Se battre contre le cancer et le système

Se battre contre le cancer et le système
Claudine Côté et son fils Jean-Philippe Boileau ont traversé plusieurs épreuves tout en restant proches l’un de l’autre. (Photo : Ghyslain Bergeron)

MALADIE. On dit souvent qu’un malheur ne vient jamais seul. Pour Claudine Côté, l’expression est devenue bien réelle. Après un accident de travail, la femme a dû combattre deux cancers et peine aujourd’hui à vivre adéquatement en raison de sa situation financière, faute de soutien pendant sa convalescence.

Toute son histoire commence en 2006 alors qu’elle œuvre comme soudeuse dans une entreprise de Saint-Hyacinthe. Un pont roulant lui es tombé dessus. Elle a été blessée aux pieds en plus de recevoir un coup de chaîne au visage et un morceau sur le trapèze. Même si les dommages physiques n’étaient pas graves, elle a subi un choc post-traumatique. Dès ce moment, elle devient prestataire de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST).

Pendant sa réhabilitation, elle découvre une bosse à la base d’un de ses seins en 2008. Le diagnostic est rapide, le cancer du sein a frappé. La femme de 50 ans est opérée et doit subir plusieurs sortes de traitements, dont la chimiothérapie, l’hormonothérapie et l’immunothérapie.

À ce moment, la situation de Mme Côté est encore acceptable en raison d’une assurance vie qui offre une couverture en cas de maladie grave. Elle termine ses études et trouve un emploi de représentante dans le domaine horticole.

Le temps passe et en 2015, elle peut enfin célébrer sa victoire contre le cancer. Avec ses économies, la passionnée de moto se gâte en achetant une Harley.

Claudine Côté est une passionnée de la moto.

«Je me sens tellement bien sur ma moto. C’est une forme de thérapie. Mais j’ai commencé à avoir mal dans le flanc (droit). Je pensais que c’était parce que j’adoptais une mauvaise posture sur ma moto ou bien qu’une surcharge de travail m’affectait. Le médecin pensait même que les symptômes pouvaient être reliés à la ménopause ou à des pierres au foie», a expliqué Mme Côté.

Après de longs délais, elle obtient finalement un rendez-vous pour une échographie dans une clinique de Granby, en mars 2017.

«Tu sais, quand le médecin te dit de t’asseoir et qu’il faut qu’il te parle… Je connaissais déjà cet air et cette intonation dans sa voix», a décrit Mme Côté.

Une masse cancéreuse de 18 cm s’était bien installée au foie. Un cancer si rare qu’aucun protocole n’existe pour traiter ce type de cancer. Une première série de sept traitements n’a donné aucun résultat. À force de faire plusieurs tests, le médecin, après trois mois, peut enfin annoncer une bonne nouvelle à Mme Côté. La chimiothérapie fonctionne. La masse est maintenant de 8 cm et l’opération est envisagée, ce qui se produit en mai 2018. Elle est maintenant en rémission.

Une peinture sur sa moto lui rappelle qu’elle a vaincu le cancer.

L’endettement

Malgré toutes les embûches, Claudine Côté garde le moral. Appuyée par les encouragements de son fils, elle a tout fait pour garder la tête hors de l’eau.

«Je peux dire que je suis en voie de guérison, mais tout n’est pas rose. J’ai beaucoup de dettes, car comme j’avais déjà reçu des indemnités d’assurances pendant mon premier cancer, je n’avais pas droit à un appui financier cette fois-ci. En juillet 2017, on m’a refusé l’aide de dernier recours, car on me disait que j’avais trop d’acquis. C’est frustrant, car j’ai toujours travaillé (fort) et payé mes impôts. Pour eux, il aurait fallu que je vende ce que j’avais durement acquis», a-t-elle ajouté.

Dans les circonstances, elle a dû quitter son appartement de Drummondville pour s’établir en colocation à Saint-Liboire avec un ami. Du même coup, son fils, qui avait 18 ans à l’époque, a été dans l’obligation de quitter le nid familial.

Jean-Philippe Boileau porte les couleurs de l’équipe de football du Cégep de Drummondville .

Jean-Philippe Boileau s’est perdu au travers les épreuves de sa mère.

«Je me suis occupé d’elle comme je le pouvais pendant 8 ans. Quand je suis parti, j’ai trouvé ça vraiment difficile d’être loin d’elle. Je n’avais plus de confidente et avec le temps, ça me «fessait dans face». J’ai commencé à consommer différentes drogues et j’ai tripé solide l’été dernier pour essayer de me faire un monde à moi. En plus, je voyais bien que ma mère n’arrivait pas à payer les factures. Ça me rongeait. Il m’est arrivé de lui prêter de l’argent, mais je n’en avais pas beaucoup plus qu’elle», a expliqué M. Boileau.

Heureusement, après avoir consulté un intervenant, Jean-Philippe a diminué sa consommation et a repris son entrainement sportif.

«J’ai décidé de tasser la drogue (en partie) pour me concentrer sur le football. Une chance que j’ai ça et que ma mère, à son tour, me soutient. Une chance qu’on s’a», a-t-il lancé.

Le manque d’appui

Si Mme Côté avoue avoir été bien supportée pendant son cancer du sein, elle déplore par contre le manque de ressources en général.

«Il y a des frais qui sont remboursés, mais ce n’est presque rien. On doit voyager beaucoup. Quand on compte l’essence, le stationnement, les repas, même quand on fait attention, ça monte vite. Présentement, je reçois 748 $ par mois. Quand tout est payé, il ne me reste pas grand-chose pour vivre. Une «chance» que j’ai droit à des prestations de CNESST encore, sinon je serais mal prise. On doit se battre contre la maladie et le système, c’est déplorable», a précisé Mme Côté.

De plus, selon Mme Côté, autant que les patients sont suivis pendant les traitements médicaux que lorsque tout est fini, ils sont laissés à eux-mêmes.

«C’est certain que je rencontre mon médecin pour le suivi médical, mais il n’existe pas d’autres appuis. J’aurais aimé avoir accès à un programme de remise en forme. Rencontrer un nutritionniste pour m’aider à me refaire une santé. Allez au gym pour renforcir mon corps et, surtout, briser l’isolement, car dans la maladie, on perd aussi des amis au travers tout le processus», a ajouté Mme Côté.

La quinquagénaire n’espère qu’une chose, revenir dans la région.

«Là, je veux régler mes dettes et reprendre ma vie ici (Drummondville). Je voudrais recommencer à travailler quand j’aurai le feu vert, mais ce ne sera pas facile. Tu sais, quand tu as deux diagnostics de cancer et un cas de CNESST, ce n’est pas évident. Quand j’aurai repris du poil de la bête, je veux redonner au suivant, car j’ai été bien entourée et j’ai de bons amis à qui je veux rendre l’appareil. Sans faire la charité, toute l’aide (matériel ou monétaire) est la bienvenue» a conclu Mme Côté.

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