Détecteur d’alcoolémie sur tous les véhicules neufs: ce jour viendra

Détecteur d’alcoolémie sur tous les véhicules neufs: ce jour viendra
Pour la détection par l'haleine

ALCOOLÉMIE. Équiper tous les véhicules neufs vendus au Canada d’un détecteur d’alcoolémie, tel que le recommandait le coroner Yvon Garneau en 2011, n’apparaît plus si utopique aujourd’hui alors que de nouvelles technologies, actuellement à l’étude, permettent de l’envisager à un coût raisonnable.

Dans le cadre de son investigation suivant le décès tragique de quatre jeunes Drummondvillois survenu il y a cinq ans, soit le 10 octobre 2010 sur le boulevard Mercure, Me Garneau demandait à «Transports Canada de poursuivre ses efforts en vue de rendre obligatoire l’antidémarreur éthylométrique sur tous les véhicules neufs vendus au Canada». 

À l’époque, L’Express avait pu apprendre, par une lettre adressée à la coroner en chef Louise Nolet, dont nous avions obtenu copie, que Transports Canada jugeait impossible d’envisager un tel règlement, notamment en raison d’une technologie qui restait à élaborer.

Mais, depuis ce temps, la science a progressé et voilà que deux technologies sont présentement étudiées aux États-Unis pour détecter le taux d’alcool du conducteur: soit par l’haleine, soit par le toucher. Le site de «Driver Alcohol Detection System For Safety» (DADSS) détaille le fonctionnement de ces deux systèmes.

LE DADSS en image interactive

Pour la détection par l’haleine, un capteur, placé dans le haut du volant, est en mesure de percevoir la respiration naturelle. Si l’analyse qu’il effectue très rapidement détermine un taux d’alcoolémie supérieur à la limite permise, le véhicule ne démarre pas. C’est plus subtil et moins contraignant que de «souffler dans une balloune». Toutefois, comme le soulignent certains spécialistes dont le site AutoFocus, il faudra s’assurer de certains éléments: d’abord que c’est bien le conducteur, et personne d’autre, qui en fait usage; que les températures extrêmes qui peuvent régner dans les habitacles automobiles n’affectent pas les calibrations; et que soient mises en place des mesures prévenant les attaques informatiques et protégeant la vie privée.

Par le toucher, cette technologie mesure le taux d’alcool dans le sang via un bouton-poussoir, comme celui utilisé pour le démarrage dans certains véhicules. La lecture peut se faire évidemment très rapidement, soit en moins d’une seconde.

Cette réalité de voir tous les véhicules neufs vendus et fabriqués au Canada être munis d’une telle technologie, pour ambitieuse qu’elle soit, a le mérite de s’attaquer véritablement au problème de la conduite automobile en état d’ébriété, qui, chaque année, on le sait, emporte des milliers de vies et coûte des milliards de dollars.

Toujours beaucoup d’infractions au code de la route

Transports Canada est au courant de ces avancées technologiques mais joue de prudence sur ce terrain. En témoigne le courriel de Mélany Gauvin, conseillère principale en communications du ministère.

«Pour la mise en place d’un antidémarreur avec éthylomètre dans tous les véhicules fabriqués et vendus au pays, plusieurs défis de taille doivent être relevés, tels que la mesure d’alcoolémie, la fréquence de calibrage et la façon d’éviter des mesures faussées par d’autres type de produits à base d’alcool».

Selon Mme Gauvin, c’est le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé (CCATM) et le Conseil canadien des normes (CCN) qui ont officialisé la norme quant aux systèmes installés après la vente, ceux qui sont obligatoires pour les contrevenants.

C’est toutefois Transports Canada qui aura à approuver la nouvelle technologie le jour où elle sera rendue disponible, confirme Mme Gauvin qui ajoute ceci: «Transports Canada fait partie d’un comité sur le sujet dirigé par le gouvernement des États-Unis. Ce comité travaille avec les constructeurs de véhicules dans le but d’élaborer un dispositif antidémarreur avec éthylomètre produit par le fabricant d’équipement d’origine. Le Ministère étudiera toute recommandation qui découlera du travail du comité. Aux termes de la Loi sur la sécurité automobile, tout changement s’appliquerait uniquement aux véhicules neufs ou importés». Il faut préciser ici que ce sont les provinces qui ont le pouvoir de permettre ou d’ordonner l’utilisation d’un antidémarreur avec éthylomètre installé APRÈS la vente des véhicules.

Éduc’alcool: pour l’antidémarreur, mais pas à n’importe quel prix

Pour sa part, le coroner Garneau se réjouit de constater que sa recommandation, qui semblait d’abord sorti d’un monde idéal, n’était finalement pas si invraisemblable. «Au moment de la divulgation de mon rapport, une des recommandations suggérait d’imposer un couvre-feu entre minuit et 5h pour les conducteurs âgés de 24 ans et moins. Cela avait attiré l’attention des médias nationaux, mais la recommandation la plus pertinente était celle qui concernait l’installation d’un antidémarreur éthylométrique sur tous les nouveaux véhicules. Cette technologie ne doit pas être si inatteignable, pensons au système GPS, à la caméra de recul et à au système qui permet à une voiture de se stationner toute seule. Bref, je rêve du jour où, sur la lunette arrière des autos au Québec, on puisse y lire: cette voiture est munie d’un antidémarreur».

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