Dominic Tessier a toujours le feu sacré

Dominic Tessier a toujours le feu sacré
Dominic Tessier est officiel dans la LHJMQ depuis maintenant 16 saisons. (Photo : archives, Ghyslain Bergeron)

HOCKEY. Le métier d’arbitre est sans doute l’un des plus ingrats dans le monde du sport. À sa 16e saison dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ), Dominic Tessier a toujours le feu sacré.

Durant sa jeunesse, Dominic Tessier ne semble pourtant pas prédestiné à troquer son bâton pour un sifflet. Évoluant au sein d’une équipe midget AA, le jeune Drummondvillois pratique un style de jeu intense, parfois à la limite de la légalité. Un jour, un responsable local approche les joueurs de son équipe afin de leur proposer une formation en arbitrage.

«À l’époque, c’était un peu comme aujourd’hui : il y avait un manque d’officiels. La relève se faisait rare, raconte Dominic Tessier. Pour ma part, je ne m’étais jamais intéressé à l’arbitrage, mais j’ai quand même décidé d’essayer ça. Dans mon équipe, on est quatre à avoir tenté l’expérience. Une vingtaine d’années plus tard, on est encore dans le milieu.»

Dominic Tessier lors d’un récent match entre l’Armada et les Voltigeurs au centre Marcel-Dionne. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Ayant commencé à arbitrer des matchs dans le hockey mineur, Dominic Tessier grimpe rapidement les échelons. À chaque étape, le jeune officiel se démarque du lot.

«Au début, on arbitrait au niveau atome ou novice, pour se faire la main. On était collé à des vétérans. Après, il y a une espèce de sélection, comme pour les joueurs de hockey. Tu commences dans ta ville, puis tu fais parler de toi pour les bonnes raisons. Tu tombes au niveau régional. Ensuite, on a fait des tournois de sélection et c’est le comité provincial qui vient te chercher. À chaque niveau, tu dois performer. Tu dois faire tes preuves.»

À l’âge de 20 ans, Dominic Tessier doit faire un choix entre sa carrière de joueur dans une équipe junior AA et son rôle d’arbitre sur la scène provinciale. Poursuivant son cheminement, il est recruté par la LHJMQ en 2007, d’abord dans un rôle de juge de lignes, puis dans un rôle d’arbitre dès 2009.

Aujourd’hui devenu un vétéran respecté, Dominic Tessier a récemment franchi le cap des 500 matchs en carrière dans le circuit Courteau. L’homme de 38 ans se dit fier de sa longévité dans ce milieu. «C’est une belle étape. Je peux dire que j’ai roulé ma bosse dans cette ligue-là. J’y ai mis mon empreinte. Pour un gars qui n’avait jamais pensé arbitrer, c’est assez cocasse d’avoir continué aussi longtemps.»

Gérer la critique

L’homme au chandail rayé identifie l’instinct, l’impartialité et la constance parmi les qualités primordiales pour exercer ce métier.

«Il y a des règles de positionnement, mais je pense qu’il faut d’abord avoir du flair. Il faut que tu saches où ça va passer. Tu dois être capable de lire le jeu pour être en mesure de prévoir ce qui va arriver. L’intégrité aussi, c’est ultra important, en ce sens qu’un match après l’autre, c’est une nouvelle affaire. Il faut que tu sois préparé et professionnel dans ton approche. Puis, il y la constance dans tes appels. Chaque arbitre est différent, mais tu dois avoir une continuité d’une période à l’autre et d’un match à l’autre.»

Dominic Tessier. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Bien sûr, l’aspect physique demeure un élément essentiel dans le métier. «Le jeu va de plus en plus vite, c’est rendu ultra rapide. Aujourd’hui, les joueurs s’entraînent à l’année. On n’a pas le choix d’être en forme pour être capables de les suivre. Heureusement, le système à quatre arbitres nous aide. Ça a permis de rallonger des carrières», indique celui qui se garde en forme en jouant au sein d’une ligue de garage.

Comme leurs confrères dans les autres sports, les arbitres de la LHJMQ sont confrontés à la critique au quotidien, qu’elle provienne des joueurs, des entraîneurs, des partisans ou des analystes. Dominic Tessier dit bien composer avec cette réalité.

«Je n’aurais pas fait toutes ces années-là si je n’avais pas une bonne carapace. Je gère bien la critique, mais l’expérience ne s’achète pas. Ça m’atteint beaucoup moins aujourd’hui qu’à mes débuts. Avec le temps, il y a un respect qui se bâtit», explique-t-il.

À ses débuts dans le métier, Dominic Tessier s’est d’ailleurs fait tester par des entraîneurs. À un certain moment, il a toutefois établi ses limites. «Aujourd’hui, ce sont plus des relations que j’ai bâties avec les coachs au fil des ans. On se connaît. Ils savent jusqu’où ils peuvent aller avec moi. Ce sont des relations qui se travaillent, un peu comme dans un couple», image celui qui arbore le numéro 27.

«Quant aux joueurs, il y en a beaucoup qui sont très arrogants en arrivant dans le junior. Ce sont des vedettes qui ont fait la pluie et le beau temps toute leur vie. Au fil du temps, ils maturent et ils évoluent. À la fin de leur stage junior, à 20 ans, la différence est marquée. On peut avoir des discussions avec eux.»

Des sacrifices au quotidien

Arbitrant entre 35 et 45 matchs par saison aux quatre coins du Québec, de Rouyn-Noranda à Baie-Comeau en passant par Chicoutimi, Dominic Tessier passe de nombreuses heures sur la route, souvent durant la fin de semaine.

«Un gros avantage que j’ai sur mes confrères, c’est que je suis très bien situé. Ça explique ma longévité. Il y a plusieurs villes qui sont proches, mais ça reste beaucoup d’heures passées à l’extérieur de la maison. Ça fait partie de notre quotidien.»

Dominic Tessier en compagnie de sa conjointe Krystel Fortier et de leurs enfants Julia et Maxim. (Photo : Johany Jutras)

Dans sa vie de tous les jours, Dominic Tessier travaille au sein du département des ventes chez Planchers de bois franc Wickham. Entre son emploi, sa passion et sa famille, le père de deux fillettes de 5 et 6 ans jongle avec un horaire chargé. «C’est une dynamique. À travers les cours de gymnastique, les devoirs et tout le reste, ma blonde en prend énormément. Une chance qu’elle est là! L’arbitrage a toujours fait partie de notre vie, mais on y va une saison à la fois. Chaque année, c’est d’un commun accord qu’on décide si je continue ou non.»

Bien conscient des sacrifices que sa famille s’impose, Dominic Tessier n’est toutefois pas encore tout à fait prêt à ranger son sifflet. «J’en ai pas mal plus de fait qu’à faire, mais tant que j’ai du plaisir, je vais continuer. Ce qui me tient là, c’est le goût de la game. Les arbitres ont les meilleurs sièges dans l’aréna. On voit des joueurs exceptionnels comme Nathan MacKinnon, Sean Couturier, Nikita Kucherov ou Samuel Girard.»

Car à la base, Dominic Tessier demeure un mordu de hockey.

«De voir le jeu de proche, de faire partie de cette effervescence et de cette pression-là, on dirait que j’en ai encore besoin. Le sentiment que j’ai quand je dois faire un appel en fin du match sur un jeu serré, je ne retrouve pas ça nulle part ailleurs. C’est un feeling indescriptible.»

Une question de culture

Au moment où une pénurie d’arbitres fait rage au Québec, forçant l’annulation de matchs dans le hockey mineur, Dominic Tessier souhaite que la profession soit plus respectée.

«Je ne comprends pas qu’un jeune qui veut s’impliquer et qui fait de son mieux comme arbitre, se fasse critiquer ou intimider par des adultes. Je trouve ça aberrant. Pourtant, il y a des campagnes de sensibilisation qui se font pour améliorer notre sport. Ça a été toléré depuis trop longtemps. Il y a tellement eu de laxisme qu’aujourd’hui, on vit le retour du balancier.»

Dominic Tessier. (Photo d’archives, Ghyslain Bergeron)

À ce sujet, Dominic Tessier apprécie le discours du directeur général de Hockey Québec, Jocelyn Thibault, qui souhaite changer la culture du hockey mineur.

«Pour une fois, on sent qu’on veut s’attaquer aux racines du problème. C’est la première fois qu’il y a un réel désir de changer les choses. Il faut qu’on laisse nos jeunes avoir du plaisir! Les parents mettent trop de pression. Ça reste un jeu.»

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