L’émeute de 1945

L’émeute de 1945
Le Cinéma Capitol (Coll. SHD).

Nouvelle publication de la Société d’histoire, Drummondville à l’heure de la guerre est un ouvrage historique qui souligne la participation des soldats francophones à l’effort de guerre, mettant en lumière les nombreux sacrifices consentis par tous, et particulièrement par ceux qui, sans y être contraints, ont choisi de risquer leur vie pour défendre une juste cause. «Clash with troops in a Quebec town». Ainsi apparaissait le 5 mars 1945 dans le Times de Londres, une dépêche de l’agence Reuter. L’échauffourée qui s’était produite à Drummondville dans la nuit du 24 au 25 février avait donc eu des échos jusqu’en Angleterre. L’émeute de Drummondville n’eut pas l’ampleur et la gravité de celle survenue à Québec en avril 1918, mais les deux événements avaient un point en commun: ils survinrent en réaction à la conscription.

L’origine de l’événement remonte au 10 octobre 1944, alors que deux prévôts venus arrêter Louis Letellier à Saint-Joseph durent battre en retraite devant une foule qu’ils jugèrent hostile. Il semble que la police militaire n’ait pas voulu laisser cet affront impuni, et qu’elle désirait prendre sa revanche et montrer à la population qui était le maître.

Donc, le samedi 24 février 1945, une vingtaine de camions et trois automobiles arrivèrent à Drummondville, chargés de policiers venant de Montréal. L’inspecteur Frank Zaneth de la Gendarmerie royale du Canada, unilingue anglophone, commandait cette troupe, qui comprenait 50 prévôts et 39 agents de la GRC. Cette descente en force n’avait manifestement pas comme but unique d’arrêter des insoumis, car un tel déploiement était sans commune mesure avec ce qu’on voyait d’habitude. Ce groupe de gendarmes et de prévôts se divisa en sections qui effectuèrent des descentes dans les lieux habituels: salles de billard, salles de quilles, restaurants, débits de boisson. Ils y interpellèrent des centaines de jeunes gens pour vérifier leurs papiers; une soixantaine furent arrêtés et conduits au bureau de la gendarmerie. Tout se passait alors dans l’ordre.

C’est au cinéma Capitol que les choses se gâtèrent. À la fin de la représentation vers 11h 40, alors que 800 personnes commençaient à quitter la salle, une douzaine de prévôts bouclèrent les sorties du cinéma et quelques officiers se mirent en frais de vérifier les papiers des hommes. Des agents de la GRC réglaient la circulation, arrêtaient les voitures pour réclamer aux occupants leurs papiers. Les prévôts se seraient montrés arrogants, et c’est ce qui aurait provoqué le désordre, car d’après le sergent Lemieux du bureau local de la GRC, deux policiers militaires auraient rudoyé un jeune homme qui refusait de s’arrêter. On rapporte également que deux ou trois jeunes qui n’avaient pas leurs papiers furent vigoureusement projetés dans un camion. C’est alors que la foule devint menaçante. Au début, il s’agissait de jeunes, mais ils furent rejoints par un nombre croissant d’adultes, hommes ou femmes: on parle d’environ 1200 personnes, qui envahirent la rue et bloquèrent les camions militaires le long du trottoir. À noter que le livre «Drummondville à l’heure de la guerre» est en vente à la Société d’histoire de Drummond au coût de 25 $.

Ne manquez pas notre prochain article à paraître le 16 décembre : «Les 100 ans de l’Hôpital Ste-Croix»

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