La réputation de Sophie Richard dans le monde du patinage artistique n’est plus à faire. La Drummondvilloise pourrait voir quatre de ses protégés participer aux prochaines olympiades d’hiver, à Vancouver, en 2010.
La carrière d’entraîneur de cette femme de 37 ans est indissociable de celle de Jessica Dubé, qu’elle dirige depuis maintenant 14 ans, et de son partenaire Bryce Davison. En compagnie de sa complice de toujours, la Soreloise Annie Barabé, Sophie Richard dirige également les destinées de Cynthia Phaneuf et de Shawn Sawyer, des athlètes classés troisièmes au Canada dans leur catégorie respective.
Après avoir quitté la compétition à l’âge de 21 ans, Sophie Richard a entamé une carrière de comptable, mais rapidement, elle a constaté que l’entraînement lui inspirait une véritable passion. «J’ai vite compris que je n’étais pas faite pour travailler derrière un bureau. J’ai décidé de me concentrer sur l’enseignement du patinage artistique. J’ai alors demandé à mon amie Annie Barabé, qui avait déjà un peu d’expérience en "coaching", de venir me donner un coup de main à Drummondville», se rappelle Sophie Richard.
Au cours des dernières années, les deux amies ont déménagé leurs pénates à Contrecœur, où elles ont ouvert une école de patinage artistique. Une vingtaine d’élèves de tous âges y sont inscrits, incluant les quatre patineurs de calibre international mentionnés plus haut. Josiane Fréchette (spécialiste des pirouettes) et Yvan Desjardins complètent l’équipe d’entraîneurs du «Training champions center». «Annie et moi, on se complète à merveille. On a deux styles complètement différents. Je dirais qu’Annie est un peu plus sévère : c’est souvent elle qui remet les pendules à l’heure. Moi, j’ai un côté plus maternel. Quand l’un de nos athlètes se blesse, c’est toujours moi qu’il vient voir», raconte Sophie Richard. «Je crois que nos athlètes aiment bien notre façon de voir le sport, poursuit-elle. À la différence des autres écoles, on est très proches de nos élèves. Au lieu d’avoir un groupe de 40 élèves, on se limite à 20, mais on prend le temps de s’en occuper.»
Au cours de la dernière année, la compagnie General Motors du Canada a remis une subvention de 10 000 $ à Annie Barabé et Sophie Richard. Cette somme leur permettra de mieux préparer leurs protégés en vue des Jeux olympiques de Vancouver.
Contrairement à la plupart des entraîneurs sur la scène internationale, Sophie Richard et Annie Barabé ne s’octroient aucun pourcentage sur les prix en argent remportés par leurs protégés. «On ne cherche pas des bonus. Notre plus belle motivation, c’est de voir nos athlètes s’améliorer et réussir », soutient Sophie Richard.
Dans le monde du patinage artistique, les athlètes dirigés par le duo Barabé-Richard sont reconnus pour leur charisme et leur élégance artistique. «C’est vraiment notre marque de commerce. Ailleurs au Canada, les entraîneurs mettent davantage l’accent sur les sauts que sur l’aspect artistique. Nos élèves se distinguent parce qu’ils ont un peu plus de maintien, un peu plus de finition. Pour eux, ça devient une seconde nature avant même qu’ils atteignent les rangs seniors. C’est vraiment ce qui nous différencie des autres écoles de patinage artistique», explique Sophie Richard.
L’aventure de Turin, l’épreuve de Colorado Springs
Lors des Jeux olympiques de Turin, en 2006, Sophie Richard et Annie Barabé faisaient partie d’un cercle restreint de 10 femmes parmi la centaine d’entraîneurs de la délégation canadienne. En sol italien, le duo Dubé-Davison a causé une surprise de taille en se hissant au dixième rang sur les 20 couples en présence. Le jeune Shawn Sawyer n’est pas demeuré en reste, se classant en 12e place parmi les 27 patineurs masculins.
«Turin, ce fut vraiment notre plus belle expérience, indique Sophie Richard. On ne s’attendait tellement pas à participer à ces Jeux. Dans le fond, Jessica et Bryce n’étaient pas prêts. Ils étaient encore des juniors, mais ils ont fait de leur mieux… et ils ont fini dixièmes! Aux prochains Jeux, on va être encore plus prêts.»
C’est également lors de leur participation aux Jeux de Turin que le clan québécois a fait la connaissance de Jamie Salé et de David Pelletier. Depuis, les champions olympiques des Jeux de 2002 ont pris Jessica Dubé et Bryce Davison sous leurs ailes. «Comme Jamie et David habitent à Edmonton, on les voit quatre ou cinq fois par année, mais on leur parle chaque semaine, précise Sophie Richard. Ils nous aident beaucoup sur le plan technique. Je ne m’en cache pas, Jessica et Bryce m’ont dépassé sur certains plans, alors Jamie et David nous aident à inventer et à travailler de nouvelles techniques. Tous ces efforts, on les fait en fonction des Jeux de 2010.»
Au même titre que l’aventure de Turin, le douloureux souvenir de Colorado Springs, où Jessica Dubé a été victime d’une coupure à la joue l’an dernier, demeure encore frais à la mémoire de Sophie Richard. À peine une semaine après l’accident, la jeune athlète et son partenaire étaient déjà sur la patinoire afin de reprendre l’entraînement. Quelques semaines plus tard, le duo se classait en septième place au championnat mondial, au Japon. «Toute cette histoire nous a rapprochés, témoigne Sophie Richard. C’est à ce moment que j’ai constaté que Jessica était la plus forte parmi nous. Jessica, c’est comme ma fille. Je l’ai toujours trouvée forte, mais elle est encore plus forte que je le pensais. Physiquement, elle est impressionnante, mais finalement, c’est mentalement qu’elle est la plus forte.»
L’athlète de 20 ans en a fait une autre preuve lors du récent championnat canadien, à Vancouver. Après avoir frôlé la catastrophe en terminant au cinquième rang lors du programme court, la Cyrilloise et son partenaire ont rebondi de brillante façon en livrant leur meilleure performance en carrière (120,54 points) lors du programme libre. Le couple a perdu son titre de champion canadien par seulement 15 centièmes de point… «Au programme court, Jessica a manqué un élément qu’elle ne rate jamais, souligne Sophie Richard. Bien sûr, elle a été déconcentrée, mais dès le lendemain, elle est revenue en force. Réaliser un score de 120 au lendemain d’une contre-performance, c’est extraordinaire.»
S’ils répètent cet exploit, Dubé et Davison pourraient monter sur le podium lors du prochain championnat du monde, qui aura lieu du 17 au 23 mars, en Suède. «C’est incroyable comment ils se sont rapprochés des Chinois au cours des derniers mois, précise Sophie Richard. Malgré tout, on y va une étape à la fois. On ne veut pas sauter une marche. En Suède, on vise une quatrième place, mais on ne sait jamais ce qui peut se produire durant la compétition.»