Parc régional : un retard d’entretien à rattraper

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Par Louis-Philippe Samson
Parc régional : un retard d’entretien à rattraper
Chaque année, la MRC de Drummond commande des travaux forestiers dans le Parc régional de la Forêt Drummond afin de faire une gestion durable de la forêt. (Photo : Ghyslain Bergeron)

FORÊT. Chaque année, la MRC de Drummond commande des travaux forestiers dans le Parc régional de la Forêt Drummond. Ceux-ci sont planifiés et réalisés avec l’aide de son partenaire le Groupement forestier Arthabaska-Drummond (GFAD).

Cet automne, plusieurs citoyens ont été inquiets de voir les arbres matures d’un terrain en bordure du chemin du Golf Ouest être abattus. Ce genre de travaux, qualifiés de coupes avec protection de la régénération et des sols (CPRS), est exceptionnel, mentionne le technicien forestier Jean-Philippe Tremblay, directeur des opérations au sein du GFAD. Ils ont été réalisés, car les arbres, plantés en monoculture, étaient arrivés à maturité et car l’endroit présente un grand potentiel de régénération.

Jean-Philippe Tremblay, technicien forestier et directeur des opérations au Groupement forestier Arthabaska-Drummond. (Photo : Ghyslain Bergeron)

«En regardant les cernes de croissances, on constate que cette plantation ne poussait plus, indique M. Tremblay. Si on avait fait seulement une éclaircie, on n’aurait pas pu prédire sa réaction. Il y aurait eu des risques de renversements. Ce sont des épinettes de Norvège qui avaient probablement 70 ans; on n’en plante plus au Québec. L’autre facteur qui nous a aidés à prendre la décision est toute la régénération qu’on a au sol. Lorsque nous l’avons vu, on a décidé de travailler avec elle. En éclaircissant maintenant, et en refaire une dans 10 ans, on aurait créé des risques d’endommager la régénération naturelle.»

La coupe qui a été réalisée l’automne dernier, sur une zone qui représente 0,15 % du territoire du parc régional, a libéré les jeunes pousses. Cela permettra aux arbres, principalement des érables rouges et des épinettes, d’accélérer leur croissance.

Aussi, M. Tremblay estime que les arbres qui y poussent actuellement atteindront une hauteur de six pieds (1,83 mètre) d’ici cinq ans au maximum et qu’une première récolte d’éclaircie pourrait être faite d’ici 20 à 25 ans. À ce moment, cette parcelle présentera une forêt mixte contrairement à la monoculture qui s’y trouvait.

Entretien déficient

Cette parcelle du territoire du parc régional est un exemple parmi d’autres de l’état de la forêt. Avant que la MRC en fasse l’acquisition, l’entretien y était presque inexistant. Ainsi, il y a beaucoup de retard à rattraper afin de retrouver une forêt dans un état désiré. La plupart des travaux qui sont actuellement faits sont des coupes d’amélioration.

«En général, la forêt du parc régional n’a pas eu de travaux depuis près de 40 ans. Il y a eu des plantations, à cette époque, qui n’ont jamais été aménagées. On dirait qu’on est dans une forêt qui a été oubliée et qui est en cours de dégradation. Une forêt aménagée est analysée aux 10 à 20 ans pour voir s’il y a des signes de maladie ou de dépérissement. Celle-ci a une croissance de bois stable et les arbres sont moins à risque de maladies», décrit Jean-Philippe Tremblay.

Jean-Martin Lavoie, coordonnateur du Parc régional de la Forêt Drummond à la MRC de Drummond. (Photo : Ghyslain Bergeron)

«Depuis 2020, notre objectif est de rattraper le retard, ajoute Jean-Martin Lavoie, coordonnateur du Parc régional à la MRC. Tranquillement, on prend en charge le territoire. C’est une grande propriété, c’est difficile d’en venir à bout. Chaque projet couvre environ 30 hectares et on en réalise deux par année. C’est la cadence qu’on veut conserver. À ce rythme, il faudra 33 ans pour faire le tour du parc régional. Actuellement, le plus gros risque pour la forêt est d’oublier son entretien. La forêt n’ira nulle part. Elle restera une forêt. Le territoire est protégé.»

La présence d’une grande variété d’essences et de plantations en monoculture demande donc des gestions différentes. Ce qui peut expliquer que des actions plus drastiques aient été performées sur des terrains ciblés.

Dans un objectif d’aménagement forestier durable, la présence d’arbres cassés au sol est à éviter. Ainsi, en raison du manque d’entretien, des sections, sur lesquelles on ferait normalement une éclaircie entre 35 % et 40 % du volume, ont plutôt été faites à une hauteur de 45 % pour prévenir les renversements. Par exemple, dans un secteur, à la limite du Parc régional et du parc du Sanctuaire de Saint-Majorique-de-Grantham, on a misé sur la conservation des essences nobles d’avenir, comme l’érable et le pin, en retirant principalement les épinettes. Normalement, il faudra de 10 à 15 ans pour y retrouver le même volume de bois qu’avant la coupe.

Les arbres récoltés sont ensuite envoyés dans des usines de sciage ou de pâtes et papiers ou encore pour la production de biomasse. Cela permet à la MRC d’engranger des revenus qui peuvent ensuite être réinjectés dans le budget du Parc régional. Aujourd’hui, elle en est à sa sixième saison de foresterie.

À travers tous les territoires que le GFAD traite, l’entreprise réalisera majoritairement des travaux de jardinage et d’aménagement lors desquels elle prélèvera de 25 % à 45 % du volume de bois. Pour elle, les CPRS sont une stratégie de dernier recours.

Lorsque la MRC a fait l’acquisition de la Forêt Drummond, en 2018, un plan d’aménagement forestier sur une dizaine d’années a été rédigé. Celui-ci comprend un inventaire de la forêt et en fait le diagnostic. Le territoire est répertorié selon les peuplements et chacun d’entre eux s’est fait assigner des travaux à réaliser selon l’urgence d’agir. C’est un portrait qui peut aussi être adapté dans le temps selon différentes contraintes. Ce plan prend aussi en considération les changements climatiques, la faune, le développement des activités récréotouristiques et aussi pour le paysage.

Ces rondins servent à protéger le sol et le fosset lors des passages de la machinerie. Ils seront retirés à la fin des travaux. (Photo : Ghyslain Bergeron)

De plus, les travaux sylvicoles permettent de rouvrir des chemins forestiers qui ont été laissés à l’abandon. Ce sont des infrastructures qui existent déjà en raison des travaux faits il y a de nombreuses années. Certains ont cependant été laissés sans entretien, mais leur réouverture demeure plus économique que l’aménagement de nouveaux chemins. Ceux-ci pourront ensuite être mis à la disposition des usagers et être entretenus par la MRC.

D’ailleurs, le GFAD prend de nombreuses précautions afin d’endommager le moins possible les terrains sur lesquels il travaille. Des branches d’arbres demeurent au sol afin de permettre le passage de la machinerie lourde. Une fois les travaux finis, un véhicule retirera les branches laissées temporairement au sol et nivellera les endroits les plus abimés.

Aussi, le retour de la faune est un avantage des travaux de foresterie que réalise la MRC de Drummond. Par le passé, la Forêt Drummond était un endroit où l’on pouvait voir fréquemment des chevreuils, des perdrix et des lièvres, par exemple. Le manque d’entretien a occasionné la diminution des milieux de vie de ces animaux. Le renouvellement de la forêt fait en sorte que de nouveaux abris et sources de nourriture se développent. D’ailleurs, les ouvriers forestiers ont l’habitude de voir des chevreuils suivre leurs travaux.

Par ailleurs, la MRC de Drummond prévoit de mieux informer la population et les utilisateurs du parc des prochains travaux qui seront réalisés. Cela sera fait avec encore plus d’attention lorsque les travaux toucheront des secteurs visibles des passants. À ce moment, des affichages les annonçant et les expliquant se retrouveront surtout près des endroits où passent les ouvriers et en bordure des sentiers pour les usagers.

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