Le Centre collégial d’expertise en gérontologie participe à une recherche internationale

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Par Emmanuelle LeBlond
Le Centre collégial d’expertise en gérontologie participe à une recherche internationale
Le CCEG|CCTT est le seul centre de recherche collégial spécialisé en gérontologie au Québec. (Photo : Ghyslain Bergeron)

GÉRONTOLOGIE. Trois membres de l’équipe du Centre collégial d’expertise en gérontologie du Cégep de Drummondville (CCEG|CCTT) partageront cette semaine les premiers résultats du volet québécois de la Recherche internationale sur les droits des personnes âgées en situation de pandémie de COVID-19 (RIDPA), une clientèle qui a subi les contrecoups des mesures sanitaires.

Nathalie Mercier, Marie-Ève Bédard et Rosalie Lacasse participent aux rencontres internationales du Réseau d’étude international sur l’âge, la citoyenneté et l’intégration socio-économique (REIACTIS), coorganisées par la Chaire internationale Sociétés inclusives et avancée en âge (SIAGE).

L’événement se déroule à Strasbourg du 7 au 10 mars, où plusieurs activités figurent à la programmation. Entre autres, la journée de présentation des résultats intermédiaires de RIDPA réunira une quarantaine de chercheurs, provenant de 18 pays et quatre continents. Cette recherche internationale s’intéresse aux effets de la pandémie de COVID-19 sur les droits des personnes âgées, dont l’accès aux soins, la liberté de circulation, le droit de visite et à la vie sociale ainsi que le consentement aux décisions.

«L’enjeu principal de ce projet, qui est coordonné par Jean-Philippe Viriot Durandal, est d’identifier les manières de prévenir les discriminations par l’âge dans la lutte contre la COVID et d’intégrer des critères d’équité intergénérationnelle dans les décisions politiques durant et après la pandémie», soutient Marie-Ève Bédard, chercheuse principale au Centre collégial d’expertise en gérontologie et du projet RIDPA Québec.

Dans le cadre de la recherche, le Centre collégial d’expertise en gérontologie avait un mandat précis, celui de brosser un portrait national. Une équipe formée de quatre personnes a planché sur le projet. «On a fait une revue des politiques publiques concernant la COVID-19 et les droits des personnes aînés en situation de pandémie. Ensuite, on a réalisé une revue des médias en analysant trois supports, soit La Presse, Le Devoir et le Journal de Montréal. Un total de 156 articles a été analysé. Finalement, on a fait 11 entrevues individuelles auprès des acteurs concernés», explique Marie-Ève Bédard.

Analyse préliminaire

Une analyse préliminaire des résultats a été effectuée. Selon l’équipe, les mesures sanitaires qui ont été mises en place par le gouvernement du Québec ont révélé un «non-respect de l’autodétermination des personnes aînées et de leur liberté individuelle».

Les résidents des milieux de vie collectifs ont été le plus brimés dans leurs droits, alors qu’ils ont subi plusieurs restrictions. «Par exemple, il y a des résidences privées pour aînés (RPA) qui ont isolé des résidents dans leurs chambres et leurs appartements pendant plusieurs semaines. Parallèlement, ceux qui vivaient à leur domicile avaient le droit de marcher à l’extérieur et recevoir leurs proches selon les directives», indique Rosalie Lacasse, professionnelle de recherche au Centre collégial d’expertise en gérontologie du projet RIDPA Québec.

Règle générale, la perte de ces libertés a entraîné diverses conséquences auprès de cette clientèle, dont une diminution de leur qualité de vie en ayant le sentiment d’être prise en otage, une sédentarité qui provoque des problèmes de marche et d’équilibre ou une incapacité de s’alimenter de façon autonome.

«Sur le plan neurocognitif ou de la santé mentale, la perte de contact social et le manque de stimulation cognitive ou intellectuelle engendrent des difficultés à reconnaître des gens et à s’orienter dans le temps et l’espace. Il y a même des personnes aînées qui ont développé une forme de paranoïa, une détresse psychologique ou une perte de notion de la réalité», fait savoir la chercheuse principale.

D’après l’équipe de recherche, la crise sanitaire a révélé des failles dans l’organisation des milieux de vie collectifs comme les centres d’hébergement de soins de longue durée (CHSLD) et les RPA, tout comme l’insuffisance des services de soutien à domicile.

De plus, le gouvernement provincial a ignoré la diversité du vieillissement en appliquant des mesures uniformes pour toutes les personnes âgées, peu importe leur situation, soutient-elle. «L’État, inconsciemment ou non, a mis en exergue une vision selon laquelle toutes les personnes aînées sont semblables, vulnérables et incapables de prendre part au combat contre le virus.»

Marie-Ève Bédard insiste sur l’importance d’intégrer les citoyens du troisième âge dans les prises de décisions. «C’est important de donner une voix aux personnes aînées. Il existe plusieurs regroupements qui défendent leurs droits. Pourquoi ne pas les consulter pour les mesures qui les concernent? Ça va peut-être être plus en cohérence avec leurs besoins.»

Quelques bons coups ont été observés par l’équipe dans les milieux de vie collectifs. «Dans l’adversité naît toujours une forme d’humanité et d’innovation. Il y a de bonnes pratiques qui ont été mises en place comme les préposés qui allaient porter des chariots à la porte des résidents ou les musiques au balcon», souligne-t-elle.

Place au partage

Grâce aux rencontres internationales, la délégation québécoise partagera le fruit de son travail avec ses pairs afin de croiser les données. «L’objectif est de voir les différences et les similitudes entre les pays et proposer des solutions pour l’avenir.»

En parallèle, l’équipe prendra part à des tables de discussion sur différentes thématiques. La chercheuse au Centre collégial d’expertise en gérontologie Julie Castonguay sera également présente.

Aux yeux de Marie-Ève Bédard, il s’agit d’une expérience enrichissante pour le Centre collégial d’expertise en gérontologie. «C’est majeur de faire partie d’un réseau de recherche francophone international comme le RIACTIS. La recherche sur le vieillissement est souvent anglophone. C’est le fun de pouvoir créer des ponts avec différents chercheurs à travers le monde. C’est une vitrine incroyable.»

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