas simple. La plupart des traitements demandent du temps, de la détermination et de la constance. C’est vrai pour ceux qui ont été victimes d’un accident, mais aussi pour ceux qui se retrouvent avec une incapacité visuelle, auditive ou bien une maladie dégénérative. Selon la situation, ils débutent leur réadaptation à l’hôpital (URFI); ensuite, ils passent en mode externe.

À l’unité de la rue Saint-Jean, le gymnase est rempli de matériel pour aider à récupérer : matelas d’exercice, vélo stationnaire, poutre, barres parallèles, poids et autres.

La salle d’ajustement et de réparation de fauteuils roulants. (Photo Lise Tremblay)

«Quand on rencontre un patient, on lui demande toujours quels sont ses objectifs et on lui demande de nous parler de sa vie d’avant pour qu’on puisse attacher des besoins. Ensuite, il y a toute une équipe multidisciplinaire qui va l’entourer, en n’oubliant pas le support de l’entourage dans le plan d’intervention», explique M. Beaudoin, qui compte dans son équipe trois coordonnateurs, l’un à l’URFI, un second chargé du soutien à domicile et un troisième veillant à la réadaptation à l’externe.

Ensemble, ils suivent ce qu’ils appellent dans le jargon le processus de production du handicap. «Ça dit que si ton environnement est adapté et que la personne est capable de fonctionner, dans le fond, le handicap n’existe plus. Il est comme éliminé, car le patient peut faire ses choses», résume Jacinthe Cloutier, directrice de proximité au CIUSSS MCQ.

C’est que simultanément à la réadaptation, une équipe veille à ce que le domicile du patient soit adapté à sa nouvelle condition. Parfois, la cuisinière et les armoires doivent être changées. Parfois, c’est l’entrée et les escaliers qui doivent être corrigés.

«Quand ils sont définitivement en fauteuil roulant, on doit faire de gros projets domiciliaires. Avant, on allait beaucoup dans les gyms pour la réadaptation. Ce n’est plus comme ça aujourd’hui : on travaille davantage avec les patients à domicile et à leur travail, car c’est là que leur vie se passe. On mise sur leur autonomie», informe au passage Élise Drouin, aussi ergothérapeute.

Question d’avoir plus d’une option à proposer, le CIUSSS-MCQ a aussi le projet d’aménager à même l’hôpital un petit appartement classique où les patients et les soignants pourront faire des tests et suivre l’évolution de leur condition physique.

Selon la directrice de proximité Jacinthe Cloutier, les «sous sont là, mais le 7e étage de l’hôpital devra être rénové pour trouver de l’espace».

Observation

Le personnel du centre de réadaptation observe une situation «inquiétante» depuis quelques années : de plus en plus de jeunes subissent des accidents vasculaires cérébraux (AVC).

Sur ce cliché, Eloïse Tremblay Beauséjour, chef de service; Jacinthe Cloutier, directrice de proximité pour le CIUSSS-MCQ, ainsi que Paul-Antoine Beaudoin, chef de l’Unité de réadaptation fonctionnelle intensive. (Photo Lise Tremblay)

«Présentement, on s’occupe d’un jeune homme âgé dans la vingtaine qui en a fait un. Il étudie à l’université. C’est le genre de situation qui nous touche beaucoup, parce qu’ils sont dans la force de l’âge», communique M. Beaudoin, qui travaille au centre depuis 13 ans.

Des conditions médicales non diagnostiquées, comme le diabète ou la haute pression, feraient partie des explications. «Pour sensibiliser les gens, on a décidé de travailler en amont, en martelant le message des saines habitudes de vie», informe-il.

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