Le Collège Saint-Bernard réclame de la cohérence

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Par Lise Tremblay
Le Collège Saint-Bernard réclame de la cohérence
Dominic Guévin, directeur général du Collège Saint-Bernard. (Photo : Archives - L'Express)

RENTRÉE. Le directeur général du Collège Saint-Bernard (CSB) de Drummondville, Dominic Guévin, est en furie. Il réclame de la cohérence entre l’approche de la Santé publique et celle du ministère de l’Éducation et, surtout, des réponses à ses nombreuses questions. C’est que des cours à option, dont des programmes de sports, sont carrément en danger.

Dans un vibrant plaidoyer au bout du fil, M. Guévin a indiqué avoir mis sur papier au moins 50 scénarios depuis le mois de juin pour s’assurer d’une rentrée harmonieuse pour les élèves. Ces scénarios, transformés rapidement en boules de papier, ont tous été lancés dans une poubelle, puisque les consignes gouvernementales changent rapidement.

Et ce jeudi matin n’a pas fait exception à la règle. Participant à une conférence téléphonique avec Éric Blackburn, le sous-ministre de l’Éducation, Dominic Guévin n’a pu que constater que ce ministère est «en déroute» et qu’il est passé maître dans l’art d’esquiver les questions importantes «du terrain».

«On vit quelque chose actuellement de très aberrant. Il y a vraiment une dichotomie entre le discours de la Santé publique régionale et celui du ministère de l’Éducation. Du côté de la Santé publique, on sait où on s’en va. Tout est clair et limpide. Le répondant régional est venu au Collège et on s’est donné un plan de match dès le mois de juin. Mais voilà que le ministère de l’Éducation nous impose des règles, qui concernent la santé, et qui sont tout à fait illogiques. Par exemple, les bulles-classes. Le ministère nous impose de créer des groupes-classes avec lesquels il n’y aura pas de distanciation physique entre les élèves. Cette partie-là est claire et on va être capable de la faire appliquer. Le problème concerne les cours à options et au CSB, ils ne commencent pas en secondaire 4 comme le croit le ministre, mais en première année», met en contexte M. Guévin, en précisant qu’il ne parle pas au nom du Regroupement établissements d’enseignement privés de la Mauricie et du Centre-du-Québec, une organisation qu’il préside.

Comme il l’explique, pour être en mesure d’offrir des cours à option aux élèves, comme de la chimie, de la musique ou des mathématiques, il faut nécessairement réunir des élèves d’autres classes pour être en mesure de constituer un groupe.

En juin dernier, la Santé publique régionale avait trouvé une «solution logique» en permettant au collège (et à bien d’autres) d’asseoir dans un côté de la classe un premier groupe venant d’une classe-bulle puis de l’autre, des élèves venant d’un autre groupe.

«On est donc parti de ce principe-là en nous disant que ç’a avait du bon sens, d’autant plus que les jeunes allaient porter le masque durant leurs déplacements. Mais là, le ministère de l’Éducation nous demande d’être très strict sur les groupes-classes et on ne peut plus mélanger d’élèves. Un paquet de cours à option est en péril», ajoute le directeur général du CSB.

Ce qui est impossible à comprendre, aux yeux de M. Guévin, c’est que le ministère de l’Éducation autorise les enfants d’une classe-bulle à manger dans une cafétéria dans laquelle il y aura d’autres élèves.

«Si des élèves peuvent manger ensemble à un mètre de distance pourquoi ne peuvent-ils pas suivre un cours de chimie ensemble cinq minutes après, quand la cloche sonne? C’est totalement incohérent», s’indigne-t-il.

«On a présentement un ministère de l’Éducation qui nous tire dans le pied alors que la direction de la Santé publique avait tout réglé nos affaires», insiste-t-il.

Équipes sportives

Cette décision affecte évidemment toutes les classes sportives du Collège Saint-Bernard.

«Une équipe de handball, par exemple, ne provient généralement pas d’une seule classe. Je peux avoir des athlètes répartis dans plusieurs groupes et là, le ministre nous dit de les mettre tous dans un seul groupe. Ça ne fonctionne pas comme ça, car en plus, il y en a qui ont des maths enrichies, des maths régulières et autres», poursuit M. Guévin.

Le ministère se serait défendu ce matin, lors de la conférence téléphonique, avec le fait que la ligne directrice des classes-bulles est connue depuis le mois de juin dernier.

«C’est faux, affirme le directeur. Le ministère de l’Éducation a envoyé le 12 août toutes les directives concernant les sports-études. On nous avait dit que les étudiants des sports-études pouvaient se mélanger parce qu’il existe une fédération. Là, ça ne marche plus. Qu’est-ce que je fais faire avec mes 350 élèves qui sont en sports-étude? Je vais faire quoi avec eux pendant les périodes où ils étaient censés être en entraînement? Je n’ai pas prévu d’éducateur. On m’a dit ce matin de les retourner à la maison durant ces périodes, mais ne fait aucun sens de les regrouper dans un autobus, d’autant plus que j’ai des élèves qui habitent à Richmond, à Sorel et ailleurs.»

La situation est très complexe, voire anxiogène, pour les directions d’école, d’autant plus que le Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ) prévoit repousser toutes les activités sportives au 1er octobre prochain.

«Si les cas [de COVID-19] se mettent à monter, c’est clair que cette date va être repoussée et on va se retrouver avec des étudiants orphelins qui ne pourront pas suivre le parcours scolaire qu’ils souhaitent avoir», déplore Dominic Guévin.

Enfin, le directeur met en doute l’efficacité du ministère de l’Éducation, qui a tardé à clarifier les règles entourant la rentrée scolaire.

«Le ministère de l’Éducation nous a envoyé beaucoup de communications dans une période donnée, puis il y a eu un silence radio de trois semaines, dit-il. J’avais pris soin de faire entrer mon personnel de direction le 3 août pour nous préparer, mais nous n’avons absolument rien reçu durant cette semaine-là et nous avons tapé du pied. Il a fallu attendre jusqu’au 10 août.»

Puisque les enfants amorceront véritablement leur année scolaire le mardi 1er septembre, Dominic Guévin réclame haut et fort maintenant que le ministère de l’Éducation réponde à l’ensemble des questions qui demeurent en suspens. Et il y en a plusieurs.

Les questions de Dominic Guévin au ministre de l’Éducation

  • Est-ce que les équipes scolaires (ex. RSEQ, LHPS) peuvent tenir des entraînements le soir ou la fin de semaine avec des élèves provenant de différents groupes?
  • Si la journée d’un élève en sport-études est écourtée et qu’il est sous la responsabilité juridique d’une fédération, peut-il faire ses entraînements en après-midi en présence d’élèves provenant de différents groupes?
  • Est-ce que les écoles ont le droit de louer des espaces à des municipalités, à des mandataires, à des clubs sportifs ou à des OSBL qui ont une offre de services de jour et qui regroupent des élèves provenant de plusieurs classes ou écoles?
  • Est-ce que les écoles à volets particuliers qui perdraient définitivement des inscriptions en raison de la paralysie des options décloisonnées seront remboursées par le ministère ?
  • Est-ce que les crédits que les écoles devront faire pour les activités/sports/options non tenues seront remboursés par le ministère?  
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