Une travailleuse de rang à l’écoute des agriculteurs du CDQ

Une travailleuse de rang à l’écoute des agriculteurs du CDQ
Anny Carignand

À partir d’aujourd’hui, une travailleuse de rang sillonnera les terres agricoles du Centre-du-Québec et de la Montérégie afin d’écouter les agriculteurs lui raconter leurs problèmes, ce qui leur évitera peut-être de se retrouver en détresse psychologique. Retenez bien son nom : Anny Camirand.

Embauchée la semaine dernière par l’organisme Au cœur des familles agricoles, établi à Saint-Hyacinthe, Mme Camirand est convaincue que les agriculteurs ont besoin d’un tel service. «Ces gens travaillent seuls, sept jours sur sept. J’espère les aider à briser leur isolement. »

En apprenant que l’on cherchait une intervenante pour aider les agriculteurs, Mme Camirand n’a guère été surprise. Issue d’une famille de producteurs laitiers, cette résidente de Notre-Dame-du-Bon-Conseil, connaît bien le milieu agricole et les problèmes de ses artisans.

Cela ne l’a pas empêché de se lancer dans la grande aventure agricole puisqu’elle et son mari ont racheté l’élevage bovin paternel de Sainte-Clothilde en 2015.  Une activité qui s’entremêle à son travail chez Vallecta, un centre d’expertise en production laitière pour lequel elle recueille des données de production en se promenant de ferme en ferme.

Stress et inquiétudes

Mme Camirand a reçu toutes sortes de confidences. Elle sait que les producteurs vivent beaucoup d’inquiétude alors que leur industrie subit de grandes transformations, ce qui est loin de les rassurer pour l’avenir.

L’insécurité financière et la perte de revenus ne sont  pas toujours la source des problèmes vécus par les agriculteurs, loin de là, mais lorsqu’ils s’ajoutent, le stress est énorme, signale Mme Camirand. Or, il est bien connu que les fermes actuelles sont de grosses entreprises qui exigent de gros investissements.

«Ce sont de grosses entreprises et ça coûte cher. L’automatisation, la robotisation, améliorent la qualité de vie des agriculteurs, certes, mais ça exige aussi de consacrer plus de temps à la gestion, ce qui requiert des compétences supplémentaires», soutient-elle.

Le risque de détresse psychologique s’observe aussi chez les groupes d’agriculteurs étant les plus touchés par le contexte économique de leur industrie agricole. Ces dernières années, l’industrie laitière connaît des bouleversements, surtout à cause du lait diafiltré. Les producteurs laitiers vivent un stress énorme. Ils auraient perdu jusqu’à 220 millions de dollars, juste en 2015 à cause de la diafiltration exigée.

L’importance des investissements décourage une certaine relève familiale, ce qui force des agriculteurs à s’ouvrir à l’idée d’une relève non-apparentée, souligne Anny Camirand.

Et les agriculteurs vivent aussi des divorces. Un phénomène assez récent dans ce milieu plutôt conventionnel, note-t-elle. La faute au mode de vie très exigeant ou était-ce tout simplement caché auparavant ? «Les agriculteurs sont des gens fiers et perçoivent cela comme un échec, donc ils n’osent pas en parler.»

«Moi, je veux justement normaliser ces événements de la vie avec eux. On va essayer de trouver des solutions. On va travailler en collaboration, dans un échange avec l’autre et dans le respect de l’autre. Mais il faut que l’autre soit prêt à faire un bout de chemin.»

«Je les comprends bien. Je me reconnais en eux. Je partage avec eux des valeurs familiales, d’entraide et de collaboration», assure Anny Camirand,

«Les agriculteurs, ce sont des gens simples, des gens vrais, des gens de cœur. C’est la passion qui les anime et les étoiles que je vois dans leurs yeux, ça vient me chercher», lance la nouvelle travailleuse de rang.

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