Walmart et Costco : retour sur la venue de deux géants

Walmart et Costco : retour sur la venue de deux géants
Le cas de COVID-19 s'est déclaré au McDonald's situé dans le Walmart. (Photo : archives)

COMMERCE. La venue d’un géant américain tel que Walmart et Cotsco fait souvent grincer des dents les détaillants locaux qui craignent pour leur avenir. Certains d’entre eux perdent même la bataille et doivent mettre la clé sous la porte. À Drummondville, l’implantation de ces deux grandes surfaces, l’une il y a plus de 20 ans et l’autre il y a près de 5 ans, a engendré certains changements qui, somme toute, ont été positifs pour bon nombre de commerces.

C’est le constat qu’en fait Guy Drouin, directeur général de Commerce Drummond.

Si le projet du Walmart en 1995 a suscité plusieurs appréhensions, vingt ans plus tard, celui-ci constate que la décision prise à l’époque fut la bonne.

«Plusieurs petites entreprises commerciales avaient peur que la venue du Walmart les fasse fermer. C’est un peu ce qu’on entendait aux États-Unis. Par contre, là-bas, ce que j’ai compris avec le temps, c’est que les Walmart allaient s’établir dans de petites communautés de 20 000 personnes et moins. Les gens délaissaient donc les autres magasins. Dans le cas de Drummondville, je n’ai pas souvenir que de petites entreprises ont fermé à cause du Walmart. Je dirais que les grandes surfaces ont été beaucoup plus affectées, entre autres Sears et Zellers, et ont dû s’adapter, comme partout ailleurs au Canada», explique-t-il, en se souvenant qu’une rencontre d’information publique avait eu lieu pour rassurer les gens à l’époque.

Presque 15 ans plus tard, jaillit l’idée d’un Costco, un projet qui semble-t-il n’a pas soulevé de débat au dire de M. Drouin.

«On était passablement convaincus, pour ne pas dire très convaincus, que la venue de ce nouveau géant n’allait pas impacter les petites entreprises. On savait par contre que les secteurs de l’alimentation et de l’électronique seraient plus affectés. D’ailleurs, les marchés épiciers ont peut-être souffert la première année, mais par la suite, à peu près tous ont retrouvé leurs chiffres d’affaires. Là, il y en a qui diront que Loblaws a fermé à cause de ça. Quant à moi, c’est parce que la chaîne n’était pas adaptée au marché québécois.»

En ce qui concerne les commerces électroniques, indique-t-il, ceux-ci connaissaient déjà une décroissance, notamment à cause de la vente en ligne.

«Certains ont fermé tandis que pour d’autres, ç’a été l’occasion de repenser à leur plan d’affaires et de se diriger vers autre chose.»

M. Drouin estime que le grand magasin de 150 000 pieds carrés, avec son inventaire de 14 millions de dollars, a permis d’amener une certaine «diversité» et surtout, de diminuer le peu de fuites commerciales qu’il y avait. Sans oublier qu’il attire un nombre non négligeable de gens des régions avoisinantes.

«Plus de 60 % de la clientèle vient de l’autoroute. C’est un plus. Et les commerces qui décident d’être plus agressifs en bénéficient. D’ailleurs, certains en avaient alors profité pour raffiner leur plan de communication afin de mieux cibler leur clientèle de sorte à l’augmenter tout en accroissant la vente de leurs produits et, du même coup, leurs profits», précise-t-il en soulignant que Costco a aussi permis l’implantation de plusieurs autres commerces.

Et puis, en décembre 2014, le Walmart est devenu un Supercentre. L’expansion a permis, entre autres, l’ajout d’un vaste éventail d’aliments frais ainsi qu’une bonification de l’offre de produits alimentaires secs, réfrigérés et congelés.

Toujours selon le dirigeant de Commerce Drummond, cette nouvelle offre alimentaire a fait moins mal aux marchands épiciers que peut l’avoir fait Costco.

«Les habitués du Walmart ont continué à y aller et ceux qui faisaient leur épicerie ailleurs n’ont pas changé d’endroit pour autant. Je suis convaincu que de part et d’autre il y a eu du transfert de clientèle, c’est-à-dire que Walmart a perdu des clients au profit d’autres et vice versa. Mais somme toute, ça c’est bien équilibré, surtout que cet agrandissement a coïncidé avec la fermeture du Loblaws.»

Bref, M. Drouin est d’avis que certains commerces ont dû fermer leur porte au cours des 20 dernières années devant cette concurrence, mais il affirme que «ça n’a pas du tout été l’hécatombe», comme certains ont pu le prétendre.

«Est-ce qu’on peut qualifier que c’est la conséquence de? Je ne crois pas. Pour les commerces concernés, ça n’allait peut-être pas bien avant et ça été le dernier coup de grâce», affirme-t-il, ajoutant que la venue des Promenades a été beaucoup plus problématique, surtout pour le centre-ville qui la première année, a affiché un taux de vacance de 30 %.

«C’est certain que si on était une ville en décroissance et arrivait Walmart ou Cotsco, ce ne serait plus le même portrait. Tant qu’on sera en croissance, on sera en mesure de répondre aux besoins des consommateurs. Mais si un jour l’offre devient plus grande que la demande, c’est là que ça va devenir problématique», laisse-t-il tomber.

Sous l’œil des commerçants

Afin de constater sur le terrain quels changements ont pu apporter Walmart depuis 20 ans et Costco depuis presque 5 ans au sein des petits commerces, L’Express en a joint quelques-uns. Voici leurs commentaires.

Marielle et Pierre Tremblay de Bijouterie Lampron : «Nous n’avons jamais vu la venue de ces deux magasins d’un mauvais œil. On en a toujours profité pour se renouveler et en étant une bijouterie spécialisée, on se démarque. De gros canons comme ça, ça empêche les fuites commerciales, donc c’est bon pour nous. De plus, surtout avec Cotsco, ça nous a permis d’attirer une clientèle de l’extérieur.»

Guylaine Bouthillette de Jeuxjouets, fermé il y a environ quatre ans : «L’arrivée du Walmart n’a rien changé à l’époque. Pour moi, c’est bien plus Toys R Us qui a fait mal à mon commerce. Peu de temps après, mon chiffre d’affaires avait diminué de 50 %. Je me disais que l’effet nouveauté allait tomber, donc j’avais investi pour rénover l’intérieur du magasin. Lorsque Costco a ouvert, quelques mois après, je n’avais pas réussi à augmenter mes ventes. À cette époque, je m’étais lancée dans un nouveau projet aussi : Brimbelle. J’avais alors un choix à faire : laisser de côté ce projet afin d’être plus présente au magasin ou bien le fermer.»

Dave Morin de Buropro Citation : «L’arrivée de Costco est une chose, mais la venue des autres commerces à proximité a été plus importante pour nous. Ainsi, pour faire face à la concurrence, nous avons analysé les ventes au pied carré pour enlever les produits qui ne fonctionnaient pas et en ajouter d’autres de façon à nous démarquer. Nous avons tout refait le magasin et agrandi la section de jeux alors que nous avons diminué la quantité de produits du côté du matériel d’art. Là où Costco peut nous toucher plus, c’est au niveau des nouveautés dans les livres. Pour Walmart, je suis certain que plusieurs personnes traversent chez nous, notamment pour les fournitures scolaires, car nous dominons le marché avec 70 % des parts.»

Partager cet article