Pleins feux sur les 70 ans d’histoire de la Sylvania

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Par Emmanuelle LeBlond
Pleins feux sur les 70 ans d’histoire de la Sylvania
L’auteur Philippe Joly vient de publier un livre qui raconte l’histoire du géant de l’éclairage. (Photo : Ghyslain Bergeron)

HISTOIRE. Retracer les 70 ans de l’histoire de l’usine drummondvilloise de la compagnie Sylvania, telle est la mission que s’est donnée Philippe Joly. Après plusieurs années de recherche, de collecte et de rédaction, l’auteur est maintenant prêt à partager le fruit de son travail colossal.

«On dit tout le temps que Drummondville est la ville du textile. Ce n’est pas tout à fait vrai. Ça a été un peu la ville de la lumière aussi», dit d’entrée de jeu Philippe Joly, en entrevue avec L’Express.

Philippe Joly a travaillé pendant vingt ans à l’usine drummondvilloise de la compagnie Sylvania, de 1999 à 2018. (Photo : Ghyslain Bergeron)

L’autrice de ces lignes a rencontré ce dernier dans les anciens locaux de la Sylvania sur la rue Marchand. Celui-ci connaît très bien le géant de l’éclairage puisqu’il y a œuvré pendant 20 ans.

Philippe Joly ne s’en cache pas : il a le «S» tatoué sur le cœur. Il a d’abord été engagé en tant qu’ingénieur pour ensuite accéder au poste de directeur de production jusqu’à la fermeture définitive de l’usine.

Au fil des ans, il a développé des liens forts avec ses collègues. «Quand je suis entré, on était 700. À la fin, on était 70. En côtoyant les employés au quotidien, ce sont devenus des amis. C’est devenu du monde que je connais beaucoup. On a réussi à être performant en travaillant tout le monde ensemble. Ça a joué sur le sentiment d’appartenance.»

Aux derniers instants, l’usine était «sous respirateur artificiel». Face aux réalités du marché, la fermeture de la Sylvania était inévitable. «Dès mon arrivée en 1999, on m’a dit que l’usine allait fermer. Ça a toujours été une ombre planante. C’était une question de temps», mentionne-t-il.

«On faisait des lampes fluorescentes. Les machines des usines d’éclairage sont hyper complexes. Elles ne se modifient pas pour faire d’autres choses. Si le monde arrête d’acheter des fluorescents, c’est fini pour l’usine.»

L’usine drummondvilloise produisant des milliers de types d’éclairage. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Philippe Joly se rappelle encore ses derniers moments à la Sylvania en 2018. «Le quart de nuit et de soir étaient entrés plus tôt parce qu’on savait qu’on arrêtait à 2 h. On a suivi les dernières lampes. Dans l’entrepôt, on avait fait venir des tables, un buffet et de la musique. On a remis des cadeaux. On est allé au Vieux-Saint-Charles faire du karaoké. On avait beaucoup de plaisir dans cette dernière journée. Il y avait des larmes et du plaisir», raconte celui qui est maintenant consultant en amélioration continue et chargé de cours à l’Université de Sherbrooke dans le domaine de la gestion de projet.

Conserver la mémoire

C’est en découvrant des documents d’archives que Philippe Joly a eu l’idée d’écrire un livre. C’était une façon pour lui de conserver la mémoire de la Sylvania Canada de Drummondville.

L’auteur s’est donc lancé dans cette aventure en 2017. Au fil des ans, l’auteur a fouillé, collecté, interrogé et rédigé. Delà est né l’ouvrage composé de près de 200 pages.

Un local est d’ailleurs dédié à l’entreposage des archives de la Sylvania chez Canimex. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Le lecteur en apprend davantage sur la fondation de la marque Sylvania et de son déploiement dans la région. Ici, pas moins de 3000 personnes ont travaillé au sein de la manufacture, en 70 ans d’existence.

L’usine drummondvilloise était la plus diversifiée du monde, produisant des milliers de types d’éclairage allant des ampoules flash jusqu’aux lampes fluorescentes, en passant par les tubes radio, précise Philippe Joly.

Par son travail, l’auteur a réussi à percer le secret du département secret, alors que la majorité des travailleurs de la Sylvania en ignorait l’existence.

«Durant la guerre de Corée, à Drummondville, 100 % des tubes radio étaient faits pour l’armée canadienne. C’est un tube radio spécial qui allait dans les têtes d’obus», explique-t-il.

«Le département secret au complet était emmuré. Des gardiens surveillaient les entrées et les sorties. Ce n’était pas expliqué aux employés ce qu’ils faisaient.»

Dans l’ouvrage, Philippe Joly glisse quelques mots sur la célèbre tour d’eau, un élément central du paysage industriel de Drummondville.

L’usine drummondvilloise produisait des ampoules flash. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Il s’agit d’un réservoir d’eau qui a été construit en 1967, car les assureurs considéraient que l’approvisionnement en eau de la ville était insuffisant en cas d’incendie. La tour d’eau a été vidée et le système de pompage a été arrêté après la crise du verglas.

Ce livre – édité par la Société d’histoire de Drummond – met aussi en lumière les relations humaines qui ont caractérisé l’entreprise, en faisant de celle-ci un symbole d’excellence reconnue à travers le monde pendant maintes années.

Soulignons que de nombreux anciens membres du personnel de la Sylvania se sont rassemblés à l’occasion du lancement du livre, mercredi dernier. Un total de 150 personnes était présent.

L’auteur ressentait un sentiment de devoir accompli. «Je suis content que ça soit sorti pour les retraités. C’est un cadeau que je fais pour la société», soutient Philippe Joly.

L’événement s’est déroulé dans la nouvelle manufacture Torque Force du Groupe Canimex issue de rénovations majeures de l’ancienne usine Sylvania, propriétaire de l’endroit depuis 2018.

Un local est d’ailleurs dédié à l’entreposage des archives de la Sylvania, assurant ainsi leur conservation.

Dans l’ordre habituel, Luc Gaudreau, vice-président de la SHD, JoAnne Labrecque, présidente de la SHD, Roger Dubois, président-fondateur du Groupe Canimex et hôte du cocktail de lancement, Philippe Joly, ingénieur et auteur du livre, ainsi que Jean-François Savoie, directeur général de la SHD. (Photo: gracieuseté)
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