Deux femmes, une tête et plein de défis pour la Rose des vents

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Par William Hamelin
Deux femmes, une tête et plein de défis pour la Rose des vents
Édith Doucet et Stéphanie Gauthier sont les codirectrices de La Rose des vents depuis presque quatre ans. (Photo : Ghyslain Bergeron)

MAGAZINE. Édith Doucet et Stéphanie Gauthier sont les codirectrices générales du centre d’aide et d’hébergement pour les femmes et les enfants victimes de violence conjugale, la Rose des vents. L’Express Magazine s’est entretenu avec elles sur leur parcours à la direction de l’organisme.

Stéphanie Gauthier a travaillé pendant neuf ans à la protection de la jeunesse avant de commencer en tant que coordonnatrice clinique à la Rose des vents il y a 10 ans. Édith Doucet a, quant à elle, eu un parcours plus atypique. Elle a d’abord fait un baccalauréat en danse contemporaine et est devenue danseuse professionnelle pendant un certain temps.

«Quand j’ai eu mes enfants, j’ai décidé de faire un changement de carrière. Je me suis présentée comme adjointe à la direction de la Rose des vents et j’ai été engagée en 2017 pour ensuite, et tranquillement, monter les échelons», raconte-t-elle.

Les deux femmes se sont rencontrées au centre d’hébergement. Elles ont fini par être promulguées à sa tête et célèbreront leur quatrième année en tant que codirectrices le 1er avril prochain. Chacune a ses fonctions respectives. Stéphanie Gauthier s’occupe du volet clinique tandis qu’Édith Doucet se charge du volet administratif de l’organisme.

Avoir deux femmes à la direction de la Rose des vents apporte «un beau mélange», selon Stéphanie Gauthier. «On a deux personnalités totalement différentes qui se complètent. C’est ça [notre] formule magique», pense la codirectrice.

«J’ai envie de dire qu’on est deux femmes, mais une tête. On réfléchit ensemble et ça nous permet d’amener l’organisme peut-être plus loin encore. Ça permet de le porter à deux aussi, et c’est moins lourd parfois [avec] les situations qu’on entend et qu’on vit à la Rose des vents», rajoute Édith Doucet.

Défis et changements

Depuis leur arrivée à la direction du centre d’hébergement, Mmes Doucet et Gauthier sont fières de leur bilan jusqu’à maintenant. «Lorsqu’on est arrivées en poste, il n’y avait qu’une seule intervenante au service externe. Aujourd’hui, on en a quatre. On est aussi passé de 21 employés à 28. La qualité des services et le soutien aux intervenantes se sont développés», énumère Édith Doucet.

Stéphanie Gauthier s’occupe du volet clinique de la Rose des vents. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Leur mandat à la tête de la ressource communautaire a également apporté son lot de changements. Une des choses qui sautent aux yeux depuis deux ans est le visage de la clientèle. De plus en plus de personnes faisant appel à la Rose des vents sont issues de l’immigration.

Stéphanie Gauthier spécifie que cela amène des enjeux supplémentaires. Par exemple, certaines femmes n’ont pas de voiture pour se déplacer au centre d’hébergement. D’autres n’ont pas accès à des services à cause de leur statut d’immigrante et ont même plusieurs enfants à leur charge.

«Il peut y avoir la barrière de la langue et de la culture. Ça fait en sorte que ça demande beaucoup d’adaptation, de bienveillance et de patience», précise Édith Doucet.

La géolocalisation des femmes par leur conjoint est un des défis soulevés par les deux codirectrices. Mme Gauthier rappelle que l’adresse du centre d’hébergement est une information confidentielle. Elle est partagée auprès des clientes uniquement après qu’elles aient enlevé la géolocalisation de tous leurs appareils et de la plupart de leurs applications comme WhatsApp ou Snapchat.

«La technologie aide également le conjoint. La femme a beau être en sécurité chez nous, ce dernier peut quand même entrer en contact avec elle [à distance]. On essaie de les sensibiliser sur l’impact de maintenir le lien par message texte ou par téléphone avec leurs conjoints. Évidemment, des pères ont le droit d’avoir des nouvelles de leurs enfants, mais on va aider à encadrer les échanges pour que ce soit le moins nuisible pour [nos clientes]», soulignent les deux codirectrices.

Le plus important des défis à la Rose des vents reste le manque d’espace. Le service communautaire héberge au moins 100 femmes et autant d’enfants par année. Ce sont autour de 400 personnes qui reçoivent des services externes.

Édith Doucet s’occupe du volet administratif de l’organisme drummondvillois.(Photo : Ghyslain Bergeron)

«Je refuse autant de femmes que j’en accepte parce que je manque de place. C’est un enjeu qui est majeur, qu’on adresse depuis plusieurs années aux instances gouvernementales. Malheureusement, il n’y a pas de financement qui suit, mais les besoins sont [encore] là», déplore Édith Doucet.

La durée des séjours a notamment été réduite à environ un mois par cliente pour laisser l’occasion à plus de femmes. Dans des cas moins urgents où ce n’est pas possible d’en accueillir plus, une aide de relocalisation temporaire dans une autre région du Québec est offerte avec l’appui de SOS violence conjugale, termine Stéphanie Gauthier.

Ces femmes qui les inspirent

La journée internationale du droit des femmes a lieu le 8 mars 2025. L’Express Magazine a demandé aux deux codirectrices de la Rose des vents quelles sont les femmes qui les inspirent dans leur travail au quotidien.

Stéphanie Gauthier : «Les femmes qui m’inspirent, ce sont toutes les intervenantes avec lesquelles on travaille dans notre équipe. Notre grande richesse, c’est ça. C’est vraiment chacune des femmes qui, chaque jour, choisit de venir donner du temps, de l’énergie et ses connaissances à la Rose des vents pour être en mesure de soutenir notre mission dans un contexte qui n’est vraiment pas facile et qui en demande beaucoup.»

Édith Doucet : «J’irais avec nos résidentes. Je trouve qu’elles sont courageuses. Elles quittent un milieu compliqué, parfois avec leurs enfants. C’est un peu un saut dans le vide pour elles. Elles décident de se choisir. Il y a quelque chose de beau et d’inspirant là-dedans. Une séparation, ce n’est jamais facile, alors dans un contexte de violence conjugale, c’est encore plus difficile.»

Pour écouter l’intégrale de l’entrevue, cliquez ici .

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