Projet de loi 19 : des réactions mitigées dans le milieu de la restauration

FÉLIX GALLANT
Projet de loi 19 : des réactions mitigées dans le milieu de la restauration
Olivier, un jeune employé Chez Louis poulet et pizza de Saint-Nicéphore. (Photo : Ghyslain Bergeron)

DOSSIER. À quatre mois de l’entrée en vigueur du projet de loi 19, qui imposera l’âge minimal de 14 ans et plus pour travailler, les opinions sont plutôt partagées dans le milieu de la restauration de Drummondville qui emploie de nombreux jeunes âgés de 13, 14 et 15 ans.

Que ce soit chez Scores, Mikes ou bien Boston Pizza, les réactions vont bon train, alors que certains employeurs devront, dans les prochains mois, se départir de leurs jeunes employés ou réduire leurs heures.

C’est ce que vit présentement le commerce Boston Pizza, qui compte dans ses rangs deux employés syriens âgés d’environ 14 ans. La directrice générale, Sonia Bédard, se dit contre le projet de loi 19 et explique sa position par le fait que les deux adolescents n’ont pas le choix de travailler pour répondre aux besoins familiaux. «Le salaire va directement à la famille au complet. Pour eux, d’être obligés de faire moins d’heures, ça les pénalise beaucoup», s’attriste-t-elle.

Même son de cloche chez Scores, alors que le propriétaire, Georges Papacostas, est contre les nouvelles mesures annoncées par le ministre Jean Boulet. À ce jour, il n’a aucune idée de la façon dont le gouvernement caquiste va s’y prendre pour gérer la situation.

Le restaurant exige toujours une autorisation parentale pour embaucher des jeunes de 14 ans et moins. À ses yeux, la décision devrait revenir aux parents et non au gouvernement quant à envoyer les jeunes adolescents au travail.

Points positifs du projet de loi 19

Bien qu’il y ait plusieurs restaurateurs en désaccord, ce n’est pas le cas de tout le monde. La directrice du restaurant St-Hubert, Mahyka Camirand, est d’avis que les jeunes devraient prioriser l’éducation avant le travail. «J’ai déjà eu une situation où le parent voulait que son jeune fasse du 40 heures par semaine avec le secondaire, mais non, on va tout le temps prioriser le jeune et l’école avant tout», raconte la dame.

Le gérant de Toujours Mikes, Anthony Martin, n’entrevoit pas de difficultés liées à l’application du projet de loi 19, qui entrera en vigueur dès la prochaine rentrée scolaire. (Photo Félix Gallant)

Au Pacini, le règlement est clair : il n’y a pas de jeunes sous l’âge de 14 ans qui sont engagés. Pour la gérante Sophie Tétreault, le gouvernement Legault prend une bonne décision de mettre en place le projet de loi 19, car l’école «est plus importante» et elle veut éviter le décrochage scolaire.

Avantages du travail sur l’enfant

Parlant de développement personnel, multiples restaurants sont d’avis que le travail peut avoir un impact positif sur l’enfant. «Ça donne aux enfants une certaine liberté de pouvoir s’acheter des choses et avoir sa propre carte. Je pense que c’est toujours ça qu’on recherche quand on est jeune de pouvoir être autonome et de s’acheter ses choses soi-même sans devoir demander de l’argent à papa et maman», illustre Mme Camirand, se mettant dans la peau d’un adolescent.

Chez Toujours Mikes, le gérant de l’endroit, Anthony Martin, croit que le principal avantage du travail est que l’enfant apprend vraiment ce qu’est le marché du travail en plus de l’utilité d’aller à l’école. «Le travail n’est pas censé t’enlever l’envie d’aller à l’école», précise-t-il.

Conséquences à prévoir

Que l’on soit pour ou contre, le projet de loi 19 pourrait amener des contrecoups aux restaurateurs qui devront nécessairement réajuster les horaires. C’est du moins le cas du Boston Pizza. Il est même possible que le restaurant doive ferme ses portes une journée par semaine. «Présentement, j’ai comblé mon manque de personnel et je peux ouvrir sept jours sur sept. Par contre, s’ils m’enlèvent ces deux employés-là [les jeunes Syriens], je vais peut-être être obligée de fermer une journée», se désole la directrice générale.

Portrait des commerçants

Chez les commerces et épiceries, le constat est totalement différent. Ceux-ci n’embauchent que des adolescents âgés de 14 ans et plus. Que ce soit chez Canadian Tire ou bien Super C, ces entreprises n’ont pas d’employés sous l’âge en question et respectent le nombre d’heures pour leurs quelques jeunes soldats. Donc, pour ceux-ci, le projet de loi 19 n’a pas d’impact.

Pénurie de main-d’œuvre

Le dernier portrait de l’année 2022 sur la situation économique des commerces de Drummondville, réalisé par la Société de développement économique de Drummondville, a été rendu public le 3 avril. L’une des informations que ce rapport dévoile est que 56 % des entreprises ont eu de la difficulté à trouver du personnel, au courant de l’année.

Cela a d’ailleurs été le cas du centre-ville de Drummondville où quelques restaurants ont été durement touchés par l’absence de main-d’œuvre. C’est pourquoi le milieu de la restauration s’est vu être obligé de fermer quelques jours durant les vacances de la construction où il a été compliqué de trouver des employés pour garder leur restaurant ouvert.

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