«Il faut changer la Régie du logement au complet», soutiennent des propriétaires

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Par Frederic Marcoux
«Il faut changer la Régie du logement au complet», soutiennent des propriétaires
Marcel Thiffault et Gaétan Prévost. (Photo : (Photo Lise Tremblay))

IMMOBILIER. Imaginez vous faire subtiliser des milliers de dollars sans pouvoir espérer revoir votre argent avant quatre ou cinq mois. Ce qui en ferait rager plusieurs est pourtant le quotidien de quelques propriétaires d’immeubles résidentiels à Drummondville.

Deux locateurs d’appartements de la région, Marcel Thiffault et Gaétan Prévost, se sont rendus à L’Express pour dénoncer la réglementation en place au Québec. Après 30 ans dans le domaine, le duo en a assez des mauvais payeurs.

«Il faut changer la Régie du logement au complet. Ça ne fonctionne plus d’aucune manière», tranche Marcel Thiffault, sans aucune hésitation.

En 2014, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ) dénonçait le délai moyen de près de quatre mois au Québec pour un locateur souhaitant expulser un locataire en défaut de paiement. Cinq ans plus tard, les délais se sont accentués à nouveau, puisque Marcel Thiffault a été impliqué dans des situations où les procédures de la Régie du logement ont duré plus de six mois, en raison de la lourdeur des procédures. À ses yeux, les délais élevés, jumelés à l’incertitude d’avoir gain de cause à la Régie du logement découragent plusieurs propriétaires.

«Si la fournaise est brisée et qu’il n’y a pas de chauffage pendant une heure dans l’appartement du locataire, tu vas le savoir et tu vas être en tort. S’il ne te paie pas pendant six mois, la vie est belle et il n’y a pas de problème, ironise Marcel Thiffault. La réglementation n’a pas de logique, ça peut quasiment mettre un propriétaire en faillite. Est-ce qu’il y a beaucoup de monde qui peut se permettre de perdre plus de 3000$ à tout bout de champ ? Non.»

Qui plus est, mauvais payeurs riment fréquemment avec appartement brisé et la facture pour un locateur peut être assez salée.

«Souvent, quand un locataire ne paie pas son loyer, il n’y fera pas attention et tu vas voir des trous dans les murs, déplore Marcel Thiffault. En incluant les coûts de réparation, je peux perdre jusqu’à 10 000 $ par appartement.»

Solution?

Les deux hommes, qui sont propriétaires de près de 250 appartements dans la région, aimeraient voir la réglementation changer pour assurer une certaine sécurité financière aux gestionnaires immobiliers. Ils ont notamment évoqué le fait que le Québec n’exige pas de dépôt de sécurité de la part des locataires, contrairement à certaines autres provinces. En effet, l’Ontario exige aux locataires de verser un dépôt couvrant le premier et le dernier mois du loyer, au moment de signer un bail.

«Il faudrait qu’on ait des dépôts, comme c’est le cas pour d’autres provinces, lance Gaétan Prévost. J’ai déjà vu un locataire qui a payé le premier mois sans vouloir payer ensuite. Ça prendrait un dépôt pour nous assurer une certaine sécurité.»

Le duo doit composer avec une vingtaine de cas problématiques annuellement. Les visites à la Régie du logement se font nombreuses et ne permettent pas d’avoir la certitude de crier victoire pour autant. Les deux propriétaires ne comprennent pas pourquoi personne ne se lève pour changer les choses. Selon les données de la CORPIQ, des propriétaires de loyers québécois ont perdu 220 millions de dollars en raison de mauvais payeurs, en 2015, et 150 millions de dollars en raison des bris.

«Une décision de la Régie du logement, ça ne vaut pas grand-chose, sauf si tu peux procéder à une saisie, convient Marcel Thiffault. Pour ça, tu vas avoir besoin d’un huissier et ça va te coûter encore plus cher. S’il est honnête, tu vas être payé, mais c’est rare. Sinon, c’est fréquent de perdre la trace du locataire et, si tu veux le retrouver, ça coûte encore plus cher.»

Les deux hommes ont l’intention de passer par le député Sébastien Schneeberger pour se faire entendre au gouvernement dans les prochaines semaines.

À Drummondville

Le directeur des affaires publiques de la CORPIQ, Hans Brouillette, a informé L’Express par courriel de la situation pour la région de Drummondville du mois d’avril 2017 jusqu’au mois de février 2018.

«À Drummondville, 693 dossiers ont été ouverts (à la Régie du logement) pour non-paiement en 11 mois. Un total de 1500 cas de non-paiement par année m’apparaît un chiffre conservateur, mais réaliste», a-t-il fait savoir.

Pour l’année 2017 à 2018, 1051 causes ont été enregistrées à la Régie du logement localement, selon un document de l’organisation accessible en ligne.

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