Les agriculteurs veulent plus de souplesse sur le plan environnemental

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Par Frederic Marcoux
Les agriculteurs veulent plus de souplesse sur le plan environnemental
Patricia Bruegger. (Photo : Frédéric Marcoux)

AGRICULTURE. Plusieurs agriculteurs de la région réclament des changements sur le plan environnemental. La question de l’épandage du lisier est récurrente depuis quelques années. Selon des intervenants du milieu, la réglementation actuelle est inadéquate en raison des changements climatiques et des nouvelles pratiques agricoles.

La période d’épandage permise au Québec par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) est du 1er avril au 1er octobre. La loi prévoit toutefois qu’une autre période peut être autorisée par un agronome. Or, si le producteur omet de soumettre une demande de dérogation, il peut être mis à l’amende. La présidente de la délégation régionale de l’Union des producteurs agricoles (UPA), Patricia Bruegger, estime que Québec devrait apporter des changements pour faciliter la tâche des agriculteurs sur le plan environnemental. Elle appuie sa réflexion sur ce qu’elle a constaté en Suisse, son pays d’origine.

«On a été longtemps sans avoir de latitude pour épandre notre fumier à l’automne. En Suisse, tant et aussi longtemps que le sol n’est pas gelé ou enneigé, on peut l’épandre. On l’a déjà fait le 24 décembre. Si le ministère était un peu plus intelligent au Québec, la date serait changée pour le 1er novembre. C’est complètement stupide, parce qu’il y a certaines journées en octobre qui sont aussi belles qu’en juillet.»

L’agricultrice a déjà expérimenté les conséquences de la loi à ses dépens. Il y a quelques années, alors qu’elle éprouvait de sérieux problèmes de santé, son conjoint avait omis de demander une dérogation pour épandre le lisier, lors d’une belle journée ensoleillée d’octobre.

«On a été chanceux de ne pas avoir eu 5000 $ d’amende, après avoir expliqué qu’on avait oublié de soumettre la demande, alors que je subissais des traitements de chimiothérapie. La fosse était pleine, mais on a tout de même été obligé d’arrêter. On n’a pas été en mesure d’obtenir la dérogation ensuite. Cela a fait que la fosse a débordé tout l’hiver, à cause de l’intelligence du ministère. Québec est beaucoup trop strict.»

Les agronomes doivent s’adapter

Valérie Robert, une agronome qui œuvre depuis près de 15 ans, croit aussi que la loi n’est pas adaptée aux nouvelles réalités.

«Si on recule d’une vingtaine d’années, l’agriculture n’était pas ce qu’elle est aujourd’hui. On cultivait plus de prairies, moins de maïs et moins de soya. C’était une date limite qui pouvait être logique à ce moment. La loi n’a jamais été revalidée par le gouvernement ensuite», explique l’employée du club agroenvironnemental Dura-Sol Drummond.

Cela fait en sorte que la dérogation signée par l’agronome, qui devait être un geste d’exception il y a quelques années, est maintenant la norme. Si bien que les agronomes préparent les différentes autorisations plusieurs mois d’avance pour plusieurs agriculteurs.

«Il y a des pressions récurrentes qui sont faites par l’UPA au ministère de l’Environnement pour réévaluer cette date, informe Valérie Robert. C’est nous les agronomes qui devons nous adapter aux nouvelles réalités de l’agriculture.»

Même si elle qualifie la règle actuelle de «non-sens», l’agronome rappelle qu’elle a comme mission de préconiser le respect de l’environnement. Elle mentionne que pour certains agriculteurs, les structures de stockage du lisier ne sont plus adaptées aux nouvelles réalités.

«S’il y avait 15 ou 20 jours de plus où l’agriculteur pourrait être libre d’épandre, ce serait beaucoup plus facile, convient-elle. Cependant, c’est certain que je ne me rendrai pas au 1er novembre. L’an dernier, le 7 novembre, le sol était gelé.»

Il est interdit d’épandre du lisier sur un sol détrempé, enneigé ou gelé pour éviter que les matières fécales se retrouvent dans différents cours d’eau. Rappelons que la réglementation actuelle contraint l’agriculteur à ne pas épandre plus de 35 % de son lisier après le 1er octobre.

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