SANTÉ. Pour la énième fois, une centaine de professionnels de la santé ont sonné l’alarme, lundi matin. La vétusté de l’hôpital Sainte-Croix est devenue une menace quotidienne. Le bâtiment est maintenant une véritable bombe à retardement. Ensemble, ils lancent un ultime cri du cœur, un appel à l’action qu’ils espèrent ne plus jamais avoir à répéter.
Leur message est clair : le gouvernement Legault doit absolument inscrire officiellement le projet de construction d’un nouvel hôpital dans le prochain Plan québécois des infrastructures (PQI) qui sera dévoilé en mars prochain. Il faut accélérer la cadence pour éviter de potentielles catastrophes
«Nous avons déjà mis en place plusieurs solutions temporaires pour maintenir la qualité des soins de santé, mais la limite est dépassée : il est urgent d’agir avant qu’une catastrophe ne survienne», a insisté la Dre Nancy Durand, médecin de famille au GMF Centre de Santé et cheffe de la table médicale territoriale de Drummondville.
Les médecins et le personnel soignant sont catégoriques : ils ne veulent plus sortir en plein hiver pour décrier la situation. Ils veulent travailler et soigner la population dans un environnement digne de leur époque, pleinement sécuritaire et fonctionnel.
«Il y a un an presque jour pour jour, je me tenais ici devant vous pour vous livrer un message similaire et faire le souhait d’avoir la promesse d’un nouvel hôpital dans la dernière année», a rappelé la Dre Durand.

«Quand on m’a demandé de venir prendre la parole aujourd’hui, ça me paraissait complètement inutile. C’est bizarre que je dise ça, vous allez me dire, mais pour moi, c’est comme venir me demander de parler de la terre qui est ronde. À mon avis, c’est démontré, c’est clair, on n’a pas besoin de débattre de ça. C’est pareil pour le sujet de l’hôpital : c’est une évidence qu’on doit en avoir un autre et en principe, je n’aurais pas besoin d’être ici pour défendre le projet», a imagé le Dr Jean-Martin Turgeon, chirurgien orthopédiste.
«C’est clairement frustrant! Il y a tellement d’énergie qui est mise. Il y a tellement de preuves qui montrent que l’hôpital ne fonctionne pas. Pourquoi a-t-on besoin de revenir encore une fois cette année pour le défendre? Faut que ça passe maintenant, on ne veut pas revenir l’année prochaine pour faire la même chose», a exprimé fermement le Dr Simon Coiteux, médecin de famille au GMF-U de Drummondville et coordonnateur de l’enseignement médical pour le RLS Drummond.
Au cours des derniers mois, les bris liés à la vétusté de l’établissement se sont multipliés : dégâts d’eau récurrents, toilettes hors service, refoulements d’égouts à l’urgence, panne de chauffage dans les unités critiques comme les soins intensifs, bris sur le système de vide médical et, au cours des deux dernières semaines, panne des deux ascenseurs principaux et dégât d’eau majeur dans le garage des ambulances.
«Pas plus tôt que ce matin, les deux seuls laveurs pour la stérilisation des instruments chirurgicaux ont brisé. Et je ne nous parle pas des tuyaux de vapeur qui sont tellement rouillés qu’on ne peut même pas les réparer. Donc lorsqu’ils ne fonctionneront plus, la stérilisation deviendra impossible», a indiqué le chirurgien orthopédiste.

Ces problèmes liés à la désuétude des installations empêchent le personnel soignant de travailler efficacement et affectent leur santé physique et mentale. Les professionnels de la santé sont constamment sous pression et angoissés par l’imprévisibilité des défaillances de l’hôpital qui surviennent de jour comme de nuit. Ils n’en peuvent plus de devoir s’adapter et jongler avec ces situations complexes, qui s’ajoutent à la lourdeur de leurs tâches quotidiennes. Ils luttent chaque jour pour maintenir des soins de qualité dans un hôpital qui tombe littéralement en ruine.
Les médecins insistent : l’état de désuétude de l’hôpital accroît de façon exponentielle le risque qu’un bris de service survienne et menace éventuellement des vies humaines. Dans un contexte où la population est vieillissante et que la demande et la complexité des soins sont sources constantes de préoccupation, le statu quo est devenu insoutenable.
«Chaque fois que l’on rentre dans l’hôpital, on a peur que le ciel nous tombe sur la tête. Il n’y a pas une semaine sans qu’un accident, un bris, une situation problématique ne survienne. Nous allons éventuellement faire face à des événements vraiment graves. Je ne parle pas de bris de service, mais je parle de gens qui pourraient avoir des conséquences irréversibles pour leur santé», prévient la Dre Durand.

De l’espoir, mais pas assez rapidement
En avril 2024, le gouvernement du Québec a annoncé le lancement de deux appels d’offres visant à accélérer certaines étapes du projet de construction d’un nouvel hôpital à Drummondville. Le premier visait à mettre à jour le plan clinique du futur hôpital et le second devait permettre la mise sur pied d’un bâtiment modulaire pour l’urgence.
Depuis, les équipes soignantes et le personnel du CIUSSS-MCQ ont travaillé sans relâche pour faire avancer ces deux chantiers, mais la réalisation des projets se fait toujours attendre.
«Il est important de rappeler que la construction d’un bâtiment modulaire est essentielle pour tenir le fort pendant l’élaboration du projet du nouvel hôpital et sa construction. Il s’agit néanmoins d’une solution temporaire. Ce bâtiment ne permettra pas de régler les autres problèmes et défaillances qui causent actuellement des bris fréquents à l’hôpital Sainte-Croix», a laissé tomber la médecin.