Thanatologue à 24 ans : le parcours atypique de Daphnée Courchesne

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Par Ghyslain Bergeron
Thanatologue à 24 ans : le parcours atypique de Daphnée Courchesne
Daphnée Courchesne est thanatologue et directrice des Services funéraires St-Pierre de Drummondville. (Photo : Ghyslain Bergeron)

MAGAZINE. Elle n’avait que 9 ans, mais elle savait déjà qu’elle voulait devenir thanatologue. Diplômée il y a à peine trois ans, elle est aujourd’hui à la direction des Services funéraires St-Pierre de Drummondville et nouvellement technicienne prosectrice à la Faculté de médecine et des sciences de l’Université de Sherbrooke. L’Express magazine vous transporte dans l’univers méconnu de Daphnée Courchesne.

Dès son jeune âge, Daphnée Courchesne a été confrontée à la mort. Son grand-père paternel est décédé alors qu’elle avait 9 ans.

«Ma grand-mère et mes parents ont décidé d’exposer mon grand-père pour nous aider (les trois enfants) à comprendre le deuil. Je le trouvais beau et je croyais qu’il dormait. Je suis allée poser des questions au thanatologue et au retour, j’ai confié à mes parents que je voulais faire ce métier», a expliqué la femme de 24 ans.

Ce qui semblait être une idée farfelue aux yeux des parents à l’époque s’est concrétisé quand elle a été admise au Cégep de Rosemont en Techniques de thanatologie. Elle a gradué en 2021, un diplôme d’études collégiales en main.

Daphnée Courchesne. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Les étapes

Daphnée Courchesne, en tant que directrice des services funéraires depuis novembre 2022, a l’opportunité d’accompagner les familles dans le deuil de A à Z.

«Quand on nous avise du décès, on va récupérer le corps. Ensuite, on s’occupe de toute la paperasse (il y en a beaucoup) et on planifie comment on va disposer du défunt, quel rituel on va pratiquer, etc. Comme nous n’avons pas de laboratoire encore sur la rue Saint-Pierre, le corps est envoyé à Sherbrooke pour le préparer», a détaillé la thanatologue.

La préparation du corps

Pour une incinération, une inspection est effectuée afin de déterminer s’il y a un stimulateur cardiaque pour éviter que la pile n’explose lors d’une crémation.

«L’embaumement n’est pas nécessaire si la dépouille n’est pas exposée. Après avoir placé le corps dans le four crématoire pendant environ trois heures, nous pouvons terminer le travail en pulvérisant délicatement les os en cendres. Par la suite, les cendres sont soit mises en terre, dans un habitacle ou bien la famille peut les rapporter à la maison. C’est au choix.»

Pour l’embaumement, le sang est retiré et remplacé par un fluide à base de formaldéhyde. «Il y a des gens qui croient encore que les défunts sont bourrés de journaux ou de paille. Il y a de l’éducation à faire. Aucun organe n’est retiré (sauf s’il y a un don et cette étape est réalisée au Centre Héma-Québec)», a ajouté Mme Courchesne.

Ensuite, il y a une ponction et aspiration des organes creux pour éliminer le plus de fluides et de bactéries possible. Le corps peut donc se conserver plus longtemps. L’opération d’embaumement est terminée par l’ajout d’un fluide très puissant au niveau de la cage thoracique et de l’abdomen.

Daphnée Courchesne. (Photo : Ghyslain Bergeron)

Avant l’exposition de la personne décédée, les cheveux sont lavés et le corps nettoyé avec un savon antibactérien. L’habillement et le maquillage sont réalisés quelque temps avant la présentation du corps à la famille lors du service funèbre.

«Parfois, les gens sont surpris de me voir. C’est comme s’ils ne s’attendaient pas à voir une jeune femme. Mais comme j’accompagne les familles tout au long du processus, ils me font rapidement confiance.»

Son état d’esprit

Elle se l’avoue, ce n’est pas un métier commun. Elle agit toujours en tout respect de la dépouille.

«Ça peut paraître étrange, mais je leur parle! Quand je fais des manipulations plus intenses, je l’avise. Ça me rassure, je ne sais pas! Parfois, je suis confrontée à des cas qui viennent me chercher un peu plus. Exemple, j’ai embaumé un homme de mon âge, des enfants, mais depuis que je suis une maman, j’appréhende ce moment. Il m’arrive d’être «shakée», mais je me suis développé des moyens, des systèmes de défense comme jouer de la musique, lire un livre et même juste d’en parler ça m’aide.»

Au cours de sa pratique, il lui est arrivé de vivre des expériences surnaturelles. «On a chacun nos croyances, mais il y a eu des manifestations et événements inexplicables. Parfois ça fait peur, mais j’aime penser qu’ils sont là», a-t-elle confié.

Un cadeau à ses proches

Daphnée Courchesne a tenu à conseiller les lecteurs sur le sujet des préarrangements funéraires. «Mieux vaut se préparer. Ça évite aux proches de prendre des décisions dans un moment qui n’est déjà pas facile. Parfois, ça éclate. C’est un cadeau qu’on se fait à nous et nos proches. N’ayez pas peur de la mort. Au contraire, prenez le temps de savourer la vie et de préparer ce qu’on peut contrôler pour le bien de vos proches et pour le respect de vos dernières volontés», a conclu Mme Courchesne.

 

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