Le projet de salle de spectacle au centre-ville divise le conseil municipal

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Par Marilyne Demers
Le projet de salle de spectacle au centre-ville divise le conseil municipal
La conseillère municipale Cathy Bernier a lu la résolution qui a divisé le conseil municipal. Celle-ci a reçu l’appui de huit autres conseillers municipaux. (Photo : Archives - Ghyslain Bergeron)

CULTURE. La majorité des élus municipaux de Drummondville ont réitéré leur appui à la Maison des arts Desjardins dans le dossier de la salle de spectacle multifonctionnelle au centre-ville, divisant ainsi le conseil municipal pour une rare fois.

Lors de la séance du conseil municipal lundi, neuf conseillers et conseillères ont voté en faveur d’une résolution d’appui afin que les élus maintiennent le mandat donné à la Maison des arts pour concrétiser le projet de la salle de spectacle multifonctionnelle au centre-ville et que l’administration municipale puisse appuyer les démarches en ce sens.

«Nous avons, au cours des dernières semaines, pris un pas de recul dans l’intérêt de notre communauté. Toutefois, je crois qu’il est important de faire connaître notre appui à notre mandataire, la Maison des arts, et nos employés municipaux concernés face à notre désir de cheminement de ce projet-là», a indiqué la conseillère du district 12, Cathy Bernier, avant de lire la résolution, laquelle a été appuyée par le conseiller et maire adjoint, Yves Grondin.

Le conseiller du district 2, Jean Charest a été le premier à s’y opposer. «J’aurais aimé ça qu’on puisse en discuter en atelier de travail. Je considère que c’est amené comme ça et j’aurais aimé ça en discuter. En ce sens, je vais voter contre.»

Alain D’Auteuil, qui s’était exprimé par lettre ouverte dans L’Express, a répété que le projet devait faire l’objet d’une consultation publique. Il a voté contre la résolution. «Il y a d’autres salles au centre-ville et il n’y a pas eu de consultation», a-t-il mentionné.

La conseillère Annick Bellavance s’est montrée en faveur. «La Maison des arts, avec sa salle cabaret, vise une clientèle de 40 ans et moins. C’est très important pour le dynamisme de notre ville et de notre centre-ville. Il y a un important vieillissement de la population qui s’accélère en ce moment. C’est environ une personne sur trois, en 2036, qui aura 65 ans et plus. Le but de cette salle de spectacle est de compléter l’offre de service diversifié qu’on a déjà à Drummondville à tous les niveaux : sportifs, culturels, loisirs, et même scolaire.»

«Pour moi, ce projet a de multiples avantages pour la qualité de vie de nos citoyennes et citoyens, que ce soit pour les arts et la culture, l’amélioration continue du centre-ville, l’attraction de main-d’œuvre dont nos entreprises ont grandement besoin. Je pense que c’est un projet important avec une forte valeur ajoutée, qui peut se faire en la capacité de payer des contribuables», a renchéri John Husk, avant de voter pour.

Le bâtiment qui abritait autrefois la pharmacie Jean Coutu figurait parmi les options pour le projet de salle de spectacle multifonctionnelle. (Photo d’archives – Ghyslain Bergeron)

Stéphanie Lacoste a poursuivi en ce sens : «Le pas de recul qu’on a fait a été nécessaire parce qu’on a vu une énorme augmentation des coûts. Ce que j’en comprends, c’est simplement de continuer l’analyse des dossiers pour qu’il puisse y avoir un projet pour le centre-ville. Il m’apparait que c’est une tradition un peu à Drummondville de préparer nos dossiers, si jamais il y a une opportunité qui se présente et à ce moment-là, on peut déposer [le projet]. D’autant plus que le réseau scolaire est venu cogner à notre porte quelques fois parce qu’ils ont besoin d’un lieu où la relève artistique puisse se produire et ce lieu, malheureusement, n’est pas existant.»

Le conseiller du district 1 a également pris la parole en faveur de la résolution. «Je pense que pour créer une redynamisation au centre-ville de Drummondville, ça prend un projet rassembleur. Je suis d’accord à ce qu’on poursuive la réflexion. J’ai toujours pensé qu’un des facteurs de croissance économique et sociale d’un territoire, d’une ville ou d’un centre-ville est lié à la qualité de vie au niveau culturel. La culture c’est essentiel pour son identité, pour sa fierté également. Il ne faut pas voir ce projet comme étant en compétition avec d‘autres acteurs. Je pense qu’il faut le prendre avec un angle de complémentarité», a affirmé Dominic Martin.

La conseillère représentant le secteur du centre-ville a aussi démontré son appui envers le Maison des arts. «Je crois à ce projet tout en respectant la capacité de payer de nos citoyens. Je crois que c’est important qu’on poursuive ce qu’on avait décidé dans la planification stratégique pour ce projet-là. Peut-être qu’il sera fait dans d’autres formes, mais, je crois fermement que c’est important pour la synergie et la dynamisation du centre-ville et que tous les commerçants et citoyens pourront en bénéficier», a fait valoir Catherine Lassonde.

Le conseiller Daniel Pelletier a été le troisième à voter contre la résolution. «Un cabaret, on en a plusieurs ici à Drummondville. On en a déjà compté 13 à 17 qui ont des genres de petits cabarets. Il y a même Le Royal qui a refait sa salle pour faire un cabaret. Il y a l’Espace Mandeville qui a au moins 300 places. Moi je ne ferai pas un cabaret pour n’importe quel prix. Nous, on aide le citoyen et je travaille pour le citoyen. Je dis non pour tout de suite.»

«Je suis content de voir que des gens croient encore à ce projet-là et que le projet est encore vivant. Je pense que ça va être les citoyens et citoyennes qui vont en sortir gagnants. Il faut avoir confiance en l’avenir et je pense que ce n’est pas un projet qui va se réaliser demain, mais je pense qu’on sera heureux dans trois, quatre ou cinq ans d’avoir ça à Drummondville. L’ensemble de la population va en profiter, mais aussi l’ensemble des autres cabarets», a pour sa part commenté le conseiller Alain Martel.

William Morales, qui est aussi délégué aux arts et à la culture, a dit vouloir poursuivre la réflexion. «Je trouve que c’est positif de continuer dans une réflexion qui pourrait venir donner un impact très important pour la qualité de vie des citoyens de Drummondville, pour les commerçants du centre-ville et pour continuer d’être créateur du bonheur et de la qualité de vie. On va continuer à réfléchir dans ce sens-là et être prêt à saisir les opportunités.»

Discuté au préalable
Après avoir entendu les commentaires des membres du conseil municipal, le maire Alain Carrier semblait visiblement surpris et agacé que le sujet n’ait pas été discuté lors de la réunion préparatoire de travail lundi après-midi.

«On m’avait dit d’entrée de jeu de vous tous autour de la table que chaque sujet étant apporté au conseil municipal devait être discuté au préalable en atelier. Ce soir, en votant pour cette résolution de votre part, ça me confirme que les séances d’atelier ne seront plus nécessaires. On abordera dorénavant – je vais vérifier la technicalité de ça – sujet après sujet à la séance tenante, a-t-il indiqué. Ce que je comprends, c’est qu’on règle les affaires ici, sans que personne n’ait pu en discuter, sauf ceux qui ont joué au téléphone cette semaine et qui se sont appelés pour s’appuyer un l’autre.»

Alain Carrier, maire de Drummondville. (Photo Ghyslain Bergeron)

Une semaine auparavant, le maire de Drummondville avait mentionné dans les médias qu’il fermait la porte au projet de salle de spectacle multifonctionnelle au centre-ville. «Ma position demeure la même. Les gens n’en veulent pas», a soutenu le maire Carrier en mêlée de presse, ajoutant que les commentaires défavorables sur les réseaux sociaux ainsi que le sondage mené auprès de 2 894 répondants dans le cadre du plan de relance municipal témoignent de l’impopularité du projet au sein de la population.

Lors de la période de questions des citoyens, le conseiller Yves Grondin, qui n’avait pas élaboré sa position plus tôt, a pris parole à ce sujet.  «Je vous rappelle que le plan de relance demandait aux gens d’inscrire des projets dans le temps de 24 mois parce qu’un plan de relance vise des activités à très court terme pour être capable de relancer quelque chose qui a été brisé. C’est tout à fait normal qu’un projet qui ne peut pas se réaliser dans le temps de deux ans n’ait pas été retenu par les citoyens parce que déjà là, ça aurait été impossible de rentrer dans le plan de relance la construction de la nouvelle salle. La résolution ne dit pas où ni quand ça doit se réaliser. On dit juste qu’il faut continuer à regarder les opportunités qui pourraient se présenter», a-t-il mentionné.

Se disant favorable à ce que les élus se prononcent sur les différents dossiers, Alain Carrier critique la façon dont la majorité des élus ont choisi de le faire lundi soir. «J’espère que c’est la dernière fois qu’ils font ça [sans en avoir discuté en réunion préparatoire de travail]. En tout cas, moi je ne le ferai pas. On ne se cachera pas que je ne détiens pas la majorité autour de la table. Je vais continuer ce que j’ai fait depuis le début, de naviguer dans le bateau avec ces gens-là et d’essayer de faire de mon mieux pour garder le quorum et ne pas se chicaner le plus possible.»

Rappelons que le projet de la salle de spectacle multifonctionnelle au centre-ville est discuté depuis 2016.

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