Récupérer et raconter la matière grâce à la mosaïque

Récupérer et raconter la matière grâce à la mosaïque
Marylène Ménard réalise des mosaïques de toutes sortes depuis une vingtaine d’années. Elle est ici dans son atelier au sous-sol de sa résidence à Drummondville. (Photo : Ghyslain Bergeron)

MAGAZINE. Partager l’histoire de la matière. Voilà une chose que cherche à transmettre l’artiste Marylène Ménard à travers ses mosaïques.

Le choix des matériaux est d’autant plus important lorsqu’on cherche à raconter leur histoire. C’est pourquoi Marylène Ménard accumule de la vaisselle, de la céramique, des tissus et objets de toutes sortes afin de créer ses œuvres.

L’atelier de Marylène Ménard est rempli d’objets de toutes sortes qu’elle réutilise dans ses mosaïques. (Photo : Ghyslain Bergeron)

«Pour moi, étant issue des métiers d’arts, c’est plus la matière qui me parle que les idées, indique Mme Ménard. C’est un peu pour cette raison que je ne m’intègre pas dans les galeries contemporaines où, pour eux ce sont les idées qui importent. Je veux raconter d’où vient la matière. Je prends le temps d’expliquer aux gens d’où viennent les pièces de la mosaïque. Un morceau peut provenir d’un verre de la France et un autre du IKEA. J’aime raconter l’anecdote. Ils repartent avec un petit bout de l’artiste chez eux.»

La mosaïste signale aussi qu’un projet peut changer d’un bout à l’autre si elle déniche un objet qui l’inspire.

Pour l’artiste drummondvilloise, la récupération est son premier objectif. Les objets peuvent encore être utiles même si leur usage primaire ne peut plus être accompli. C’est aussi en raison de sa conscience environnementale, ou son «écoanxiété» comme elle l’a qualifié, que Mme Ménard tient à utiliser des matériaux de seconde main. Elle est également friande des liens qu’elle arrive à créer grâce à ces objets. Lors des expositions, des visiteurs peuvent reconnaître des articles dont ils ont déjà possédé un exemplaire. D’autres lui remettront même des objets à utiliser dans de prochaines œuvres.

«Les possibilités sont infinies. Je peux exploiter les objets de façon plus traditionnelle comme je peux y aller d’une façon complètement différente. C’est un monde vaste, même illimité. J’ai fait des expositions avec d’autres mosaïstes et chacun peut travailler à sa façon. On peut s’exprimer amplement avec cet art. C’est une technique entière», mentionne Marylène Ménard.

Pour arriver à ces possibilités infinies, l’artiste dit trouver l’inspiration dans tout et n’importe quoi. Elle s’inspire surtout des fabrications humaines. Les œuvres de Marylène Ménard ont aussi évolué avec le temps. À ses débuts, il y a une vingtaine d’années, elle suivait le style victorien, très symétrique. Tranquillement, elle a adopté l’art nouveau, pour maintenant avoir trouvé sa niche dans un art plus simple grâce notamment à la dalle de verre. Aujourd’hui, elle se plait dans les œuvres abstraites et géométriques.

«Je regarde plein d’images. Parfois, je me rends quelque part et j’y vois un bout de tapis ou de carrelage qui m’inspire. C’est partout; je suis toujours aux aguets. Je peux partir d’une chose que j’ai vue et créer une œuvre», raconte l’artiste.

Marylène Ménard fabrique aussi des sculptures à partir de dalles de verre coloré avec l’aide de son conjoint Robert Biron. Bien que ces dalles soient «neuves», elles ont été fabriquées au courant des années 1980 en grande quantité. La Drummondvilloise se procure donc des stocks invendus pour construire ses œuvres.

«Je présente des idées et Robert est plus dans la technique. Il calme mes envies de grandeur, mais on travaille bien ensemble», indique la mosaïste.

Œuvre géante

Récemment, Marylène Ménard s’est lancée dans le plus important projet de sa carrière d’artiste. Elle a travaillé avec de nouveaux arrivants afin d’assembler une mosaïque de 1,8 mètre sur 4,5 mètres. Elle a reçu une bourse au partenariat territorial du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) qui lui a permis d’aller de l’avant.

L’œuvre «Nouveaux alentours» mesure 1,8 mètre sur 4,5 mètres et a été réalisée par Marylène Ménard et une vingtaine de Drummondvillois issus de l’immigration. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Elle a mis sept mois de travail sur ce projet, dont cinq consacrés à la fabrication. La vingtaine de Drummondvillois immigrants ont pris part à six ateliers de création afin de confectionner leur section de la mosaïque.

Le résultat est donc une reproduction géographique de la région de Drummond avec en son centre la rivière Saint-François. Chaque participant avait à réinterpréter un quartier sur la mosaïque avec les objets de son choix. La seule contrainte à suivre était de respecter la gradation de couleurs déterminée par Marylène Ménard. La mosaïste a quant à elle construit le canevas et reproduit la rivière et les rues avec des morceaux de miroirs.

Intitulée Nouveaux alentours, l’œuvre a été exposée à l’espace solo de la galerie Axart dans le cadre de l’exposition du même nom entre le 7 novembre et le 1er décembre. Marylène Ménard souhaite maintenant faire circuler cette œuvre dans la région, pendant deux ans, dans diverses salles d’exposition et bibliothèques. Elle entretient même l’ambition de répéter l’expérience d’une œuvre collective dans le futur.

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